
La Banque Postale affirme son modèle de bancassureur

La Banque Postale (LBP) pousse la logique de la bancassurance jusqu’au bout. Le groupe bancaire public a annoncé jeudi son intention de lancer une offre publique d'achat simplifiée (OPAS) sur l'ensemble du capital de l'assureur CNP Assurances au prix de 21,90 euros par action, dividende attaché. «Cette opération est très structurante et accélère notre diversification en renforçant notre modèle de bancassureur», assure à L’Agefi Philippe Heim, président du directoire de La Banque Postale.
«S’il se réalise, le rachat à 100% de CNP apportera environ plus d’un demi-milliard d’euros par an de résultat net supplémentaire à La Banque Postale et n’aura que peu d’impact prudentiel sur nos ratios de solvabilité», complète le dirigeant. Pour la banque, pénalisée par la faiblesse des taux, et pour sa maison mère La Poste, confrontée aux déficits abyssaux du courrier, les revenus d'assurance sont une boufée d'oxygène.
Cette opération se déroulera en plusieurs phases. Dans un premier temps, La Banque Postale compte acquérir la part de 16,1% de CNP Assurances détenue par BPCE, ce qui porterait sa propre participation à 78,9% du capital de l'assureur. Le groupe bancaire prévoit ensuite de déposer auprès de l'Autorité des marchés financiers (AMF) son offre pour les actionnaires minoritaires de CNP Assurances représentant 21,1% du capital. Après Natixis cet été, CNP est la seconde entreprise financière qui décide de quitter la cote en moins d’un an.
Au prix proposé, le rachat des 37,2% du capital de l’assureur représenterait un coût de 5,6 milliards d'euros pour La Banque Postale, conseillée dans cette affaire par Barclays et Morgan Stanley. La somme apparaît largement supportable pour la structure aujourd’hui, ce qui n’était pas le cas il y a deux ans. En 2019, lorsqu’elle devait monter à plus de 62% au capital de CNP en reprenant la part de 40% détenue par la Caisse des dépôts, La Banque Postale avait obtenu une dérogation de l’AMF pour ne pas avoir à lancer une offre publique d’achat sur le solde du capital de l’assureur.
Stratégie respectée
Ce projet d'acquisition permet à La Banque Postale de consolider et de simplifier son pôle assurance. L’opération facilite au passage l’intégration prévue dans CNP des activités d’assurance dommages, santé et prévoyance, aujourd’hui logées dans La Banque Postale Assurance.
Le rachat des parts minoritaires de CNP à la demande de la banque et qui, selon des sources proches, se serait décidé en quelques semaines, participe à l’application du plan stratégique de LBP. Cette opération n’est d’ailleurs pas sa seule initiative en ce sens. Toujours dans une optique de diversification de ses revenus, LBP a aussi créé il y a quinze jours une banque de financement et d’investissement. La logique est respectée car au mois de juillet dernier La Banque Postale a aménagé la manière dont elle présente ses résultats. Elle ne distingue plus la banque, l’assurance et la gestion d’actifs, mais elle fait, depuis lors, apparaître quatre nouveaux pôles : la bancassurance en France, la bancassurance à l’international, la banque patrimoniale et la gestion d’actifs, et la banque de grande clientèle et d’investissement.
Un modèle plébiscité
Pour BPCE, conseillé par Rothschild, les arguments avancés sont de même nature. Les deux établissements, comme les autres grandes banques de la place, suivent des stratégies similaires concernant l’intégration des métiers bancaires et de l’assurance. «Notre participation dans CNP n’était plus stratégique depuis que BPCE a décidé de devenir un bancassureur de plein exercice en 2016. Le plus important est que les partenariats commerciaux entre CNP, La Banque Postale et le groupe BPCE, qui fonctionnent bien, soient prolongés dans la durée», explique Laurent Mignon, président du directoire du groupe BPCE. Ce dernier distribue dans ses réseaux l'assurance emprunteur de CNP.
Dans le même temps, les deux groupes ont annoncé jeudi leur entrée en négociations exclusives concernant le projet d’acquisition par Natixis Investment Managers de 40% du capital d’AEW Europe et de 45% du capital d’Ostrum Asset Management, aujourd’hui détenus par LBP. «Le rachat à 100% d’AEW Europe et Ostrum, qui conforte notre stratégie dans l’asset management, devrait nous coûter environ 240 millions d’euros, tandis que la vente de notre part dans CNP rapportera 2,4 milliards. L’ensemble de l’opération aura un impact positif de 17 points de base sur la solvabilité de BPCE», a précisé Laurent Mignon. Même si la ligne CNP vaut 2,9 milliards d'euros dans les comptes de BPCE, sa cession n'entraînera pas de moins-value comptable car ce chiffre intègre des éléments de réévaluation déjà comptabilisés dans le bilan.