
Altarea crée la surprise en renonçant à racheter Primonial

Dans les rangs de Primonial, la stupeur est de mise. Dans les premières heures de mercredi, Altarea a informé le marché que l’acquisition du gestionnaire de patrimoine ne pouvait être réalisée dans les conditions convenues. Les raisons évoquées sont essentiellement juridiques.
« Dans le cadre de la revue de la documentation juridique dont certains éléments n’ont été communiqués que le 25 février, Altarea a constaté que les conditions convenues pour l’acquisition de Primonial début mars n’étaient pas remplies du fait du non-respect – tant sur le fond, la forme et les délais – des stipulations du protocole d’acquisition signé en juillet 2021 », explique le groupe coté, dont l’action reculait légèrement ce matin. Contacté par nos soins, Altarea n’était pas disponible pour préciser ces manquements supposés.
Des actionnaires échaudés
« Nous ne l’avions pas vu venir, s’étonne Stéphane Vidal, PDG de Primonial. Dans une transaction de cette envergure [Ndlr, une valorisation de 1,9 milliard d’euros, pouvant grimper ultérieurement à 2,1 milliards], de nombreuses opérations pré-closing sont nécessaires pour adapter la structure. Le signing était en juillet mais nous nous sommes donné du temps pour faire cela sur la base des comptes consolidés, notamment la dette nette au 31 décembre. » Un timing serré mais « nous avions, d’un côté comme de l’autre, les meilleurs avocats de la place de Paris », estime le dirigeant. Une résolution sur le terrain judiciaire n’est désormais plus à exclure. Dans un communiqué, le promoteur a averti qu’il mettra tout en œuvre pour faire valoir ses droits, protéger ses intérêts et ceux de ses actionnaires.
De leurs côtés, les propriétaires de Primonial – Bridgepoint, Latour Capital et Société Générale Assurance (85,7 % à eux trois) – y voient une décision subite et unilatérale à quelques jours du closing prévu ce 2 mars, alors même que l’ensemble des conditions de réalisation de l’opération étaient réunies. « Cette décision étant en violation des accords conclus par les parties, les actionnaires de Primonial ont décidé de prendre toutes mesures nécessaires pour faire valoir leurs droits. » Aucune clause de « material adverse change » (permettant de se prémunir d’un événement défavorable contractuellement défini) ne figurait dans le contrat entre les deux parties. La bataille judiciaire est donc lancée.
Jusqu’alors, aucun indice ne laissait penser que le point de rupture était proche. Le 22 février, Altarea a partagé ses résultats annuels 2021 en annonçant sa forte croissance « à la veille de l’acquisition Primonial. » « Avec l’acquisition prochaine de Primonial, Altarea devrait connaître une profonde évolution de son modèle, qui deviendra alors moins capitalistique et plus récurrent », pouvait-on y lire.
Par ailleurs, aucune dégradation de la situation financière de Primonial ne peut venir étayer l’annulation de l’acquisition. L’an dernier, l'excédent brut d'exploitation (Ebitda) du groupe a atteint 196 millions d’euros, soit respectivement 17 % et 15 % de plus qu’en 2020 et 2019. Un chiffre attendu en croissance à deux chiffres pour cette année. Du côté des encours, le gestionnaire précise gérer 58,5 milliards d’euros au 31 décembre 2021, dont 32,4 milliards pour sa seule activité immobilière, 11,6 milliards sur d’autres solutions de placement et 14,5 milliards pour ses activité financières gérées par La Financière de L’Echiquier (LFDE).
LFDE ne rentrait pas dans les plans d’Altarea, qui ne devait conserver que 15 % du capital. « Mais l’opération de cession majoritaire est naturellement remise en question. LFDE restera une filiale à 100 % de Primonial », explique Stéphane Vidal.