La réforme de la discipline des notaires prend corps

L'exécutif a pris les textes codifiant la refonte de la déontologie des officiers ministériels.

Le gouvernement a mis la touche finale sur la réforme de la déontologie et de la discipline des officiers ministériels. Pris en application de la loi pour la Confiance dans l'institution judiciaire, une ordonnance a été présentée le 13 avril en Conseil des ministres avant d'être publiée au Journal Officiel (JO) du 14 avril (1). 

Des collèges de déontologie

Cette refonte complète concerne les notaires, les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, les commissaires de justice (2) et les greffiers des tribunaux de commerce. Des collèges de déontologie vont être mis en place prochainement pour chaque corps d'officiers. Un décret détaille leurs missions et leurs fonctionnements. Ils seront placés auprès des instances nationales de chaque profession et présidé par leur président, mais des personnalités extérieures qualifiées, dont au moins un membre honoraire du Conseil d'Etat ou un magistrat honoraire de l'ordre administratif ou judiciaire seront garants de leur intégrité. 

Les collèges seront chargés, aux côtés des instances nationales, de participer à la rédaction d'un code de déontologie, encore une fois propre à chaque profession. «Ce code énonce les principes et devoirs professionnels permettant le bon exercice des fonctions et s'applique en toutes circonstances à ces professionnels dans leurs relations avec le public, les clients, les services publics, leurs confrères et les membres des autres professions», définit l'ordonnance.

De nouvelles juridictions disciplinaires

Chaque corps d'officiers devra préciser les règles propres à assureur le respect de son code dans un règlement approuvé par le Garde des Sceaux. Les collèges de déontologie assureront le service après-vente des codes en émettant des recommandations sur leur application à des situations individuelles et en initiant des actions disciplinaires à l'encontre des officiers fautifs. 

La discipline sort aussi renforcée de cette réforme. De nouvelles juridictions disciplinaires disposeront de services d'enquêtes indépendants et seront présidées par un magistrat, là aussi garant de leur indépendance : des chambres de discipline au niveau régional ou interrégional - pour les notaires et les commissaires de justice - et des cours nationales. Le procureur général sera chargé d'une mission de surveillance de la discipline et de la déontologie des officiers du ressort de la Cour d'appel (ce qu'il fait déjà pour les avocats). 

Avant toute saisine d'une juridiction disciplinaire, une procédure de conciliation préalable est prévue entre le professionnel mis en cause et l'auteur de la réclamation.

Une échelle des peines revue

L'échelle des peines est également revue pour être plus progressive et s'étale de l'avertissement au retrait de l'honorariat, en passant par le blâme, l'interdiction temporaire d'exercer et la destitution. Une amende de 10.000 euros ou 5% du chiffres d'affaires hors taxes peut être infligée en sus à titre principal, et certaines peines peuvent être assorties d'un sursis. En cas d'urgence, le président de la juridiction disciplinaires peut suspendre provisoirement le professionnel de ses fonctions pour six mois renouvelables une fois.

La réforme de la discipline et de la déontologie des officiers ministériels fait suite à un rapport de l'Inspection générale de la justice (IGJ), qui pointait le faible nombre des saisines disciplinaires au regard des effectifs de chaque profession (4). «L’hétérogénéité et la complexité des régimes, leurs failles et leur lourdeur au plan procédural, résultats d’évolutions menées successivement, profession par profession, sont pointées unanimement, écrivaient ces auteurs. Cette diversité, longtemps acceptée, est aujourd'hui source de confusion voire pour les acteurs, considérée comme un obstacle à la mise en œuvre du disciplinaire, lequel concentre par ailleurs toujours des critiques de fond (distanciation insuffisante, impartialité aléatoire de l'enquêteur...).»

(1) Ordonnance n° 2022-544 du 13 avril 2022 relative à la déontologie et à la discipline des officiers ministériels
(2) Qui réunissent à compter du 1er juillet prochain les huissiers de justice et les commissaires-priseurs judiciaires
(3) Décret n° 2022-545 du 13 avril 2022 relatif aux collèges de déontologie des officiers ministériels
(4) Mission sur la discipline des professions du droit et du chiffre, octobre 2020