
Les hauts revenus et les revenus du capital vont être sollicités

Le rendez-vous 2010 sur la réforme des retraites commence à prendre forme. Un mois après le début des entretiens avec les principaux partis politiques et les partenaires sociaux, Eric Woerth, ministre du Travail, de la Solidarité et de la Fonction publique, a dévoilé le 16 mai dernier le document d’orientation du gouvernement sur le sujet (1).
Pérenniser le système par répartition… Comportant quatorze engagements, ce document précise d’emblée, et sans surprise, la volonté du gouvernement de maintenir la répartition au cœur du système de retraite français et de ne pas passer à un système fondé sur la capitalisation. En revanche, le gouvernement n’écarte pas la piste d’une réforme systémique du mode de calcul des droits (régimes par points ou en comptes notionnels, toujours dans le cadre de la répartition) à long terme même si, comme l’a montré le rapport du Conseil d’orientation des retraites de janvier 2010, un tel changement n’apporterait pas en lui-même de réponse aux déséquilibres financiers des régimes (2).
« Une réforme systémique pose de nombreux problèmes, notamment techniques, nécessitant au moins une dizaine d’années de chantier », explique ainsi Pierre Péchery, directeur général de France Retraite. « A court et moyen terme, il serait donc nécessaire de combiner une telle réforme avec une modification des paramètres de calculs de la réglementation actuelle »,poursuit-il.
… par une augmentation de la durée d’activité. Parmi ces paramètres, le gouvernement entend jouer prioritairement sur la durée d’activité, qui peut être augmentée en agissant sur deux leviers.
Le premier est l’augmentation de la durée de cotisation pour bénéficier d’une retraite à taux plein. Cette durée est actuellement de 162 trimestres pour les personnes nées en 1950 et doit progressivement passer à 164 trimestres en 2012.
Le second est l’augmentation de l’âge d’ouverture des droits à retraite, aujourd’hui fixé à 60 ans, sauf exceptions. Sur ces points, la dernière enquête du Cercle des Epargnants réalisée par le Cecop révèle que 64 % des Français considèrent nécessaire le report de l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans et 57 %, un allongement à 43,5 ans de la durée de cotisation (3). Le gouvernement précisera la solution retenue au mois de juin.
En revanche, celui-ci rejette formellement les principes d’une hausse des cotisations, et surtout d’une diminution des pensions, conforté sur ce point par l’étude du Cercle des Epargnants puisque 54 % des personnes interrogées rejettent toute baisse des pensions. « Pourtant, un conflit intergénérationnel pourrait naître si la croissance ne fait pas son retour à court ou moyen terme et que le pouvoir d’achat des actifs se dégrade par rapport à celui des retraités », prévient Pierre Péchery.
Développer l’épargne retraite. Si le gouvernement n’entend pas remettre en cause l’équilibre actuel entre la répartition et la capitalisation, il souhaite proposer « des mesures permettant à davantage de Français de compléter leurs pensions de retraite en recourant à des dispositifs d’épargne retraite ». Un point sur lequel les députés de la majorité semblent en accord.Dans un rapport d’étape sur la réforme des retraites, le groupe de travail des députés UMP et Nouveau Centre a notamment proposé de généraliser la mise en place du Plan d’épargne retraite collectif (Perco) et d’instaurer son alimentation automatique par une partie de la participation et de l’intéressement.
Mais dans le même temps, de nombreux parlementaires de la majorité souhaitent poursuivre massivement la réduction des niches fiscales et sociales. La Commission des affaires sociales du Sénat a notamment adopté, le 20 mai dernier, un rapport préconisant l’augmentation du forfait social de 4 à 10 % et l’élargissement de son assiette, la hausse de la taxation des stock-options, des actions gratuites, mais aussi des indemnités de rupture et des régimes des retraites chapeau. Les sénateurs souhaiteraient également aligner la contribution sociale généralisée (CSG) des retraités imposables sur celle des actifs.
Par ailleurs, le gouvernement a annoncé la création d’une contribution supplémentaire sur les hauts revenus et les revenus du capital, contribution qui ne donnera pas droit à restitution au titre du bouclier fiscal.
Améliorer l’information. Enfin,le gouvernement souhaite améliorer l’information en matière de retraite, notamment par la mise en place d’un « point d’étape retraite » à 45 ans « permettant aux assurés de disposer d’un examen de leurs droits à retraite et d’un conseil sur l’ensemble des instruments dont ils peuvent disposer pour améliorer leur future pension de retraite ». Une mesure qui ne sera pas superflue, à en croire le Cercle des Epargnants dont la dernière étude montre que 77 % des assurés se déclarent mal informés alors que seulement 23 % ont une vision claire sur leur future retraite. (1) Document disponible à l’adresse www.retraites2010.fr
(2) Septième rapport du Conseil d’orientation des retraites du 27 janvier 2010.
(3) Enquête 2010 Centre d'études et de connaissance sur l'opinion publique (Cecop) / CSA « Les Français et la retraite » pour le Cercle des Epargnants, disponible à l’adresse www.cercledesepargnants.fr