
« Nous voulons créer le conseiller augmenté »

C’est l’histoire d’une petite pousse décidée à passer à la vitesse supérieure. En 2009, quand il développe un outil pour digitaliser la relation client dans la société de gestion de son père, Pierre-Alexandre Rousselot ne se rend pas tout suite compte qu’il vient de poser les premières briques de sa société. D’une solution artisanale pour répondre à un besoin unique, il créera KeeSystem et sa plateforme digitale KeeSense qui vise à digitaliser le travail des conseillers financiers. Objectif : les aider à augmenter leur impact en termes de services, de rentabilité et de développement de leur activité grâce à sa solution de gestion de portefeuilles KeeSense.
Rentable dès l’année suivant sa création, KeeSystem a eu l’insolence de pouvoir autofinancer son développement et se passer d’une équipe commerciale pour vendre sa solution. Le bouche-à-oreille a particulièrement bien fonctionné : 30 clients à date répartis dans 7 pays différents.
Si le succès a été très vite au rendez-vous, tout chef d’entreprise sait que la croissance a parfois besoin de sang (et d’argent) neuf. KeeSystem a annoncé ce jeudi 8 juillet l’entrée à son capital d’Ebene, la holding luxembourgeoise de Pierre Dalmaz, à hauteur de 75%.
Cette dernière intervient en France et à l’international dans le consulting et l’édition informatique, l’expertise en actifs industriels et immobiliers et l’hôtellerie. KeeSystem se glisse dans le groupe Ebene aux côtés des sociétés Antenia, Leader Informatique, A-Régie, Optimmo et Senoee. Le montant exacte de la prise de participation n’a pas été communiqué, mais gravite, selon nos informations, autour de trois fois le chiffre d’affaires de la fintech.
Entretien avec Pierre-Alexandre Rousselot, président fondateur de KeeSystem
KeeSystem semblait pouvoir continuer à se développer seule. Pourquoi ouvrir son capital maintenant ?
C’est une question d’opportunités. Nous avions déjà été approchés par des investisseurs mais n’avions pas voulu donner suite. Jusqu’ici, nous avons tout fait pour réduire la prise de risque. J’ai créé KeeSystem avec 50.000 euros et nous avons pu continuer à nous développer sans emprunts ni levées de fonds. Mais pour passer à l’étape d’après, nous avions besoin d’énergie supplémentaire. Pierre Dalmaz a un profil très complémentaire au mien, il pourra nous accompagner dans cette prise de risque.
Pourquoi avoir accepté de réduire votre part à 25% ?
Dans une entreprise, il faut un leader. Il nous a paru logique qu’Ebene prenne une part majoritaire. Je n’ai pas besoin d’être propriétaire à 100% de ma société, mais je reste quand même un gros actionnaire et conserve mon poste de dirigeant. Pierre Dalmaz prend la présidence du conseil d’administration. Je suis ravi de voir que l’on peut continuer à faire évoluer KeeSystem. Quand on est chef d’entreprise, on est confronté au doute, souvent. Il n’est pas toujours facile de prendre les bonnes décisions seul. Pouvoir s’associer avec quelqu’un qui a une solide expérience est une chance.
Quels sont vos projets avec l’apport d’Ebene ?
Nous allons créer une équipe de sept à huit commerciaux. Ils seront localisés à Luxembourg, Genève, Zurich, Monaco et Paris, où nous ouvrons un bureau.
Quels conseillers ciblez-vous et que leur proposez-vous ?
Notre solution KeeSense s’adresse aux family offices, banquiers privés et conseillers en gestion de patrimoine. La plateforme digitalise leur relation client et leur permet de réaliser plusieurs opérations (prospection, conformité, gestion des portefeuilles…). Elle agrège également des informations sur des actifs non financiers comme l’immobilier, les œuvres d’art ou bien encore les objets de collection. Ils sont encore beaucoup, dans la profession de conseil, à réaliser ces opérations avec différents outils, voire manuellement. Nous voulons en faire des conseillers augmentés. Beaucoup de nos clients sont des anciens banquiers, qui se sont mis à leur compte par frustration de ne pouvoir réaliser les opérations de gestion qu’ils souhaitaient. Or, les indépendants font face à des tâches administratives et réglementaires très chronophages qui les détournent de leur cœur d’activité. Nous voulons simplifier leur travail pour qu’ils se concentrent sur ce qu’ils savent faire le mieux, le conseil au client.