
La Cour de cassation annule une saisie d’avoirs gelés

Le sujet est brûlant, même s’il concerne le gel des avoirs. La Cour de cassation a rendu, mercredi, une décision en faveur du fonds d’investissement libyen (Libyan Investment Authority, LIA) annulant des saisies effectuées à son encontre en France par un groupe koweïtien, pour environ un milliard d’euros. Celles-ci avaient été demandées à la suite d’une sentence arbitrale ayant eu lieu au Caire en 2013 concernant un projet de construction immobilière abandonné. Problème, ces biens saisis en France, comprenant l’immeuble de la Fnac des Ternes dans le 17e arrondissement de Paris, étaient, dans le même temps, gelés par une décision européenne.
Dans son arrêt, la Cour de cassation a rappelé que, en application du droit européen, des avoirs gelés dans le cadre de décisions internationales ne peuvent être ni transférés ni saisis. Elle a annulé les décisions des cours d’appel n’allant pas dans ce sens, sans possibilité de renvoi. Ce jugement vient clore une saga qui a mis la justice française dans l’embarras. En 2019, les cours d’appel de Versailles et de Paris, qui statuaient toutes les deux sur un volet de l’affaire, avaient rendu des décisions contradictoires.
Des questions en suspens
La Cour s’appuie notamment, dans sa décision, sur un arrêt de principe de la Cour de justice européenne de novembre 2021 interdisant les saisies sur avoirs gelés. «La Cour de cassation renforce vigoureusement la protection des actifs gelés et l’efficacité des réglementations européenne et internationale», déclare dans un communiqué Jean-Sébastien Bazille, conseil du LIA.
Mais en statuant sur le gel, la Cour de cassation n’a pas abordé les autres points que l’avocat avait soulevés lors du pourvoi. Le LIA est-il une émanation de l’Etat libyen ? Dans ce cas, pourrait-il bénéficier de l’immunité d’exécution propre aux Etats ? Les questions restent entières.
Si l’origine de cette affaire remonte à plus de dix ans, la décision pourrait avoir des répercussions dans d’autres dossiers, bien plus récents. Les avoirs gelés d’oligarques russes après le déclenchement de la guerre en Ukraine pourraient répondre à la même logique et ne devraient donc pas être saisis de quelque manière que ce soit. «Il n’y a pas de raison que la même solution ne prévale pas pour les avoirs russes gelés», confirme un avocat.