
Amundi sceptique sur les cryptos, ouvert sur les NFT

Amundi, société de gestion de portefeuille du Crédit Agricole, s’était jusqu’ici assez peu exprimé au sujet des crypto-actifs. Pour trouver trace d’une position publique du gestionnaire sur le sujet, il fallait remonter à juin 2021 et la sortie remarquée du directeur des gestions de l’époque Pascal Blanqué, devenu récemment président d’Amundi Institute. Il associait alors les cryptos à une farce à laquelle les régulateurs allaient bientôt mettre fin.
Huit mois ont passé, le bitcoin, représentant ultime des cryptos, a alterné points hauts et points bas et demeure non régulé. De son côté, Amundi continue d’afficher son scepticisme à l’égard de ces instruments qu’il ne considère dans leur forme actuelle ni comme une monnaie ni comme un actif selon sa nouvelle note de recherche publiée mardi.
« La cryptomonnaie n’est à ce jour ni une réserve de valeur éprouvée, ni une unité de compte reconnue et encore moins un moyen de paiement universel. Sa volatilité est bien plus élevée que celle des devises traditionnelles. Sa liquidité n’est pas toujours assurée, ni sa convertibilité », expose Amundi dans un rapport co-signé par le nouveau directeur des gestions Vincent Mortier ainsi que par Didier Borowski et Tristan Perrier, respectivement responsable et analyste global views. La société de gestion ne reconnaît pas davantage dans les cryptomonnaies de caractéristiques propres aux actifs classiques, soulignant leur absence de sous-jacent économique réel dont résulte une absence de modèle de valorisation. Aussi n’est-il pas possible d’estimer la demande potentielle pour les cryptomonnaies, « sauf à faire des hypothèses sur le rôle précis qui leur sera dévolu (ou reconnu) à l’avenir ».
Stabilisation nécessaire
Amundi rejette aussi les comparaisons des cryptomonnaies avec l’or. Les cryptos n’ont pas encore fait leurs preuves de valeur refuge en temps de stress financier et restent très corrélées aux valeurs de la technologie américaine aux yeux du gestionnaire. « Leur conférer ex ante le même statut que l’or pour estimer leur potentiel de hausse est douteux. On ne peut cependant pas exclure que la cryptomonnaie finisse par jouer le rôle « d’or digital », notamment pour les plus jeunes générations », écrivent les auteurs du rapport. Ces derniers voient cependant en la blockchain – la technologie qui supporte les cryptos – une innovation technologique majeure qui transforme l'offre de services et de produits financiers.
« Ce n’est qu’une fois l’univers réglementaire stabilisé, et l’articulation avec les monnaies digitales des banques centrales clarifiée, que les asset managers pourront recommander les actifs digitaux comme des véhicules d’investissement sûrs », affirme Amundi. La société de gestion juge que les cryptomonnaies peuvent modifier la finance mondiale « pour le meilleur » mais leur usage en tant que moyen de paiement est « potentiellement déstabilisateur, avec un risque systémique à la clé ».
Parmi les événements attendus pour 2022 sur les cryptos, Amundi liste entre autres la possible approbation d’un premier ETF Bitcoin physique aux États-Unis, voire celle d’un ETF Ethereum, ou encore l’adoption du bitcoin comme monnaie officielle par d’autres pays (Panama, Paraguay et les Iles Tonga).
NFT « promis à un bel essor »
Si Amundi se montre critique envers les cryptomonnaies, il voit loin pour trois autres concepts digitaux en cours d’émergence : le métavers (univers fictifs digitaux, ndlr), les jeux vidéo play-to-earn et les jetons non fongibles (non fongible tokens ou NFT).
Les NFT s’apparentent à des « certificats » uniques de propriété d’un bien ou d’un actif virtuel. Amundi estime que ce marché est « promis à un bel essor ». Pour le gestionnaire, il ne faut pas exclure que les NFT deviennent « des actifs investissables en tant que tels et finissent par être rangés dans la catégorie des actifs réels, auquel cas les investisseurs devraient graduellement s’y intéresser comme actif diversifiant et créateur de valeur (au-delà du côté purement spéculatif…) ».
Le gestionnaire note néanmoins que la réglementation sur les NFT reste à définir et que cette absence de cadre ne pourra pas durer. Amundi évoque ainsi un statut « ambigu » des NFT, qui pourrait être classé tant comme un actif numérique que comme une œuvre d’art ou un bien d’un meuble corporel. « Le NFT peut être rattaché à l'une de ces trois catégories dont la fiscalité diffère, et ce d’autant plus si le NFT est associé à un actif réel. L’avenir des NFT dépendra donc de la position des autorités », résume Amundi pour qui les autorités veilleront à ce que ces transactions n’échappent pas à la collecte de l’impôt. Cependant, pour le gestionnaire, si la réglementation pourra freiner l’expansion des NFT, elle ne l’empêchera pas.