
Crowdfunfing et levée de fonds pour l’amorçage

Près de 550.000 entreprises se sont créées en 2012 en France. Parmi elles, quelques-unes se sont lancées dans l’aventure de la recherche de financement. A l’arrivée, très peu sont parvenues à lever des fonds. 458 entreprises innovantes ou en phase de création en 2010, selon le livre blanc de l’Afic d’avril 2012, auxquelles on peut ajouter 370 entreprises financées par les réseaux de business angels. En définitive, moins d’un millier d’entreprises en phase d’amorçage bénéficient de ce type de financement.
Un cas pratique ne saurait permettre de définir le parcours type de la levée de fonds. Chaque projet est un cas particulier, une opération sur mesure à construire. Qui peut prétendre à ce type de financement ? Quel montant rechercher ? Vers quels investisseurs se tourner ? Enfin, comment et par qui se faire aider ? Autant de questions auxquelles nous allons tenter d’apporter des réponses sous forme de grandes lignes directrices, pour ceux qui souhaitent se lancer dans ce parcours.
Le panorama des business angels
Profil des entreprises concernées.
Les entreprises qui ont vocation à rechercher ce type de financement pour le développement de leur projet relèvent de la catégorie des entreprises ayant un fort potentiel de croissance, qu’elles soient start-up ou entreprises ayant déjà une ou deux années d’activité. Elles doivent être positionnées sur un secteur porteur (réseaux sociaux spécialisés, technologie innovante, objets connectés, site marchand spécialisé…) en vue d’apporter un nouveau produit/service sur un marché le plus large possible.
A travers l’entreprise et son projet, ce sont également les hommes, les équipes et leur « track record » qui sont regardés. Il est évidemment plus facile de faire confiance à des acteurs ayant déjà l’expérience de l’entreprise, du management, avec de préférence quelques succès à leur actif.
Le seuil de un million d’euros.
Concernant les montants que l’on peut raisonnablement rechercher dans une phase d’amorçage ou de premiers développements, le montant de un million d’euros est un seuil charnière qui délimite deux approches différentes selon qu’on est au-dessous ou au-dessus de ce seuil. Paradoxalement, il est plus facile de lever 1 million que 100.000 euros car, au-dessus de 1 million d’euros, les interlocuteurs seront des professionnels de l’investissement, alors qu’en deçà, ce seront le plus souvent des particuliers. Cela ne signifie évidemment pas qu’il faille demander 1 million si on n’a besoin que de 100.000 euros car, en tout état de cause, il faut que le montant recherché soit en adéquation avec le projet, les besoins et la valorisation « pré-money » de l’entreprise.
Les investisseurs.
On l’aura compris, les investisseurs se partagent le marché de l’amorçage avec, d’un côté, les business angels (les particuliers) et, de l’autre, quelques sociétés de gestion (des professionnels).
Les réseaux de business angels jouent un rôle majeur dans des projets moins gourmands en capitaux (la moyenne sur 2013, selon France Angels, se situe à 132.000 euros avec un effet de levier proche de 3 sur le montant global investi). Au-delà de ces montants, on se rapproche du seuil qui donne accès à l’univers des sociétés de gestion (FCPI, FCPR, FIP) qui gèrent des fonds et s’intéressent à des entreprises ayant un projet plus ambitieux, plus innovant et déjà une certaine taille de chiffre d’affaires.
Utilité des conseils.
Pour aller à la rencontre de ces deux univers, il est évident que la compétence seule du dirigeant suffit rarement. Préparer un dossier nécessite du temps et une expertise qui ne s’improvise pas. Le teaser, le business plan, le chiffrage du besoin de financement, l’approche de la valeur de l’entreprise, l’executive summary, le pitch… sont autant d’éléments qui sont rarement élaborés sans l’intervention d’un conseil.
Le rôle du conseil est multiple tout au long du parcours. Au début, il est là pour challenger le projet et s’assurer qu’il est pertinent. Durant la phase de constitution des différents supports évoqués, il a un rôle de maître d’œuvre au côté du dirigeant. Et quand, in fine, les investisseurs adhèrent au projet, sa mission consiste à accompagner ce dernier pour qu’il ne se retrouve pas seul, dans les négociations sur les modalités de l’opération, la quote-part du capital cédé, les modalités de sortie… et à assurer la coordination finale avec le ou les porteurs du projet, les investisseurs et les avocats, experts-comptables, commissaires aux apports…
Les étapes du crowdfunding
Précisons d’emblée qu’il s’agit d’un type d’opération relativement récent en France, lequel fait l’objet d’une réglementation (à paraître en juin 2014, lire pp. 17 et 18).
D’après une étude récente publiée en février 2014 par Compinnov, on aurait levé par ce truchement 10,3 millions d’euros en capital en 2013 auprès de plus de 1.880 contributeurs, via huit plates-formes dédiées, alors que le crowdfunding dans sa globalité (incluant également dons et prêts) aurait collecté près de 68 millions d’euros, dont 48 millions en prêt et capital, auprès de plus de 328.000 personnes inscrites sur plus d’une cinquantaine de sites.
Certes, les fonds susceptibles d’être ainsi levés sont encore de montants modestes, autour de 100 à 300.000 euros par projet, mais ils devraient représenter pour les start-up et PME une manne à très fort potentiel de croissance dans les années à venir. Le projet présenté dernièrement par Fleur Pellerin parle d’un montant pouvant aller jusqu’à 1 million d’euros !
D’après nos investigations menées auprès des responsables de ces plates-formes, la cinquantaine d’opérations réalisées en 2013 générerait près de 30 actionnaires par deal avec un ticket individuel moyen de l’ordre de 7.000 euros.
Le rôle du CIF.
Pour y parvenir, un conseiller en investissements financiers (CIF) doit d’une part indiquer en toute transparence ce qu’il pense du projet présenté à ce type d’investisseurs (qui ont souvent des connaissances microéconomiques moindres que celles des investisseurs dits « qualifiés »), tant en termes de risques et/ou d’opportunités éventuels, qu’en termes de valorisation « pré-money » (avant augmentation de capital.)
Tout cela faisant l’objet des documents présentés sur la plate-forme de crowdfunding.
Le CIF, aux côtés du chef d’entreprise, répondra naturellement aux questions posées par le public désireux a priori d’investir et il devra recueillir in fine divers renseignements auprès des souscripteurs déclarés – afin de contrôler l’origine des fonds (lutte contre le blanchiment) – qui peuvent se révéler parfois fort nombreux et que l’on tentera de regrouper, si possible, au sein d’une structure holding.
Mais il ne faut pas croire que s’inscrire sur une plate-forme suffise et que l’argent va ainsi venir tout seul… Les porteurs du projet doivent aussi se mobiliser. En utilisant tous les outils mis à disposition par la plate-forme, en mettant à jour leurs pages, en publiant des nouvelles, en répondant aux demandes de mise en relation sur le site, en relayant l’opération en cours sur les réseaux sociaux.
Autres étapes parfois nécessaires.
La formule du financement participatif est à la fois avantageuse : délais assez courts, réponses généralement positives et donc peu de suspens…, mais elle présente aussi une contrainte majeure : le risque de devoir tout recommencer si la somme requise n’est pas formellement atteinte. En effet, il faudra dans ce cas restituer l’intégralité des fonds aux souscripteurs…
Précisons que le crowdfunding en capital peut être complété par des dons ou/et des prêts.
Par ailleurs, cette formule peut être panachée avec une levée de fonds auprès de business angels ou/et de sociétés de venture capital, voire de corporate venture.
Coûts.
Indiquons enfin le montant de la rémunération de la plate-forme, à savoir des honoraires liés à des prestations (analyse du business plan, estimation de la valeur) ; une commission versée par la société émettrice (taux de l’ordre de 7 % HT des fonds levés) ; celle perçue auprès des candidats actionnaires (taux proche de 5 % HT des fonds souscrits).