
Créer sa société de gestion pour protéger sa rémunération

Les indépendants ne le reconnaissent qu’à demi-mots : ils créent ou projettent de créer une société de gestion pour protéger leurs rémunérations à venir. Perçue comme une sanction, la décision prise au Royaume-Uni de supprimer les rétrocessions sur commissions, principale source de revenu des indépendants dans toute l’Europe, inquiète la profession en France (lire notre dossier). « Que vaudra à terme un cabinet ? », s’alarment les CGPI.
Plusieurs structures ont donc décidé de passer à l’offensive. C’est le cas d’Atrio Gestion Privée et du groupement Actualis & Associés. Si ce sont les mêmes raisons qui ont poussé ces professionnels du patrimoine à refondre leur modèle de développement, leurs stratégies se révèlent toutefois différentes : les uns veulent ouvrir leur capital, les autres n’en ont aucunement l’intention. Les premiers entendent proposer à leurs clients des fonds de fonds de portefeuilles, les seconds des mandats de gestion.
Cette tendance à la création de sociétés de gestion par les indépendants n’est certes pas nouvelle (L’Agefi Actifs n°254, pp. 12 et 13 et n°441, p. 2), mais le mouvement pourrait s’accélérer fortement. D’ailleurs, plusieurs autres structures de ce type sont déjà en cours de création ou d’agrément auprès de l’Autorité des marchés financiers et devraient voir le jour d’ici à quelques semaines.
Un fonds de fonds ouvert…
Actualis & Associés réunit 20 cabinets : tous « sont intéressés pour participer au tour de table », explique Henry Masdevall, le président du groupement. Et la porte n’est pas fermée aux autres indépendants de la Place qui souhaiteraient prendre part au projet, ni aux institutionnels. Les membres d’Actualis & Associés devraient confier la gestion d’un tiers de leurs actifs - soit près de 300 millions d’euros sur un total de 900 millions - à la société de gestion sous la forme de fonds de fonds.
Henry Masdevall pense emporter l’adhésion de l’ensemble des clients des cabinets. Certes, mais investir 30 % de son patrimoine financier sur un seul véhicule d’investissement implique que le client accorde toute sa confiance à son conseiller, auparavant distributeur et désormais gestionnaire. Sans accepter de livrer le nom des deux gérants qui intégreront la société de gestion, Henry Masdevall ne craint pas le risque d’image lié à une potentielle sous-performance du fonds de fonds. L’objectif premier est de sauver la profession.
... ou des mandats de gestion.
De leur côté, les trois associés d’Atrio Gestion Privée entendent développer un autre modèle : devenir société de gestion pour passer du statut d’allocataire d’actifs à celui de gérant sous mandat. La délégation permet d’investir sans solliciter la signature du client à chaque arbitrage. Le cabinet d’indépendants n’associera pas d’institutionnels à sa démarche. Le capital social de la société de gestion, Atria Gestion, a été constitué à hauteur de 135.000 euros par apport des trois conseillers, qui « n’envisagent pas de déplacer plus de 10 % de leurs encours dans la nouvelle structure »,explique Alexandre Faraut, cogérant d’Atrio Gestion Privée, qui représente environ 300 millions d’actifs gérés. Par ailleurs, l’initiative permettra aux trois CGPI de récupérer une partie des capitaux sous mandats de leurs clients délégués auprès d’autres sociétés de gestion, notamment ceux logés à l’intérieur de contrats d’assurance vie.