Ostrum dévoile les grands axes de sa fusion avec LBPAM

Par Amélie Laurin et Réjane Reibaud
Le projet de mariage été présenté jeudi aux élus du personnel d’Ostrum, et vendredi matin à ceux de LBPAM.

Huit mois après son annonce, le rapprochement d’Ostrum AM, la principale société de gestion de Natixis, avec La Banque Postale Asset Management (LBPAM) commence à prendre forme. Le projet de mariage a été présenté jeudi aux élus du personnel d’Ostrum, et ce vendredi matin à ceux de LBPAM.

« Les conseils d’administration ont été instruits. Nous entamons maintenant l’information- consultation des élus du personnel, qui va durer deux mois », dévoile à L’Agefi et à NewsManagers (groupe Agefi) Philippe Setbon, le nouveau directeur général d’Ostrum. « Le deal devrait être signé en juin et la clôture de l’opération est prévue en octobre ». Soit peu de temps avant l’annonce du nouveau plan stratégique de Natixis, prévue en fin d’année.

Comme annoncé, la fusion aura lieu au sein d’Ostrum, Natixis IM en détenant à terme 55% et La Banque Postale AM 45%. Philippe Setbon, actuel directeur général d’Ostrum Asset Management, dirigera l’entité commune. Emmanuelle Mourey, actuellement présidente du directoire de LBPAM, en assurera la direction générale déléguée.

Les deux asset managers envisagent de mettre en commun leurs activités de gestion au sens large. « Le projet concerne l’investissement et les services technologiques et opérationnels associés, pour constituer un acteur ayant vocation à cibler la clientèle institutionnelle ayant des contraintes de passif, c’est-à-dire les assureurs, mais aussi les fonds de pension et certaines entreprises », explique Philippe Setbon. En clair, les gestions majoritairement obligataires, touchées par le niveau durablement bas des taux d’intérêt de la zone euro. Le principal client du futur ensemble sera CNP Assurances, suivi de Natixis Assurances. Tous deux sont les partenaires historiques de La Banque Postale et BPCE (la maison-mère de Natixis) dans l’assurance vie.
Détourage d’activité

Les deux groupes bancaires ne regrouperont pas tous les actifs de leurs deux principales filiales de gestion d’actifs. Le projet porte sur 445 milliards d’euros d’encours, en données proforma au 30 juin 2019, sachant qu’Ostrum et LBPAM pesaient au total 509 milliards d’euros au 31 décembre. A cette date, le premier gérait 274 milliards, le second 235 milliards.

Les deux maisons vont donc procéder au détourage de leur périmètre actuel. « Le futur Ostrum n’inclurait pas nos expertises dans les actions non-assurantielles, les actions thématiques ou les actifs réels qui seraient confiées à d’autres affiliés de Natixis Investment Managers (la holding faîtière des activités de gestion d’actifs de Natixis, ndlr) », précise Philippe Setbon. « Cela représenterait environ 11 milliards d’encours et une cinquantaine de personnes, principalement en front office ». Les boutiques du groupe qui accueilleraient ces activités seraient des affiliés européens de NIM, sachant que les plus connus sont DNCA, Mirova ou encore H2O.

De son côté, LBPAM devrait conserver plusieurs dizaines de milliards d’actifs sous gestion et recourrait à Ostrum comme prestataire de service pour les encours apportés. La Banque Postale ne souhaite pas en dire plus pour le moment, réservant ses annonces à la présentation de ses résultats annuels, lundi matin.

Au sein du futur Ostrum, les équipes seraient regroupées « le plus tôt possible dans les locaux actuels d’Ostrum, pour faciliter l’intégration », explique Philippe Setbon. Si un plan de départs volontaires ou une rupture conventionnelle collective n'est pas à exclure, le dirigeant veut rassurer. « Il n’y aurait pas de départs contraints », déclare-t-il.

Sur les 445 milliards d’euros d’encours concernés par la fusion, 360 milliards d'euros sont gérés pour le compte de compagnies d’assurance (CNP…). Ils sont essentiellement composés de produits de taux et de crédit, et de plus 20 milliards d'actions. De quoi permettre à l'entité de figurer parmi les 10 premiers acteurs de la gestion assurantielle en Europe, « mais l’ambition est de devenir un leader », assure Philippe Setbon. Le reste des encours couvrira « des produits diversifiés et monétaires et des fonds ouverts d’Ostrum AM et de LBPAM qui seraient en partie fusionnés, avec l’ambition de labelliser ISR (investissement socialement responsable, ndlr) la gamme cible ».
Hausse du coefficient d’exploitation

Les synergies de coûts sont encore en discussions. « Elles porteraient en majorité sur les charges informatiques et externes, détaille le dirigeant. Nous conserverions le système d’information propriétaire d’Ostrum, enrichi d’applications et de fonctionnalités apportées par LBPAM, notamment dans le suivi et l’aide à la décision d’investissement ». Chacune des deux entités serait rentable après découpage et après la fusion, mais la profitabilité devrait mécaniquement se dégrader, dans un premier temps. « Compte tenu du détourage de classes d’actifs aux frais de gestion plus élevés que les produits de taux, le coefficient d’exploitation (ratio des coûts sur revenus, ndlr) de la société commune serait supérieur à 80%, contre près de 70% aujourd’hui chez Ostrum et moins de 70% pour LBPAM », détaille Philippe Setbon. « Nous abaisserons progressivement ce ratio pour revenir vers un niveau compatible avec notre offre et notre cible de clientèle ».

Pour améliorer sa compétitivité, la société commune espère gagner de grands appels d’offre en Europe, voire intégrer l’expertise de certains concurrents. « Nous aurons vocation à participer à la consolidation du marché européen de la gestion d’actifs, qui évolue à vitesse grand V sous l’effet des contraintes réglementaires, de l’évolution des systèmes d’information et de l’adaptation des stratégies d’investissement », pointe le patron d’Ostrum. A condition que le chantier de rapprochement ne mobilise pas toutes les énergies jusqu’à sa finalisation, courant ou fin 2021.

A moyen terme, les actionnaires envisagent-t-ils de mettre en Bourse l’activité, à l'image de ce qu'a fait le Crédit Agricole avec Amundi ou Deutsche Bank avec DWS ? Philippe Setbon déclare que « le sujet d’une introduction en Bourse n’est pas sur la table ».

Reste à savoir quel nom portera la nouvelle entité, alors que la marque Ostrum est encore très récente et dissociée du nom de ses deux futurs actionnaires. A ce stade, la question « n'a pas encore été finalisée », indique Philippe Setbon.