RETRAITES

Les valeurs mobilières sont les grandes perdantes de la réforme

A l’occasion d’une conférence de presse, le 16 juin dernier, le ministre du Travail Eric Woerth a présenté les pistes retenues pour la réforme des retraites Outre le recul de l’âge légal, le ministre a notamment annoncé un alourdissement de la fiscalité des hauts revenus et des gains de valeurs mobilières.

Attendus depuis plusieurs semaines, les détails de la réforme des retraites et de son financement ont enfin été rendus publics par Eric Woerth la semaine dernière.

L’âge légal fixé à 62 ans.

Comme prévu, le ministre du Travail a tout d’abord annoncé un relèvement de l’âge légal. Le projet du gouvernement prévoit que celui-ci augmente, selon l’année de naissance, de quatre mois par an à compter du 1er juillet 2011 pour atteindre 62 ans en 2018. L’âge pour obtenir le taux plein serait décalé dans les mêmes proportions à compter du 1er juillet 2016 pour atteindre 67 ans en 2023, au lieu de 65 ans actuellement. Quant à la durée de cotisation, suivant les règles établies par la réforme de 2003, celle-ci devrait passer à 41,5 ans en 2020. En complément, Eric Woerth a également présenté une série d’augmentations d’impôt ciblées, concernant notamment les hauts revenus et les revenus du capital.

Taxation plus lourde des stock-options…

Ainsi, le projet prévoit d’augmenter la tranche la plus élevée de l’impôt sur le revenu (IR) d’un point. Cette tranche qui s’applique, en 2010, aux revenus annuels (par part de quotient familial) supérieurs à 69.783 euros passerait donc de 40 % à 41 %. Cette imposition supplémentaire ne serait pas prise en compte dans le calcul du bouclier fiscal.

Par ailleurs, les stock-options - et probablement les actions gratuites - seraient davantage taxées avec le relèvement de la contribution sociale payée par le bénéficiaire de 2,5 % à 8 %, qui s’ajoute aux 12,1 % de prélèvements sociaux existants. D’autre part, la contribution versée par l’employeur à l’attribution des options augmenterait de 40 %, en étant fixée à 14 %, contre 10 % aujourd’hui. « Malgré tout, le dispositif demeurerait incitatif, en particulier au niveau des charges patronales », explique Bruno Erard, avocat associé chez Ayache, Salama & Associés et membre de Capital Ingenium, rappelant que la France est l’un des rares pays à avoir mis en place un régime fiscal avantageux pour ces mécanismes.

… et des retraites « chapeaux ».

Le projet du gouvernement prévoit également d’alourdir le régime fiscal des retraites chapeaux. Après s’être attaqué aux retraites chapeaux les plus importantes avec la mise en place d’une contribution additionnelle de 30 % pour les rentes supérieures à huit fois le plafond annuel de la Sécurité sociale l’année dernière (1), il vise cette fois l’ensemble du dispositif.

Il a ainsi annoncé la création d’une contribution salariale de 14 % s’ajoutant aux prélèvements sociaux actuels de 8,1 %. De plus, la contribution de 16 % - due lorsque les entreprises ont choisi d’acquitter des prélèvements sociaux lors du versement des rentes - s’appliquerait dès le premier euro, et non plus pour le montant de la rente dépassant 1.000 euros par mois. « Cette mesure est surtout symbolique, les retraites chapeaux inférieures à ce montant étant peu fréquentes »,tempère cependant Guillaume Bordier, avocat associé chez Capstan et membre de Capital Ingenium. « L’impact serait d’autant moins important que les retraites chapeaux concernent essentiellement les grands groupes et ont tendance à disparaître progressivement au profit de régimes à cotisations définies », précise-t-il.

Plus forte imposition des actions.

Enfin, le gouvernement entend faire participer davantage les revenus du capital au financement des retraites. Il a donc annoncé son intention de majorer d’un point les prélèvements forfaitaires libératoires (PFL) sur les revenus du capital et du patrimoine.

Ainsi, les PFL seraient portés de 16 % à 17 % pour les plus-values de cessions immobilières, et de 18 à 19 % pour les dividendes et les plus-values de cessions mobilières, ces nouvelles impositions n’étant pas prises en compte dans le calcul du droit à restitution au titre du bouclier fiscal.

Par ailleurs, le gouvernement souhaite supprimer le seuil de cession en-dessous duquel les plus-values sur actions et obligations ne sont pas imposées à l’IR (25.830 euros en 2010). L’idée est donc assujettir ces plus-values à l’impôt dès le premier euro de cession, comme cela est déjà le cas depuis cette année pour les prélèvements sociaux.

Enfin, le crédit d’impôt de 50 % du montant des dividendes perçus, plafonné à 115 ou 230 euros selon la situation matrimoniale, serait également supprimé.

Débat à la rentrée.

Le projet de loi définitif sera présenté le 13 juillet en Conseil des ministres avant d’arriver au Parlement en septembre. Ce dernier se penchera ensuite sur les niches fiscales et sociales dans le cadre de l’examen des projets de lois de Finance et de Financement de la Sécurité sociale. La fiscalité de l’assurance vie, qui semble avoir été pour l’instant épargnée, pourrait alors à son tour faire l’objet d’une remise en question.

(1) L’Agefi Actifsn°423, p. 6.