
Christine Lagarde donne du crédit à la réduction des achats de la BCE

«Nous sommes arrivés aujourd’hui à une situation qui requiert beaucoup d’attention (…). Il me semble désormais que les politiques doivent être presque ‘chirurgicales’ : l’enjeu ne porte plus sur un soutien massif, il va porter sur un soutien concentré, ciblé sur les secteurs qui ont été durement touchés», a expliqué mercredi la présidente de la Banque centrale européenne (BCE) dans un entretien sur la sortie de crise publié par le magazine Time.
Difficile d’imaginer, lors d’une semaine où plusieurs «faucons» (hawkish) de la BCE se sont exprimés en faveur d’une réduction du quantitative easing (QE), que ce commentaire ne portait pas aussi sur le soutien monétaire : «Oui et non, juge Frederik Ducrozet, stratégiste de Pictet AM. C’est surprenant de la voir s’exprimer quand l’économiste Philip Lane et le gouverneur français François Villeroy de Galhau ont affirmé que le prochain comité de politique monétaire (MPC du 9 septembre) ne sera pas celui de l’annonce sur l’arrêt du programme des achats d’urgence (PEPP). En même temps, les commentaires de Luis de Guindos montrent que les prévisions économiques vont être relevées, et les gouverneurs semblent converger vers la possibilité d’arrêter comme prévu le programme d’urgence en mars 2022», poursuit-il, estimant que les modalités de l’arrêt et la transition vers le programme d’achats traditionnel (APP) ne seront pas détaillées avant décembre.
«On pouvait attendre de Christine Lagarde, peu habituée aux commentaires en dehors des réunions monétaires, qu’elle freine les élans vers moins de soutien, et ce n’est pas vraiment le cas, commente aussi Antoine Bouvet, stratégiste taux chez ING. Elle ouvre plutôt la porte vers une réduction alors que les arguments des faucons (fin de l’urgence pandémique, amélioration des conditions de financement, risque de déflation écartés) peuvent aussi paraître subjectifs et incertains.»
Beaucoup d’observateurs avaient trouvé la BCE accommodante avec ses changements de stratégie monétaire (le 8 juillet) et de «forward guidance» (le 22 juillet), malgré une crédibilité limitée si on en croit l’écartement du spread BTP-Bund sur les marchés. Les minutes du dernier MPC ont montré des débats animés autour de ces indications prospectives. Les plus «colombes» (dovish) se sont peu exprimés depuis, «et ils peuvent craindre que la ‘forward guidance’ soit totalement déconnectée du QE, ce qui serait un vrai changement, avec les risques d’une transition difficile (discutée) entre le PEPP et l’APP cet hiver», ajoute Antoine Bouvet.