
Un drôle d’animal enfin libéré !

SPFPL… mais qu’est-ce donc que ce drôle d’animal suscitant des réactions tellement contrastées ? Une chose est sûre, il ne laisse pas indifférent. Les uns se font une joie de pouvoir l’apprivoiser quand d’autres le repoussent sans ménagement.
La société de participations financières de professions libérales (SPFPL) va pouvoir éclore en tout cas au travers d’un décret à paraître de manière imminente. C’est une étape décisive après 13 ans de gestation, qui concrétise l’interprofessionnalité capitalistique et rend envisageable le principe d’une grande profession du droit !
Son origine remonte à la loi Murcef de 2001 qui a initié ces holdings des professions libérales, mais sans le système nerveux leur permettant d’avancer. Plusieurs textes vont la compléter sans cependant lever l’obstacle d’une logique uniprofessionnelle alors ancrée dans les moeurs. En 2006, la directive Services va, à l’échelon européen, débrider la situation en dénonçant les restrictions aux activités pluridisciplinaires prises au sens large. Malgré tout, en France, les esprits vont rester cantonnés dans une approche monométier des SPFPL, à l’opposé de sa vocation initiale.
Jusqu’à la loi du 28 mars 2011 offrant de manière explicite à des professionnels de statuts différents l’opportunité de coopérer au sein de structures capitalistiques communes : une porte ouverte pour les avocats, notaires, huissiers de justice, commissaires-priseurs judiciaires, mais aussi, ce qui n’était pas prévu au départ, pour les expertscomptables, les commissaires aux comptes et les conseils en propriété industrielle et intellectuelle (1).
Restait le chaînon manquant pour définitivement libérer l’animal : le fameux décret d’application qui s’apprête à voir le jour… La balle est dans le camp des intéressés, et c’est là que se dessine une ligne de partage aussi nette qu’entre Grecs et Troyens face au cheval de légende. Avocats et experts-comptables y voient pour la plupart un levier de compétitivité, notamment vis-à-vis de la concurrence étrangère. Quand les notaires perçoivent surtout l’incompatibilité par rapport à leur situation de monopole. Sans compter avec la déontologie et les intérêts bien compris de chacun.
Le ressort commun reste le meilleur service à la clientèle, mais avec la nuance de l’interprofessionnalité versus l’interdisciplinarité. La SPFPL, quoi qu’il en soit, va être aux avant-postes d’une réflexion multimétier et initier de nouveaux comportements, du côté de l’offre comme de la demande. Dans l’approche globale du conseil patrimonial, rien ne sera plus comme avant.
(1) Sur les prémices de la SPFPL, voir sur edelamaze.com, site d’Edouard de Lamaze, avocat qui a été à l’origine de la réflexion lorsqu’il a été délégué interministériel aux professions libérales de 1997 à 2001.