Les gestionnaires immobiliers gagnent en maturité sur le front de l’ESG

Valérie Riochet
L’étude d’Ethifinance montre malgré tout une marge de progression sur leurs obligations réglementaires
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Si l’approche durable était il y a encore quelques années une volonté individuelle portée par quelques maisons de gestion spécialisées dans les actifs immobiliers, elle est désormais aux yeux des investisseurs un véritable prérequis. La dernière étude d’EthiFinance, Panorama IR immobilier 2023 qui évalue l’évolution des pratiques des acteurs en matière de politique durable s’est basée sur l’information publique de 78 sociétés de gestion commercialisant SCPI (société civile de placement immobilier), OPCI (Organisme de placement collectif en immobilier) et son homologue professionnel OPPCI.

Les résultats dégagés par l’agence de notation extra-financière et de recherche indiquent que les acteurs les mieux-disants, autrement dit les « Leaders » qui obtiennent un score compris entre 75 et 100 % et les « Avancés » qui décrochent une notation oscillant entre 50 et 75 % « ont fortement progressé, pour peser globalement 35 % de notre échantillon contre 19 % dans l’édition 2022 », soulève Enrica Bruna, consultante en finance durable. Ces bons élèves présentent une conformité réglementaire complète ou presque (SFDR, article 29 LEC - Loi Energie Climat) et une classification article 8 et 9 de leur offre aboutie ou avancée ainsi qu’un nombre important de véhicules labellisés ISR. À l’inverse, les acteurs désignés comme « Limités » (10 à 25 %) et « Faibles » (0 à 10 %) passent en un an de 55 % à 40 %. L’entre-deux, les Intermédiaires (25 à 50 %), pèse 26 % de l’échantillon, un niveau identique à l’an passé, « mais qui ne désigne pas la même réalité puisque 15 à 20 % des sociétés de gestion sont montées en gamme d’une année sur l’autre », pointe Xavier Leroy, responsable des services de conseil d’EthiFinance.

Réglementation touffue

Cependant, derrière ce satisfecit général se cachent quelques difficultés. L’article 4 du règlement européen SFDR oblige les acteurs concernés à publier sur leur site Internet des informations concernant la prise en compte ou non des principales incidences négatives (PAI) issues de leurs décisions d’investissement. Or, plus de la moitié de l’échantillon ne fait mention nulle part des PAI. Autre observation, plus de 50 % de gestionnaires immobiliers étudiés ne mentionne pas de rapport Article 29 LEC. Ce décret introduit, entre autres, un reporting climatique au regard des exigences de températures de la Cop 21 ou encore en matière de biodiversité. L’étude pointe une possible complexité perçue quant à la préparation de ce rapport.

Autre élément de surprise, depuis 2022, tous les gestionnaires commercialisant des fonds classés article 9 et des fonds article 8 poursuivant des objectifs de durabilité environnementale doivent publier l’alignement de leurs véhicules avec la Taxonomie. «Or, seuls 3 % des acteurs de notre étude le font », appuie Enrica Bruna. Beaucoup de maisons préfèrent indiquer un alignement nul, « par peur de modification réglementaire ultérieure et choisissent de communiquer sur d’autres indicateurs comme les émissions carbone évitées ou le niveau d’efficacité énergétique », poursuit-elle. Une posture qui révèle la difficulté des maisons de gestion immobilières à se saisir d’une réglementation mouvante et complexe.