
Le démarchage pour faire face à la concurrence européenne

En 1971, l’article 66-4 interdisait aux avocats toute action de démarchage et prévoyait une amende 4500 euros et 6 mois de prison.
La communication et le marketing étaient alors tabous pour les avocats.
Les temps changent, la concurrence, d’abord nationale puis européenne a contraint, en quelques dizaines d’années, l’Ordre des avocats a dédié l’article 10 du Règlement Intérieur National à la communication. L’éventail des actions de communication réalisables par et pour les avocats a été ainsi considérablement élargi.
En 2011, la Cour de Justice de l’Union Européenne a condamné toute interdiction totale de démarchage pour les professions réglementées. Cette décision de justice impose, en effet, la suppression de l’interdiction totale des communications commerciales des professions réglementées – hormis pour les notaires, huissiers de justice et professions de santé, qui n’entrent pas dans le champ de la directive « Services » (CJUE, 5 avr. 2011, aff. C-119/09, Sté fiduciaire nationale d'expertise comptable c/min. Budget, Comptes publics et Fonction publique). Selon la CJUE : « interdire tout acte de démarchage, c’est priver les professionnels provenant d’autres États membres d’un moyen efficace de pénétration du marché en cause, et donc restreindre la libre prestation des services transfrontaliers ».
A l’étude, l’article 5 ter du projet de loi Consommation mettrait fin à l’interdiction du démarchage pour les avocats.
Alors, que de chemin parcouru pour cette profession en seulement 40 ans.
La profession d’avocat est une des catégories professionnelles qui a le plus évolué et su se doter d’outils pour s’adapter au marché et aux évolutions économiques et sociétales.
Aujourd’hui, il existe un large éventail d’outils de communication, de marketing, de business developpement pour faire face à une nouvelle concurrence.
Il faut considérer cet arrêt comme une opportunité de développement plutôt qu’une menace.
Que signifie cette autorisation de démarchage pour les avocats ? Pourront-ils se poster à un carrefour attendant un accrochage entre automobilistes pour distribuer une carte de visite ? Non, les règles de la concurrences seront assouplies, les outils de communication et de marketing seront élargis et des cabinets étrangers pourront investir commercialement le marché français… et vice versa ! Les structures qui auront anticipé et su préparer en amont des actions de démarchage, seront celles qui domineront parmi une concurrence exacerbée.
Tous les avocats, membres de l’Union Européenne, seront soumis aux mêmes règles de démarchages.
Néanmoins, cet arrêt ne signe pas la fin des valeurs et du respect de la déontologie et des principes essentiels de la profession : dignité, conscience, indépendance, probité et humanité, loyauté, confraternité…
De ces faits et compte tenu de cette ouverture à la concurrence directe par la CJUE, la communication ne peut que se renforcer et se développer plus âprement. L’Ordre et tous les avocats n’auront guère d’autre choix que de s’adapter, ouvrant la voie à de nouveaux axes de communication et de marketing.