
Action oblique : le règlement de copropriété est un contrat

Si un bailleur n'expulse pas son locataire alors qu'il perturbe le bon fonctionnement de la copropriété par des actions contraires au règlement, les autres copropriétaires sont en droit d'effectuer les démarches nécessaires à sa place. Une solution dégagée par un arrêt n° 20-18.327 de la troisième chambre civile de la Cour de cassation du 8 avril 2021.
Une usufruitière et des nus-propriétaires ont accordé un bail à une société d'achat, de vente et de réparation de scooters. Elle s'installe dans un local commercial situé dans un immeuble en copropriété. Les propriétaires du lot voisin, se plaignant de nuisances sonores et olfactives, assignent les bailleurs, le syndicat des copropriétaires et la société FMJ Scooter pour obtenir son expulsion par voie d'action oblique (1), en se basant sur le respect du règlement de copropriété.
Les juges du fond ordonnent la résiliation du bail, ce que les défendeurs contestent en cassation. Selon eux, l'action par voie oblique en résiliation du contrat de bail porte une atteinte excessive à la liberté contractuelle. De plus, aucune carence ne peut-être imputée aux bailleurs puisque les demandeurs ne se sont jamais adressés à eux afin qu'ils intiment à leur locataire le respect du règlement de copropriété. Un locataire de bonne foi, ayant réalisé « de nombreuses diligences » pour limiter les nuisances induites par son activité, en demandant notamment à l'assemblée des copropriétaires l'autorisation de réaliser des travaux.
L'action oblique en résiliation du bail est jurisprudentiellement admise « dès lors que le locataire contrevient aux obligations découlant de celui-ci et que ses agissements, contraires au règlement de copropriété, causent un préjudice aux autres copropriétaires », rappelle la Cour de cassation. Le règlement de copropriété ayant nature de contrat, chaque copropriétaire a le droit d'en exiger le respect par les autres. La demande d'autorisation de FMJ à l'assemblée générale pour réaliser des travaux était contraire au réglement de copropriété puisqu'elle visait à faire accepter les nuisances provoquées par son activité. Enfin, même si les demandeurs n'ont pas interpellé directement les bailleurs, ces derniers ont été informés des nuisances par le syndic et les autres copropriétaires. La résiliation du bail est donc bien fondée.
(1) Article 1341-1 du code civil : « Lorsque la carence du débiteur dans l'exercice de ses droits et actions à caractère patrimonial compromet les droits de son créancier, celui-ci peut les exercer pour le compte de son débiteur, à l'exception de ceux qui sont exclusivement rattachés à sa personne. »