Numérique : Les banques privées négocient le tournant

Derrière certaines banques de détail, la gestion privée entame sa mue
La clientèle fortunée n’en demeure pas moins attachée à la qualité du conseil
DR, Anne de Barbeyrac, directrice marketing et communication, Swiss Life Banque Privée, et Patrice Henri, directeur général délégué, Harvest

En mai dernier, Swiss Life Banque Privée a publié, en collaboration avec l’institut de sondage Opinionway, son quatrième observatoire de la banque privée. Cette étude, qui passe au crible le rapport des Français vis-à-vis de ce type d’établissements, a conclu à une forte attente des clients les plus aisés en matière de services digitaux. Dans le même temps, Harvest, éditeur de solutions digitales pour les acteurs de la gestion de patrimoine, a édité un livre blanc dédié de manière plus spécifique au parcours client.

Sélection.

« L’offre numérique n’est pas un critère de sélection à l’entrée. En revanche, son absence ou son insuffisance peuvent devenir un critère de sortie pour les clients  », relève Anne de Barbeyrac, directrice du marketing et de la communication chez Swisslife Banque Privée. Patrice Henri, le nouveau directeur général délégué d’Harvest (1), ajoute que « c’est la qualité du service qui fidélise le client. Toutefois, à qualité de prestations équivalente, ce dernier optera pour la banque dont les outils digitaux sont les plus élaborés ».

Retard.

Il n’en reste pas moins que pour satisfaire les besoins de leurs clients, les banques privées doivent mener une inévitable révolution numérique. Selon Patrice Henri, les lacunes en la matière tiennent à différentes raisons – dont le coût des investissements réglementaires mais aussi le présupposé selon lequel le banquier privé a une meilleure connaissance de son client, ce qui l’exonèrerait de collecter davantage de données. L’âge de la clientèle, présumée peu connectée et peu demandeuse de services en ligne, est également en cause. Autant de postulats battus en brèche désormais.

Opportunités.

« Le résultat d’exploitation des banques privées européennes a diminué de 30 % ces cinq dernières années. Le développement du digital est une nécessité pour renouer avec la croissance et les résultats », souligne Patrice Henri. Les nouvelles technologies sont présentées comme une aubaine pour inverser ce phénomène de décroissance. Le contexte est d’ailleurs propice à une telle mutation puisque, selon l’étude Swiss Life Banque Privée, « les Français seraient plus enclins à utiliser les nouvelles technologies si leur conseiller le leur recommandait  ».

Aide réglementaire.

D’ailleurs, l’usage d’outils digitaux permet de reporter la charge réglementaire sur le client – qui peut remplir son profil financier et opérer la mise à jour de ses informations personnelles en ligne –, réduisant au passage le temps consacré aux tâches administratives. Patrice Henri estime que ces nouvelles pratiques peuvent « diminuer d’un facteur de trois à quatre fois le temps de gestion du réglementaire pour les conseillers » tout en optimisant l’archivage des documents de connaissance clients. « Les nouvelles technologies sont indispensables pour gérer les contraintes réglementaires, dont la mise en œuvre et le contrôle consomment une part importante des investissements des banques », avance le directeur général d’Harvest.

Simulateurs en ligne.

Qu’ils portent sur la fiscalité, la retraite ou l’immobilier, ces interfaces sont une vraie ressource pour développer l’activité et la communication des banques. Notamment parce que «  les données produites pourront être poussées vers un conseiller, qui sera alors en mesure de les exploiter pour amorcer un échange avec son prospect  », comme relève le livre blanc d’Harvest. Par ailleurs, ils offrent au banquier l’opportunité d’apporter à ses clients des services à valeur ajoutée et «  d’entrer dans un schéma de co-construction plébiscité par la clientèle qui entend être proactive dans la gestion de son patrimoine », explique Patrice Henri. Des études soulignent que la première motivation du client qui entre dans une banque privée est la recherche de conseils « personnalisés et performants ».

 

(1) Patrice Henri était auparavant président du directoire de la Banque Martin Maurel.