Les foncières cotées en eaux troubles

Gaetan Pierret
Sofidy Sélection 1 a connu une année 2022 chahutée.
(Adobe stock)

L'année 2023 marquera-t-elle le retour en eaux plus calmes des foncières cotées ? Sur l’ensemble de 2022, elles ont dévissé de 32,6 %. Une évolution « strictement fonction de l’évolution des taux d’intérêt », selon Laurent Saint Aubin, directeur de la gestion actions et spécialiste de l’immobilier européen chez Sofidy. Il n’y a pas eu de logique de stock-picking car toutes les classes d’actifs ont été globalement affectées par la remontée des taux ».

Après un premier trou d’air en juin, les foncières cotées ont à nouveau traversé de sérieuses secousses pendant l’été. « Jusqu’à mi-août, le marché avait la certitude que les banques centrales allaient ralentir la hausse des taux. Le discours de Jackson Hole a mis un terme à cette idée : les banquiers ont maintenu leur politique de hausse dans un contexte de croissance qu’ils estimaient relativement soutenue », complète Laurent Saint Aubin. Son fonds, Sofidy Sélection 1, n’a pas été épargné. A mi-décembre, sa part réservée aux particuliers enregistrait -30 % de performance. Sa valeur de part touchait son plus bas historique le 12 octobre, à 121,18 euros. Le fonds a toutefois battu son indice de référence, le FTSE EPRA / Nareit Euro Zone Capped dividendes nets réinvestis, qui, lui, accusait une baisse de 33 %.

Cap sur le résidentiel

Lancé en 2014, Sofidy Sélection 1 investit principalement dans des foncières cotées européennes. On y retrouve essentiellement du résidentiel, du commerce, du bureau, ainsi que quelques segments alternatifs comme la logistique. Pour cette dernière, le fonds s’accorde une sortie de territoire et peut aller investir en dehors du Vieux Continent, comme aux Etats-Unis. Il s’autorise également une poche de cash jusqu’à 15 % pour éviter d’investir dans des conditions de marché défavorables.

Cela tombe bien car Laurent Saint Aubin demeure circonspect sur l’environnement de marché pour 2023. Il anticipe notamment un ralentissement économique plus important qu’anticipé par la majorité des analystes. « L'augmentation du coût énergétique est un facteur aggravant qui pourrait accentuer le coup de frein », prévient-il. Pour autant, il estime que le plus fort de l’inflation est derrière nous. En témoignent les prix des matières premières et agricoles qui ont déjà commencé à baisser, ainsi que ceux de certains services. Autant d’éléments qui lui font anticiper une détente des taux longs cette année mais une stabilisation du niveau de l’inflation au-dessus des 2 % ciblés par les banques centrales.

Pour se préparer aux prochains mois, Laurent Saint Aubin a dû ajuster sa stratégie et s’est renforcé sur la valeur refuge qu'est le résidentiel. Mais ces protections seront-elles suffisantes ? Cela fait plusieurs mois que les analystes immobiliers alertent, les uns après les autres, d’un retournement de cycle. En fin d’année, les gérants commençaient même à évoquer publiquement des baisses de valorisations. Aucune classe d'actifs ne devrait passer l’hiver sereinement. « Les taux d’intérêt augmentant, la prime de risque se décale logiquement et fait baisser, toutes choses égales par ailleurs, la valeur des actifs, explique Laurent Saint Aubin. Les marchés financiers l’ont bien intégré, ce qui se marque pour les foncières par une décote voisine de 35 % par rapport à la valorisation des patrimoines. »

Laurent Saint Aubin estime que les conditions de financement devraient se stabiliser dans les prochains mois et participer à la relance du secteur. « Les foncières seront favorisées par la résistance structurelle de leur activité et l’écartement excessif entre les marchés d’investissement physique et les cours de Bourse. Nous sommes à un vrai point d’entrée dans cet environnement de ralentissement économique », conclut-il.