Les retraites s’orientent vers un régime universel très lisible

Le haut-commissaire à la réforme des retraites Jean-Paul Delevoye a remis hier des propositions sans surprises majeures.

L'Agefi Quotidien. Le nouveau système universel de retraites remplacera 42 régimes existants et prendra effet au 1er janvier 2025. Après avoir présenté ses propositions aux partenaires sociaux, le haut-commissaire à la réforme des retraites Jean-Paul Delevoye a remis hier matin au Premier ministre son rapport pour la mise en place d’un système universel en remplacement des 42 régimes existants. Tous les salariés seront donc couverts par un même système, financé par répartition et ouvrant des droits sur la totalité de la rémunération (dans la limite de trois plafonds de la Sécurité sociale, soit jusqu’à 120.000 euros par an), avec un compte unique et un taux de cotisation identique de 28,12%, partagé entre l’employeur (60%) et le salarié (40%) - un système spécial permettrait aux indépendants de rattraper le retard actuel. Sur ce taux de cotisation commun, une part «déplafonnée» de 2,81% participera au financement de la solidarité, sans créer de droits, «comme c’est déjà souvent le cas via les régimes de base ou additionnels actuels», a rappelé Jean-Paul Delevoye.

Solidarités

Le système s’appuiera sur un régime par points, comparable aux retraites complémentaires actuelles, où un euro cotisé vaudra les mêmes droits pour tous, quels que soient le statut ou la période. Selon le dossier de presse, 10 euros cotisés donneraient droit à un point d’une valeur de 0,55 euro pour une retraite à taux plein : par exemple, un salarié ayant acquis 30.000 points pourrait alors percevoir 16.500 euros de retraite par an à partir de l’âge d’équilibre du système, a priori 64 ans. Hors carrières longues (ou pénibles) et militaires, les assurés auront la liberté de partir en retraite dès 62 ans, conformément à la promesse présidentielle, mais avec une décote 5% par année non complétée, ou inversement avec une surcote de 5% pour les deux années suivant l’âge pivot. Ceux qui n’ont pas été en capacité de faire une carrière complète ne seront pas pénalisés comme dans le système actuel qui les contraint à travailler jusqu’à 67 ans : «Contrairement aux idées reçues, ce sont souvent les salariés aux revenus plus modestes, et particulièrement les femmes, qui travaillent aujourd’hui jusqu’à cet âge pour annuler la décote», a précisé Jean-Paul Delevoye.

Le système prévoit des points de solidarité pour les périodes de chômage indemnisé, maternité, invalidité et maladie. Pour les femmes, il est proposé une majoration des points de 5% pour chaque enfant. Un dispositif de réversion unique verrait le jour pour les nouveaux retraités, à la place des 13 règles actuelles, en vue de garantir au conjoint survivant 70% du total des retraites perçues par le couple. Enfin, le minimum vieillesse s’élèvera à 85% du Smic net, contre 81% pour les salariés dans le système actuel et 75% pour les agriculteurs.

Ce système universel, qui se veut «redistributif» et «mieux adapté aux évolutions du monde du travail», améliorerait la situation des 40% d’assurés ayant les retraites les plus faibles et lisserait les effets de carrières «en dents de scie» puisque la valeur du point ne pourra pas baisser dans le temps, sa revalorisation tenant a priori compte de l’évolution des salaires moyens en France avant la retraite, de l’inflation après.

Transitions

Un Fonds de réserve universel (FRU) permettra de garantir l’équilibre du système et la valeur du point. Sachant que le nouveau système s’appliquerait aux personnes nées à partir de 1963, tout en garantissant 100% des droits acquis au 1er janvier 2025, comptabilisés selon les règles des anciens régimes avant d’être transformés en points à l’euro près, pendant une période de transition qui pourrait durer quinze ans après cette date. D’autres options sont possibles et seront soumises à concertation avec les parties prenantes pour tout ce qui concerne cette transition et la convergence des régimes. Le nouveau système devra respecter une règle d’or d’équilibre par périodes de cinq ans et dès le départ; le projet de loi devra être enrichi pour proposer, en concertation avec les partenaires sociaux, les modalités de convergence vers cet équilibre financier, «donc des solutions aux déséquilibres actuels», a observé Jean-Paul Delevoye.

Une caisse nationale de retraite universelle (CNRU) sera créée pour la mise en place et la gestion opérationnelle du système, avec un conseil d’administration paritaire. Le cadre de pilotage du système, auquel sera associé un Conseil citoyen chaque année et en parallèle d’un Comité d’expertise indépendant, sera défini dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Une deuxième étape, en vue de rédiger le projet de loi, commencera dans une semaine après que le Premier ministre aura reçu les partenaires sociaux, et pourrait durer jusqu’à cet hiver, si nécessaire, avant le lancement du débat parlementaire.