
And the winner is…

Puisque la période des remises de prix cinématographiques outre-Atlantique est encore récente, autorisons-nous un parallèle pour accorder aux marchés boursiers le prix du meilleur scénario, concomitamment au passage de relais de la présidence de la Banque centrale américaine. Les places financières veillent à apprendre et comprendre le nouveau langage du responsable de la Banque centrale la plus puissante au monde. Or, en matière de script, le texte de Jerome Powell est parfaitement compatible avec celui de Janet Yellen, qui vient de passer la main après quatre années à la barre de la Fed. En revanche, avec un décor nettement différent de celui des années précédentes, c’est donc sans suspense – un comble pour un bon scénario – que les Places ont réagi aux déclarations du nouveau responsable devant le Congrès américain fin février. Pour une première, il est vrai, Jerome Powell a notamment fait part d’une « plus grande confiance dans une hausse de l’inflation ». Il n’en fallait pas plus pour que l’on anticipe une quatrième hausse des Fed funds cette année, au lieu des trois prévues par la Banque centrale – et les investisseurs. Certains environnements ne plaisent pas, c’est évident. La volatilité a ainsi fait une brutale réapparition. En chiffres, le VIX – le fameux indice de la peur – est ainsi passé de 11 à la mi-février à 20 à la fin du mois, en passant par 35. Quant aux grands indices d’actions, en progression durant les premières semaines de l’année, ils s’affichaient quasiment tous dans le rouge le lundi 5 mars.
Il reste aux places financières à s’adapter à la nouvelle donne. Ce qui n’ira pas sans mouvements erratiques. Rien que du classique en fait. On n’en dira pas autant de la présence, désormais, de risques « oubliés ». A commencer par le risque politique lié à l’élection de Donald Trump. L’homme avait su séduire sur fond de relance profitable à l’économie. Mais son succès s’est aussi fondé sur des mesures protectionnistes. Qui prennent désormais corps avec ses annonces concernant des droits de douane de 25 % sur les importations d’acier et de 10 % pour l’aluminium. Tout cela ressemble à s’y méprendre à une déclaration de guerre commerciale. Jusqu’où ira le locataire de la Maison-Blanche ? Nul ne sait. Seule certitude : le jeu est dangereux.
Les Européens seraient toutefois bien inspirés de ne pas regarder que de ce côté-là de l’Atlantique. En matière de risques politiques au sens large du terme, le Vieux Continent a même fort à faire. En Italie par exemple, quand bien même les marchés sont restés de marbre, le résultat des élections marque une très nette montée du populisme, qui va rendre quasi impossible la réalisation de réformes structurelles. De l’autre côté du Channel, la tâche pour trouver un compromis avec Bruxelles dans le cadre du Brexit semble encore plus difficile qu’attendu. Autant de raisons pour se préparer à ce que la volatilité soit durablement de retour, alors même que les fondamentaux dans la zone euro sont bons. Finalement, l’accord trouvé en Allemagne, basé sur une coalition gouvernementale large, est à saluer. Ce pays, avec la France, a un leadership économique à assurer. Un double Oscar pour un premier rôle ?