
La guerre en Ukraine fait flancher le marché immobilier

La guerre en Ukraine aura bien des conséquences sur le marché immobilier. Jusqu’à il y a peu, il était difficile de voir les liens de cause à effet, hormis ceux impactant l’économie globale. Mais au fil des semaines, une tendance se dégage : le conflit pèse sur le moral des Français et s’ajoute à un contexte déjà très compliqué.
L’accession à la propriété immobilière s’est fortement compliquée depuis le début de l’année. Alors que les taux ont entamé leur remontée, les conditions d’accès au crédit se sont durcies. Non seulement contraintes de suivre les recommandations du Haut conseil de stabilité financière, les banques deviennent aussi plus exigeantes au niveau de l’apport personnel des clients. Sauf qu’en parallèle, ces derniers doivent également composer avec une inflation galopante et une perte directe de pouvoir d’achat, un thème brutalement revenu sur le devant de la scène à la fin de la campagne présidentielle. Conséquence de ce moral en berne : les Français revoient leurs projets immobiliers. Plus question d’accepter n’importe quel prix, les ménages préfèrent attendre que d’acheter ou vendre à des conditions défavorables.
Effondrement de la demande et double peine pour le neuf
Le dernier baromètre des prix de l’association Les prix immobiliers (LPI) en partenariat avec Se Loger (1) nous apprend qu’en janvier déjà, le nombre de compromis signés au cours des trois mois précédents était en recul de 4.7 % (en glissement annuel). En février, la baisse de l’activité s’est accélérée : - 8.5 %. Et en mars, le choc supplémentaire provoqué par la guerre en Ukraine en a rajouté une couche : les ventes réalisées ont chuté de 23.6 % sur le trimestre, en glissement annuel.
Pour le marché du neuf, c’est la double peine. Il subit de plein fouet le contexte actuel, comme l’ancien, mais doit aussi composer avec les déséquilibres pesant sur l’activité des entreprises (raréfaction et hausse du coût des matériaux de construction, allongement des délais de livraison, pénurie de personnel).
L’effondrement des ventes concerne tout le territoire : -5% en Alsace, dans le Limousin, les Midi Pyrénées et la PACA, -10% Auvergne, Languedoc-Roussillon et Rhône-Alpes.
La hausse des prix continue mais ralentit
L’impact sur les prix est pour l’instant encore timide. En cause : la ruée des acquéreurs vers les maisons neuves. Sur le premier trimestre de l’année, leurs prix étaient ainsi en hausse de 3,4% mais en forte baisse de 13,1% sur un an. La hausse, qui peut paraitre paradoxale alors que les acheteurs se font rares, s’expliquerait par un renforcement de la part des acheteurs aisés et dotés d’un fort apport personnel dans la demande de maisons neuves. En parallèle, les appartements neufs ont augmenté de seulement de 0,3% sur la même période.
Au global toutefois, la hausse est légèrement plus forte dans le marché de l’ancien que dans celui du neuf (1,7% contre 1,2%, voir ci-dessous).
Selon le baromètre, les prix ont ainsi continué d’augmenter dans 93% des villes françaises. Mais depuis l’été dernier, le rythme de la hausse ralentissait, notamment dans la plupart des villes de plus de 100.000 habitants.
«A Lyon par exemple, l’augmentation n’est plus que de 0.5 % sur un an, contre plus de 10 % au printemps 2021», indique le baromètre. Il en va de même à Bordeaux et Strasbourg : « La lente progression des prix sur un an enregistrée depuis le début de l’année s’accompagne maintenant d’une tendance au recul des prix signés plus marquée que celle observée habituellement à cette période de l’année », écrit l’économiste Michel Mouillart, porte-parole du baromètre. A Paris, la progression des prix mesurée d’un mois sur l’autre constatée jusqu’à l’automne 2021 s’essouffle et cède progressivement la place à un mouvement de repli comparable à celui qui fut observé durant le 1er confinement.
(1) L’association «Les Prix Immobiliers» a été créée le 22 décembre 2009 pour développer un observatoire des ventes de logements anciens et neufs fournissant aux différents acteurs un outil de connaissance précis des marchés. Les membres actuels en sont : BNP Paribas Residentiel CHH, CapiFrance, Crédit Logement, Crédit Mutuel, Gecina, Groupe BPCE, iad, La Banque Postale, OptimHome, SAFTI et Sogeprom