Le recul de la consommation grippe l’économie française

Franck Joselin
Le produit intérieur brut en France a stagné au premier trimestre alors que dans le même temps l’inflation continue d’augmenter. Le cocktail est explosif.

Les Cassandres le prévoyaient, mais pour beaucoup, c’est une mauvaise surprise. Le PIB français a stagné au premier trimestre 2022, selon les données publiées vendredi par l’Insee, alors que l’activité progressait de 0,8% trois mois auparavant. L’institut explique ce ralentissement par la faiblesse de la demande intérieure, avec une consommation des ménages qui recule nettement, à -1,3% contre une hausse de 0,6% en fin d’année dernière. «La faiblesse des dépenses de consommation au premier trimestre a été inattendue, compte tenu des signes de résilience suggérés par l’indicateur des ventes au détail de la Banque de France et les récentes enquêtes de conjoncture», commente Chantana Sam, économiste senior chez HSBC, dans une note publiée vendredi.

Ce recul de la consommation s’explique de plusieurs façons. Même si la pandémie semble aujourd’hui s’éloigner en France, «la vague Omicron au début de l’année a probablement joué un rôle dans la baisse de la consommation de services», explique Chantana Sam. A cela, sont venues s’ajouter les inquiétudes provoquées par la guerre en Ukraine. «La baisse de la consommation de biens pourrait être une conséquence précoce de la forte hausse des prix des produits de base causée par le conflit en Ukraine, comme en témoigne la baisse mensuelle significative de mars», continue-t-il.

L'inflation joue donc aujourd'hui un rôle de frein sur l'activité. «La forte inflation, avec la réduction de pouvoir d'achat qu'elle implique, et l'incertitude croissante, ont donc déjà un impact négatif sur la consommation et l'investissement des ménages», abonde Eric Dor, directeur des Etudes économiques à l’Ieseg. Les prix à la consommation ont d'ailleurs continué d'augmenter en avril, atteignant 4,8%, après une hausse de 4,5% en mars.

La hausse des taux en ligne de mire

Même si cette hausse de l’inflation en France reste encore principalement due aux prix de l’énergie et des matières premières, elle pourrait continuer de se renforcer dans les prochains mois. Les économistes d’ING estiment qu’elle n’a pas atteint son pic et pourrait ne ralentir qu’à partir de la fin de l’été. «Pour l’ensemble de l’année, l’inflation devrait être supérieure à 4,5%», prévoit Charlotte de Montpellier, économiste chez ING.

Croissance au point mort et inflation élevée, il n’en faut pas plus pour que les craintes de stagflation se renforcent. Et avec, celles d’une intervention de la Banque centrale européenne (BCE) plus forte et plus rapide qu’attendu.