
La finance française se prépare aux dossiers chauds de la rentrée

Les chiffres du premier semestre des banques françaises n’ont pas déçu, bien au contraire. Elles ont délivré des résultats au-delà des attentes, montrant leur bonne résistance, notamment dans les métiers de banque de détail, dans la période de reprise qui a suivi la pandémie de 2020. Leur cours de Bourse marque cette confiance pour l’heure retrouvée, après avoir été longtemps boudé par les investisseurs.
BNP Paribas affiche une progression de 23,2% depuis le début de l’année, le Crédit Agricole de 18% et la Société Générale, qui avait été particulièrement touchée pendant la crise sanitaire, bondit de 57%. Même bonne tenue du côté de l’assurance, avec Axa, dont le cours progresse de plus de 23% sur la même période.
Mais ces bonnes performances ne doivent pas faire oublier que les sociétés financières ont encore plusieurs sujets à traiter dans les mois qui viennent. Changement drastique pour certaines, comme Natixis, qui s’est retirée de la cote, restructuration pour d’autres, comme la Société Générale, qui doit intégrer le Crédit du Nord, ou encore recherches de nouveaux débouchés, comme BNP Paribas, qui veut accélérer dans le crédit à la consommation avec la reprise de Floa bank. L'Agefi a sélectionné quelques dossiers qu'il faudra particulièrement surveiller.
Société générale : les négociations sur la fusion démarrent
La fusion des réseaux de la Société Générale et du Crédit du Nord est en route. Après un refus ferme des organisations syndicales au mois d’avril dernier, la direction et les représentants du personnel sont aujourd’hui entrés dans un cycle de négociation. Il est prévu qu’il dure environ un an. Les premières réunions ont eu lieu juste avant l’été et les points abordés se révèlent délicats pour la banque.
Syndicats et direction devront s’entendre sur les conditions d’intégration et statut des salariés du groupe Crédit du Nord au sein de la Société Générale, sur les mesures d’accompagnement social du projet de rapprochement des deux réseaux bancaires et sur la structuration des Instances représentatives du personnel au sein de la future banque de détail.
Si les modalités de fusion ne sont pas encore définies, les coûts, pour leur part, évalués entre 700 et 800 millions d’euros, seront à 80% imputés aux résultats de cette année.
Les grandes manœuvres ont commencé, avec un changement à la tête du Crédit du Nord se traduisant par la nomination de Jean-Louis Klein au poste de directeur général de la banque, en lieu et place de Françoise Mercadal-Delasalles.
BPCE : après le retrait de la cote de Natixis, tout reste à faire
La sortie de la cote de Natixis n’aura pas été qu’une simple formalité. En interne, plusieurs sources ont indiqué à L’Agefi que BPCE avait atteint de justesse la proportion de 90% de titres de sa filiale lui permettant de la retirer de la cote. Si ce retrait donne l’impression que le plus dur est passé pour la banque, les réorganisations internes vont maintenant devoir être mises en œuvre. La création effective du nouveau pôle «Global Financial Services» (GFS) regroupant dans un nouvel ensemble la gestion d’actifs et de fortune et la banque de grande clientèle s'accompagne aussi, selon le plan stratégique de BPCE, de la simplification de l’articulation des fonctions du groupe avec les métiers de GFS, de l’assurance et des paiements.
Les développements informatiques sont d’envergure, avec un projet d’une équipe commune de développement des logiciels grand public et le rapprochement des équipes informatiques des Banques Populaires, des Caisses d’Epargne, des métiers de solutions et d’expertises financières et du pôle assurances de Natixis. Le groupe devra aussi régler une fois pour toute le dossier H2O, l’ancienne boutique dont Natixis a décidé de se séparer mais avec laquelle le divorce traîne en longueur.
Sans compter que la banque devra aussi gérer son déménagement à Paris dans les tours Duo dans les prochains mois, en flex-office. Certains syndicats avaient déjà fait part à la direction à la fin du mois d’avril de leur inquiétude sur un taux de bureaux disponibles correspondant à 60% du nombre de salariés.
Cerberus fait le pari de faire renaitre le CCF de ses cendres
Le dossier a traîné de long mois, mais il y avait des raisons à cela. Lorsque My Money Group, soutenu par le fonds Cerberus, a repris la banque de détail HSBC France en juin dernier, le repreneur savait que la tâche allait être ardue. L'opération s’est d’ailleurs soldée par une perte nette de 1,9 milliard d'euros pour HSBC. La filiale française de la banque étant connue pour avoir un des systèmes informatiques parmi les pires en France, Cerberus a fait un choix radical. La refonte des systèmes a été confiée à Arkéa Banking Services, qui devra jouer avec les exigences de son nouveau client. La facture informatique, comprenant les systèmes et la digitalisation des réseaux sera salée, Cerberus tablant sur un investissement de 200 millions d’euros sur ces points.
Mais l’informatique n’est pas la seule difficulté à laquelle sera confronté le fonds. Celui-ci a en effet décidé de faire renaître la marque CCF, l'ancien Crédit Commercial de France, qu’affichait la banque jusqu’en 2005, et son changement de nom cinq ans après son rachat par HSBC en 2000. Or, relancer une marque reste difficile, d’autant que si le CCF bénéficiait d’une bonne image il y a une vingtaine d’années, celle-ci a, depuis, été oubliée par la clientèle la plus jeune. La possibilité d’insuffler de la modernité à ce nom historique fait ainsi douter bon nombre d’observateurs.
Arkéa fait le ménage dans ses participations
Si le Crédit Mutuel Arkéa a gagné le contrat de sous-traitance de l’informatique de l’ancienne banque HSBC France reprise par My Money Group, la banque mutualiste veut opérer un virage dans la politique de prise de participation dans les fintechs. Alors que, depuis plusieurs années, elle examinait la plupart des dossiers de la Place – et est entrée dans nombre d'entre eux –, son nouveau patron, Julien Carmona, arrivé en mars dernier en remplacement de Jean-Pierre Denis, ne cache pas vouloir rationaliser ses participations. Certaines, comme Leetchi ou MangoPay sont aujourd’hui à vendre.
Dans le même temps, à l’instar de ce qu’il fait pour My Money Group, le groupe veut développer ses services aux institutions financières. Et ce alors qu'Arkéa, bien que moins attaché à son indépendance vis-à-vis de la Confédération nationale du Crédit Mutuel que lorsqu’il était dirigé par Jean-Pierre Denis, vise toujours une forme d’autonomie.
L'Afer veille au grain sur l'intégration d'Aviva France dans Aéma
Cet été, l’autorité de la concurrence a donné son feu vert au rachat d’Aviva France par Aéma. Cette cession, qui traînait depuis de long mois, tout comme celle de HSBC, a été bouclée au mois de février dernier. Cependant, le travail n’est pas terminé pour autant. Aéma est en effet lui-même issu du regroupement de la Macif et d’Aesio au début de l’année et doit donc parachever son organisation et la bonne intégration d’Aviva. Les cultures d’entreprises sont différentes, avec un réseau salarié mutualiste côté Aéma et un réseau comprenant des agents généraux chez Aviva. L’intégration de l'assureur sera d’autant plus délicate que l’Afer, la puissance association d’épargnants qui pèse près de 55 milliards d’euros, et dont les fonds étaient gérés par Aviva, compte bien dicter ses règles à son nouveau partenaire. Enfin, le marché bruit de rumeurs sur les changements de dirigeants au sein d'Aviva France, qui a déjà connu plusieurs départs.
Le crédit à la consommation devra prouver son potentiel
Dans l’environnement de taux bas, mettant à mal les marges d’intérêts des banques (la différence entre le taux auquel elles prêtent et celui auquel elles se refinancent), les nouveaux débouchés ne sont pas légion. Le paiement fractionné fait partie de ceux-là. BPCE se réjouit d’avoir bouclé l’acquisition de 50,1% du capital d’Oney en 2019, tandis que BNP Paribas a déboursé près de 260 millions d’euros pour mettre la main sur Floa Bank. Le paiement fractionné se révèle rentable, les clients déboursant de petites sommes indolores lors de leurs achats, même si certaines associations se sont élevées contre des pratiques commerciales qu’elles jugent trompeuses. Mais ce qu’espèrent avant tout les banques, c’est la transformation des clients qui utilisent le paiement fractionné en clients de leurs crédits à la consommation. Ce qu’il faudra confirmer dans les prochains mois.