
Tiers payant : une généralisation considérée comme irréaliste

Prévue pour être appliquée dès le 30 novembre 2017, la généralisation du tiers-payant, qui correspond à une dispense d’avance de frais pour le malade, sera retardée. La ministre de la Santé Agnès Buzyn l’a confirmé récemment dans un entretien au JDD. Cette décision se base sur un rapport commandé à l’Inspection Générale des affaires sociales (IGAS) durant l’été et dont les conclusions ont été rendues publiques ce mois-ci. L’IGAS considère que l’obligation de pratique du tiers-payant pour tous les patients au 30 novembre 2017 comme : « irréaliste compte-tenu des délais. Il supposerait une évolution très rapide des pratiques au détriment d’un accompagnement renforcé indispensable pour mieux informer les professionnels de santé sur le tiers payant et leurs garanties ».

Premier constat, si la pratique a progressé depuis 2015 elle reste très variable selon les professions de santé. L’IGAS indique que les pharmaciens ont été les précurseurs dans le domaine et c’est pourquoi ils affichent le pourcentage d’actes soumis au tiers payant le plus élevé (93 %). Les centres de santé font également figure de bons élèves (entre 45 et 75% des actes. « Certaines professions (médecins, chirurgiens-dentistes) ont une pratique du tiers payant limitée aux cas obligatoires et la pratique du tiers payant intégral y est très faible (4% pour les chirurgiens-dentistes, 7 % pour les généralistes) », indique l’IGAS.
Il y a le tiers payant qui dépend de l’Assurance-maladie obligatoire (AMO) et celui qui relève de l’assurance-maladie complémentaire (AMC). Il existe un écart dans les pratiques entre les deux systèmes qui s’explique par le fait que : « les outils techniques développés pour la pratique du tiers payant complémentaire ne sont pas encore opérationnels. Il renvoie également à une gouvernance très différente de part et d’autre. La gouvernance unifiée de l’AMO, sous l’égide de l’UNCAM, facilite les travaux et s’appuie sur une norme unique (la carte vitale) », analyse l’IGAS. Du côté de l’AMC : « les pratiques demeurent encore très variées selon les organismes (supports de droits distincts, nombre élevé d’acteurs dans un environnement concurrentiel, hétérogénéité des systèmes d’informations », complète l’IGAS. L’organisme fait le constat que le principal frein au développement du tiers payant côté AMO n’est pas de nature technique mais tient à une confiance encore trop fragile des professionnels de santé liée à une méconnaissance des outils et des garanties du tiers payant. Côté AMC, le tiers payant se heurte à des problèmes techniques (notamment logiciels) et nécessitera une harmonisation des pratiques de facturation et un accompagnement unifié des professionnels. L’IGAS conclut que la généralisation du tiers payant complémentaire n’est un objectif atteignable techniquement « à compter de 2019 que pour certaines professions de santé ».