Le rachat de parts par la société en cas de départ à la retraite de son dirigeant

Mon client, personne physique, est dirigeant et associé d’une société soumise à l’IS, et souhaite partir à la retraite. A ce titre, la société va lui racheter ses parts pour les annuler. Bénéficie t-il d’un avantage fiscal concernant la plus-value dégagée?.

Lorsque la société rachète les titres, pour les annuler, de son dirigeant qui part à la retraite, ce dernier peut réaliser une plus-value, qui sera alors taxable à l’impôt sur le revenu. Il peut cependant bénéficier, sous certaines conditions, d’un abattement pour durée de détention.

MOYEN DE REPONSE

En cas de rachat par une société de ses propres titres à son dirigeant qui part à la retraite, une plus-value peut être dégagée ou un revenu distribué. Comment sont-ils calculés et quelle est leur fiscalité?

· Calcul de la plus-value

Le montant du revenu distribué soumis à l’impôt est égal à la différence entre le montant du remboursement des droits sociaux annulés et le montant des apports compris dans les titres rachetés.

o Cas de l’associé ayant reçu des parts en contrepartie d’un apport

L’imposition porte sur la différence entre le montant du remboursement des droits sociaux et le montant des apports qui avaient été effectués.

Exemple: l’associé a procédé à un apport de 100; il reçoit alors 100 titres.

La société rachète ses 100 titres pour 150.

La plus-value imposable ayant le caractère de revenu distribué est donc de 150 – 100 = 50

o Cas de l’associé ayant acquis les parts

1/Lorsque l’associé a acquis les parts au cours de la vie de la société pour un prix supérieur au montant des apports, alors le revenu distribué est égal à la différence entre le montant du rachat des parts par la société et leur prix d’acquisition.

Exemple: l’associé a acquis 100 titres pour 120.

La société rachète ses 100 titres pour 150.

La plus-value imposable ayant le caractère de revenu distribué est donc de 150 – 120 = 30

2/Lorsque l’associé a acquis les parts au cours de la vie de la société pour un prix inférieur au montant des apports, alors le résultat net imposable est égal à la différence entre le montant du rachat des parts par la société et leur prix d’acquisition[1], déduction faite du montant du revenu distribué imposable (CGI, art. 150-0 8 ter). En effet, on prend en compte le montant des apports compris dans les titres rachetés.

Exemple: l’associé a acquis 100 titres pour 80; à l’origine, les apports correspondant à ces titres s’élevaient à 100.

La société rachète ses 100 titres pour 150.

La plus-value ayant le caractère de revenu distribué est donc de 150 – 100 = 50

La plus-value imposable est donc de (150 – 80) – 50 = 20

· Imposition de la plus-value

1/Les gains nets retirés des cessions à titre onéreux de titres sont soumis à l'impôt sur le revenu (taxation proportionnelle des plus-values sur valeurs mobilières et droits sociaux – CGI, art. 150-0 A) lorsque le montant de ces cessions excède, par foyer fiscal, 25730€ pour l'imposition des revenus de l'année 2009 et 25830€ pour l'imposition des revenus de l'année 2010[2]. La taxation est alors de 18%, auxquels s’ajoutent les prélèvements sociaux de 12,1%.

2/Par ailleurs, et d’une façon générale, en vertu de l’article 150-0 D bis, la plus-value est réduite d'un abattement d'un tiers pour chaque année de détention au-delà de la 5ème, lorsque la société exerce une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière (à l’exclusion donc de la gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier, ou si elle a pour objet social exclusif la détention de participations dans des sociétés exerçant les activités précitées); cette condition s'apprécie de manière continue pendant les cinq années précédant la cession.

La durée de détention est décomptée à partir du 1er janvier de l'année d'acquisition des titres, mais qu’à partir du 1er janvier 2006. Donc concrètement il faut attendre le 1erjanvier 2011 pour pouvoir commencer à appliquer cet abattement.

Par exception, le point de départ du délai de détention n’est pas limité au 1er janvier 2006 si les conditions suivantes sont réunies[3]:

1° La cession porte sur l'intégralité des actions, parts ou droits détenus par le cédant dans la société dont les titres ou droits sont cédés ou sur plus de 50 % des droits de vote ou, en cas de la seule détention de l'usufruit, sur plus de 50 % des droits dans les bénéfices sociaux de cette société ;

2° Le cédant doit :

a/Avoir exercé au sein de la société dont les titres ou droits sont cédés, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession la fonction soit de gérant nommé conformément aux statuts d'une société à responsabilité limitée ou en commandite par actions, soit d’associé en nom d'une société de personnes, soit de président, de directeur général, de président du conseil de surveillance ou de membre du directoire d'une société par actions.

Les fonctions énumérées ci-dessus doivent avoir été effectivement exercées et avoir donné lieu à une rémunération normale. Celle-ci doit représenter plus de la moitié des revenus à raison desquels l'intéressé est soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux, revenus des gérants et associés mentionnés à l'article 62 du CGI.

b/Avoir détenu directement ou par personne interposée ou par l'intermédiaire de son conjoint ou de leurs ascendants ou descendants ou de leurs frères et sœurs, de manière continue pendant les cinq années précédant la cession, au moins 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société dont les titres ou droits sont cédés ;

c/Cesser toute fonction dans la société dont les titres ou droits sont cédés et faire valoir ses droits à la retraite dans les deux années suivant ou précédant la cession ;

3° La société dont les titres ou droits sont cédés doit également répondre aux conditions suivantes :

a/Elle emploie moins de deux cent cinquante salariés au 31 décembre de l'année précédant celle de la cession ou, à défaut, au 31 décembre de la deuxième ou de la troisième année précédant celle de la cession ;

b/Elle a réalisé un chiffre d'affaires annuel inférieur à 50 millions d'euros au cours du dernier exercice clos ou a un total de bilan inférieur à 43 millions d'euros à la clôture du dernier exercice ;

c/Son capital ou ses droits de vote ne sont pas détenus à hauteur de 25 % ou plus par une entreprise ou par plusieurs entreprises ne répondant pas aux conditions des a et b, de manière continue au cours du dernier exercice clos.

4° En cas de cession des titres ou droits à une entreprise, le cédant ne doit pas détenir, directement ou indirectement, de droits de vote ou de droits dans les bénéfices sociaux de l'entreprise cessionnaire.

àConcrètement, sous ces conditions, les dirigeants de PME qui cèdent leurs titres pour partir à la retraite peuvent bénéficier dès aujourd’hui de l’abattement pour durée de détention, que l’entrée des parts dans leur patrimoine soit ou non postérieure au 1er janvier 2006.

Cet avantage s’applique également en cas de rachat par la société de ses propres titres en vue d’une réduction de capital (mais cette réduction de capital ne doit pas être motivée par des pertes), pour la seule part du rachat imposable dans les conditions de l’article 150-0 A II-6 du CGI (gain net de rachat).

En revanche, le boni de rachat imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ne bénéficie pas de l’abattement pour durée de détention (BOI 5 C-I07 §22). Donc un dirigeant qui part à la retraite dans le cadre du rachat de ses titres par la société ne bénéficie pas de l’abattement pour durée de détention si la plus-value réalisée correspond dans sa totalité à un revenu mobilier.

REFERENCES

- CGI, art. 150-0 8 ter

- CGI, art. 150-0 A

- CGI, art. 150-0 D bis

- CGI, art. 150-0 D ter

- BOI 5 C-I-07 §22


[1] Remarque: s’il ne s’agit pas d’une acquisition, mais d’une donation, on prend en compte le montant stipulé à l’acte. Il en va de même en cas de succession.

[2] CGI, art. 150-0 A I-1: «Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices non commerciaux et aux bénéfices agricoles ainsi que des articles 150 UB et 150 UC, les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement, par personne interposée ou par l'intermédiaire d'une fiducie, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au 1° de l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, de droits portant sur ces valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, sont soumis à l'impôt sur le revenu lorsque le montant de ces cessions excède, par foyer fiscal, 25 730 € pour l'imposition des revenus de l'année 2009 et 25 830 € pour l'imposition des revenus de l'année 2010. Pour l'imposition des revenus des années ultérieures, ce seuil, arrondi à la dizaine d'euros la plus proche, est actualisé chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu de l'année précédant celle de la cession et sur la base du seuil retenu au titre de cette année.»

[3] CGI, art. 150-0 D ter