France

Une reprise économique porteuse d'espoir

Les signaux macroéconomiques pour la France apparaissent positifs, dans un environnement propice à la croissance
Les économistes restent cependant mesurés sur les perspectives du pays, même si de bonnes surprises ne sont pas à exclure
DR, La progression du produit intérieur brut pourrait atteindre un niveau de 1,3 % en 2017 et autour de 1,5 % en 2018.

Cela n’est pas encore flagrant mais les premiers signes d’amélioration de l’économie française se confirment. Le pays est en effet aujourd’hui dans une phase d’accélération, même si elle reste mesurée. En 2015 et 2016, la croissance est restée stable, aux environs de 1 %, mais, selon plusieurs économistes, la dynamique vertueuse enclenchée en 2017 devrait prendre un peu d’ampleur. La progression du PIB pourrait atteindre un niveau de 1,3 % en 2017 et autour de 1,5 % en 2018. Certes, cela reste inférieur à ce qui est attendu dans la zone euro dans son ensemble, pour laquelle la croissance est attendue à 1,7 % ou 1,8 % pour 2017, mais, comme l’explique  Laurent Clavel, économiste chez Axa IM, « l’économie française est une des plus acycliques de la région, voire des économies avancées. L’activité baisse moins que dans d’autres pays en temps de crise mais elle rebondit aussi plus lentement ».

Les interrogations sur la France tiennent surtout au fait qu’en 2015 et 2016, le pays a bénéficié d’une conjonction de facteurs favorables avec un pétrole bas, des taux bas et un dollar haut et pourtant, l’économie française est apparue décevante. « Ces facteurs auraient pu procurer une croissance plus élevée que ce qui a été finalement observé », estime Ludovic Martin, économiste au département des études économiques du groupe Crédit Agricole.

Aujourd’hui, des signaux indiquent cependant une accélération. Le climat des affaires a d’ailleurs rebondi fin 2016 et début 2017 et la confiance des ménages a retrouvé sa moyenne de long terme.

Croissance autoentretenue.

Si certains économistes adoptent une vision plutôt optimiste de l’activité dans les prochains mois, c’est parce que la croissance française apparaît aujourd’hui autoentretenue. L’accélération de l’activité, quoique modeste, est accompagnée d’une reprise de l’emploi et de la confirmation du redémarrage de l’investissement, après une amélioration en 2016. « Cette tendance devrait continuer en 2017 et 2018. Les comptes de résultat des entreprises se sont améliorés et cela devrait se traduire par une reprise des investissements un peu plus soutenue, d’autant que le taux d’utilisation des capacités productives se révèle élevé », anticipe Ludovic Martin. Par ailleurs, certains secteurs sont en cours de redressement comme celui de la construction, qui montre des signes de reprise alors que jusqu’en 2015, il contribuait négativement à la croissance.

Les exportations sont aussi attendues en hausse du fait d’un rattrapage de l’année 2016, mais aussi parce que l’environnement international affiche des perspectives positives. « En 2017, pour la première fois depuis 2010, toutes les grandes zones géographiques affichent des perspectives de croissance attendues en amélioration, et ce de manière synchrone. Cela confère une certaine solidité aux signaux positifs que nous observons dans les enquêtes de confiance disponibles partout dans le monde », constate Hélène Baudchon, économiste chez BNP Paribas.

Freins.

Malgré cette conjonction d’éléments positifs pour l’économie française, certains économistes avancent tout de même que la remontée attendue de l’inflation pourrait diminuer le pouvoir d’achat des ménages, dans un environnement où le taux de chômage reste très élevé. Or, la consommation des particuliers s’avère très corrélée à leur pouvoir d’achat. « Pour les années à venir, la consommation restera le moteur de la croissance mais ralentira un peu à cause de ce retour de l’inflation, essentiellement technique car liée à l’énergie », précise Ludovic Martin. Cette légère hausse des prix pourrait être sans conséquence dans une économie très dynamique, mais ce n’est pas le cas. « Si le taux de chômage était moins élevé et orienté à la baisse plus nettement depuis plus longtemps, cette moindre progression du pouvoir d’achat serait absorbée par une baisse du taux d’épargne, mais nous ne sommes pas dans un contexte aussi favorable, même s’il est en voie d’amélioration et si le moral des ménages n’a pas été aussi élevé depuis 2007 », considère Hélène Baudchon. Ainsi, la consommation, composante la plus importante pour la croissance pour 2017, est attendue à des niveaux un peu plus faibles qu’en 2016.

Problèmes structurels.

Cette faible croissance est-elle suffisante pour que la situation s’améliore sur le plan de l’emploi ? Bien que la croissance réelle en France ait été d’environ 1 % en 2016, la progression de l’emploi a été du même ordre alors que les économistes estiment généralement que pour créer des emplois, la croissance doit être au minimum de 1,5 %. Il y a donc eu un enrichissement du contenu en emploi de la croissance. « Cela est principalement lié aux mesures prises pour alléger le coût du travail, estime Hélène Baudchon. A court terme, cette reprise de l’emploi est un élément déterminant de consolidation des bases de la croissance et lui confère son caractère autoentretenu. Mais à plus long terme, un emploi qui progresse aussi vite que la croissance signifie un écrasement des gains de productivité. C’est problématique car les gains de productivité sont un élément essentiel de la dynamique de la croissance potentielle en favorisant notamment une montée en gamme des produits et des services. »

Il reste donc à la France de nombreux problèmes structurels à régler. Des signes d’amélioration apparaissent aujourd’hui mais « leur ampleur reste limitée par rapport celle du déséquilibre à résorber », constate Hélène Baudchon. Le déficit budgétaire français est encore élevé, le chômage est toujours un chômage de masse et la dette publique n’a pas commencé à baisser, alors que dans certains pays de la zone euro l’inflexion est engagée. Selon certains économistes, le chemin est encore long avant que le pays n’ait réglé ses problèmes. « Les réformes structurelles, si elles ont lieu, n’auront pas de conséquence avant 2018, voire 2019 », estime ainsi Laurent Clavel.

Risques.

Hormis ces difficultés internes, des risques externes pourraient perturber la reprise française. Il peut s’agir d’abord d’une sortie mal contrôlée de la Banque centrale européenne du quantitative easing, même si de l’avis de nombreux économistes, ce risque reste faible. Ensuite, le danger pourrait venir non pas de l’Europe, mais des Etats-Unis, avec une déception sur l’économie américaine. « Sans stimulus budgétaire ou des mesures de dérégulation financière sur des secteurs qui recèlent du potentiel de croissance, comme le marché hypothécaire des ménages ou les conditions de crédit des entreprises, le cycle de l’économie américaine arrivera à maturité mi-2018. Même si nous n’attendons pas une récession, le ralentissement pourrait être fort », analyse Laurent Clavel, économiste chez Axa IM. La zone euro pourrait avoir du mal à encaisser un tel choc alors qu’elle se trouvera encore au début de sa reprise.

Choc de confiance.

Finalement, ce cycle économique ne ressemble à aucun autre. « Depuis mi-2013, un nouveau mouvement de reprise est enclenché, mais il reste laborieux. Nous ne sommes pas dans un mouvement de reprise habituel avec une accélération vigoureuse de la croissance sur un rythme bien supérieur à celui de la croissance potentielle », estime Hélène Baudchon.

Il pourrait néanmoins y avoir un choc de confiance. Le pays est susceptible de réussir dans tous les nouveaux secteurs d’activité qui se dessinent, comme le développement durable, les énergies renouvelables, l’infrastructure, la santé, le numérique ou encore l’économie autour des seniors.

« Toute chose égale par ailleurs, la France pourrait arriver à une croissance de 2 % sans faire d’hypothèse particulièrement optimiste », conclut un économiste. Une bonne surprise n’est donc pas à exclure.