L’immobilier d’entreprise a été fortement chahuté en 2020

Fabrice Anselmi
Le marché locatif termine un peu mieux l’année, et laisse de l’espoir aux professionnels pour 2021.
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La demande placée de bureaux en Île-de-France a finalement atteint 1.321.000 m2 en 2020, soit -45 % par rapport à 2019 selon les chiffres Immostat publiés vendredi, même si le quatrième trimestre (408.700 m2 et -40 % par rapport au quatrième trimestre 2019 malgré le deuxième confinement) aide les professionnels à garder espoir pour 2021. « La crise sanitaire a fortement touché les mouvements d’entreprises, notamment ceux des grands utilisateurs : les transactions de plus de 5.000 m2 ont chuté de 65 à 22 en un an. Alors que les délais d’instruction se raccourcissaient, le manque de visibilité économique a soudain ralenti les décisions. Mais de nombreuses réflexions sont en cours, même pour les PME, et cet excès nous semble pouvoir être corrigé dans les prochains mois, après une période de transition », estime Grégoire de La Ferté, directeur exécutif Bureaux Île-de-France chez CBRE, pour qui les besoins liés à la réduction des coûts et la refonte des modes de travail porteront les nouvelles transactions.

Ce spécialiste note que les nombreuses petites transactions ont un peu mieux soutenu le marché francilien que d’autres grandes métropoles européennes, notamment dans Paris QCA où le taux de vacance reste très bas (entre 2 % et 3 %). L’offre de bureaux en Ile-de-France atteint 3.683.000 m2 (+36 %), surtout avec le Croissant Ouest et La Défense : hors ces deux secteurs, le loyer facial reste stable (405 euros HT HC/m2/an), au contraire des mesures d’accompagnement passées très rapidement de 1 à 2 mois par année d’engagement.

Pause technique

L’investissement en immobilier d’entreprise a un peu mieux résisté : à près de 27 milliards d’euros en France en 2020 (-34 % par rapport à l'année record de 2019), dont 9,1 milliards au quatrième trimestre 2019 (-42 %), et 19,1 milliards en Ile-de-France (-33%). Selon CBRE, les bureaux représenteraient environ 18 milliards (-32 %), dont 15,6 en Ile-de-France, les commerces environ 4,5 milliards (-32%) et la logistique 4,4 milliards (-30 %). « Il s’agit également d’une pause technique des investisseurs, dont l’immobilier reste une des classes d’actifs privilégiées, avec notamment une prime de risque sur les taux sans risque de 300 pb pour les bureaux prime parisiens, et d’environ 370 pb pour l’investissement européen en moyenne, rappelle Nicolas Verdillon, directeur exécutif Investment Properties chez CBRE. Une nouvelle hiérarchisation des priorités a mené à un repricing à la baisse dans les bureaux : de moins de 5% pour les actifs sécurisés (core), de 15% à 30% pour les actifs en restructuration (value add), de 10% à 15% pour les actifs moins sécurisés (core+) sur lesquels les investisseurs se posent plus de questions liées à la qualité du locataire, du bail, de l’immeuble, du site, etc. », poursuit-il, rappelant également l’engouement institutionnel nouveau pour l’immobilier résidentiel.

Les propriétaires devraient aussi prendre encore un peu de temps avant de «bouger» car ils veulent éviter de vendre certains produits à la baisse, et ne sauraient pas forcément comment réinvestir les liquidités dégagées : « Il pourrait y avoir un léger déficit d’offre au premier semestre, ce qui est plutôt porteur, alors que les encours dédiés à l’immobilier restent très importants : dans les fonds souverains, les fonds de pension ou d’investissement, chez les assureurs et dans les SCPI…  Avec des stratégies plus ou moins risquées, et toujours beaucoup d’investisseurs étrangers même si les Asiatiques ont dû limiter leurs visites, contrairement aux Allemands ou Américains qui ont des équipes en Europe », conclut Nicolas Verdillon.