
L’assureur désigné est débouté de sa demande de régularisation d’adhésion

Le dossier du régime de remboursements des frais de santé des boulangers n’en finit plus d’alimenter la jurisprudence. Le tout récent arrêt de la Cour d’appel de Chambéry en date du 7 janvier 2014 vient y apporter sa contribution.
Un contentieux classique. En l’espèce une entreprise de boulangerie refuse d’adhérer au régime de remboursement complémentaire obligatoire assuré par AG2R prévoyance, organisme désigné par l’avenant à la convention collective nationale du secteur du 24 avril 2006 et lui-même étendu par arrêté du 16 octobre 2006, applicable à compter du 1er janvier 2007. Elle soutient qu'elle a contracté auprès d’un autre assureur une complémentaire santé offrant des garanties supérieures à celles proposées par AG2R et à un coût inférieur.
Le 13 juillet 2012, le tribunal de grande instance au visa de l’article L.912- 1 du Code de la Sécurité sociale (CSS) condamne sous astreinte l’entreprise à régulariser son adhésion. La société interjette appel le 6 novembre.
En appel, la cour considère que le jugement du TGI est conforme au droit et que c’est à tort que la société n'a pas adhéré à tort à l'organisme désigné. Elle appuie notamment son argumentation sur l’arrêt du 3 mars de la Cour de justice de l'Union européenne (AG2R Prévoyance contre Beaudout Père et fils SARL).
L’organisme assureur est débouté... Toutefois, et les dates ont ici leur importance, la cour relève le 13 juin 2013 le Conseil constitutionnel a déclaré l'article L 912-1 du CSS contraire à la constitution et que cette décision est entrée en vigueur le 16 juin 2013. Elle rappelle aussi que cette déclaration d'inconstitutionnalité n'est pas applicable aux contrats pris sur le fondement dudit article et liant les entreprises aux organismes assureurs.
Mais en l'espèce, la cour retient que l’entreprise de boulangerie n'a pas conclu de contrat sur la base de l'avenant à la convention collective et que le jugement du TGI n'a pas, de son côté, prononcé d'exécution provisoire.
Pour la cour, l’entreprise avait l'obligation de contracter et elle aurait dû payer les cotisations correspondant à la couverture que l’assureur avait l'obligation de lui assurer.
…du fait d’une décision constitutionnelle. Dans l’affaire en cours, la société AG2R a comparu sans conclure. Les juges retiennent alors que la cour n'est saisie que du bien fondé de la décision d'imposer à l’entreprise de boulangerie de régulariser son adhésion. Ils poursuivent en précisant qu’au regard de la décision du Conseil constitutionnel du 13 juin 2013 et de l'absence de contrat existant à cette date entre AG2R et l’entreprise, ils ne peuvent que décider de réformer le jugement.
La cour d’appel déboute ainsi l’assureur de sa demande de régularisation d'adhésion de l’entreprise de boulangerie et considère par ailleurs que la solution du litige, imposée par une décision constitutionnelle intervenue pendant le cours de la procédure d'appel, amène chaque partie à conserver la charge de ses dépens tant de première instance que d'appel.
Cour d’appel de Chambéry, chambre civile - première section, arrêt du 7 Janvier 2014, RG : 12/02382.