Epargne retraite

Relever les plafonds est une nécessité

Bertrand de Surmont, président de Planète CSCA et Pierre-Emmanuel Sassonia, directeur général d’Eres Group et membre de Planète CSCA
La future réforme des retraites va modifier en profondeur notre système par répartition
C’est le moment d’inciter les français à épargner en relevant le plafond épargne retraite qui est aujourd’hui insuffisant

L’objectif de convergence et d’équité (1 euro cotisé doit ouvrir les mêmes droits quel que soit le statut de celui qui a cotisé) est plébiscité : 66 % des Français s’y déclarent favorables (Ifop/JDD 31 août 2019). Si le débat se crispe actuellement sur l’âge de liquidation ou la durée de cotisation minimale pour liquider sa pension, un des enjeux à venir est le plafonnement des assiettes de cotisations : dans le futur régime universel, on ne cotisera que jusqu’à 3 Pass (au lieu de 8), soit environ 120.000 euros.

 

Un plafond de cotisations abaissé qui réduira les pensions des salariés. Pour les entreprises cela se traduira par des charges patronales plus faibles. Pour les salariés visés, leur rémunération nette sera un peu plus élevée, mais leurs pensions de retraite seront revues à la baisse. Cette problématique est bien connue des travailleurs non-salariés (gérants majoritaires et professions libérales). Leur régime complémentaire étant peu développé, leur taux de remplacement est très faible. Pour leur permettre de se constituer un complément de revenus, ils bénéficient d’un plafond de déductibilité fiscal spécifique. En plus du plafond de déductibilité retraite universel (10 % du revenu d’activité), les TNS peuvent déduire fiscalement leurs cotisations Madelin à hauteur de 15 % de leur bénéfice dépassant 1 plafond de sécurité sociale (plafond que les initiés appellent « Mad15 »). Il nous semble que la même méthodologie doit être appliquée pour compenser la perte de cotisations sociales des salariés. Actuellement, sur un article 83 ou sur le futur PER obligatoire (retraite supplémentaire à cotisations définies), les cotisations versées par l’employeur sont exonérées à hauteur maximum de 5 % de la rémunération brute (plafonnée à 5 Pass). Elles sont soumises uniquement à un forfait social fixé demain à 16 % et à la CSG de 9,7 %. Le total des cotisations employeur et salarié est exonéré d’impôt sur le revenu (IR) à hauteur maximum de 8 % de la rémunération brute (plafonnée à 8 Pass).

 

Les entreprises et les salariés doivent pouvoir compenser la perte. Nous proposons qu’un deuxième étage soit créé sur les articles 83 pour compenser la perte de cotisations sociales des salariés concernés par le plafonnement des cotisations aux régimes obligatoires. Les entreprises, qui souhaiteraient compenser les 22 % de cotisations sociales perdues, auraient la possibilité d’augmenter leurs cotisations sur un article 83. Les cotisations employeurs pourraient être exonérées de cotisations sociales dans la limite de 10 % de la rémunération brute dépassant 3 Pass (plafonnée à 8 Pass). Nous préconisons que le cumul des cotisations employeur et salarié soient exonéré d’IR à hauteur de 16 % de la rémunération brute dépassant 3 Pass (dans la limite de 8 Pass). En tenant compte du forfait social de 16 %, cette mécanique permettrait aux entreprises qui le souhaitent de recycler un peu plus de 80 % des cotisations sociales économisées en versements obligatoires sur un article 83. Et pour les salariés dont l’employeur ne souhaiterait pas compenser la perte de cotisations retraite, ils bénéficieraient d’un deuxième étage pour leur plafond épargne retraite avec une déduction supplémentaire égale à 20 % de leur revenu d’activité N-1 dépassant 3 Pass (sans dépasser 8 Pass).

 

Le PER est une opportunité pour les épargnants. Les recettes du forfait social augmenteraient à due proportion, sachant que les cotisations aux régimes obligatoires sont aujourd’hui déductibles. Il y aurait donc un gain net pour les finances publiques. La loi Pacte a acté des avancées majeures pour l’épargne retraite. En harmonisant les règles applicables aux plans d’épargne retraite, quel que soit le statut de l’épargnant, elle va permettre d’en augmenter la lisibilité. La loi Madelin a prouvé son efficacité : 60 % des TNS ont souscrit un contrat d’épargne retraite supplémentaire. S’inspirer de cette réussite avec la création d’un nouvel étage de plafond de cotisations obligatoires ou facultatives déductibles permettrait aux salariés de s’approprier les enjeux de la réforme des retraites à venir. La création du nouveau PER et la réforme des retraites seront des succès si on introduit par ce relèvement de plafond un lien entre les deux.