
Premier bilan de l’entrée en vigueur de la norme IFRS 17

Le nouvel environnement normatif IFRS 17 s’appliquant à la comptabilité d’assurance ne remet pas en cause les fondamentaux des entreprises. Cependant, les conséquences à long terme des décisions prises au cours d’un exercice financier sont désormais mieux prises en compte dans le résultat annuel, qui devient dès lors plus volatil au contraire des fonds propres. Ces variations doivent donc faire l’objet d’une pédagogie renforcée qui transforme la communication financière.
Mises en place en 2005, les normes comptables internationales IFRS ont pour objet d'harmoniser la présentation des états financiers et comptables des sociétés. Face à la complexité de l’évaluation des engagements des assureurs, l'International Accounting Standards Board (IASB) avait opté pour une première approche (IFRS 4), s’appuyant largement sur le provisionnement local de chaque pays. Près de 20 ans après, cette norme est remplacée par l’IFRS 17 avec plusieurs objectifs à destination des investisseurs et partenaires :
- Une comparabilité accrue entre les acteurs par une uniformisation des méthodes,
- Une meilleure prise en compte des garanties des contrats, et notamment financières, par une approche plus économique et prospective, prenant en compte les interactions entre les placements d’assurance et les contrats d’assurance associés, ainsi que les données biométriques (sinistralité) et comportementales des assurés (rachats par exemple),
- Une cohérence accrue avec les autres normes IFRS.
Adoptée par les principaux assureurs mondiaux, la norme IFRS 17 constitue une condition pour émettre des dettes sur certains marchés. Notons qu’a contrario, certains acteurs assurantiels ont préféré sortir de l’environnement IFRS.
Au-delà de ses effets vertueux, IFRS 17 se caractérise par une grande complexité, tant sur les aspects normatifs que sur les analyses ou les processus comptables. Dorénavant, la comptabilité dépend de modélisations prospectives actuarielles sur le long terme prenant en compte l’ensemble des effets des contrats d’assurance (biométriques, interaction avec les marchés financiers, actifs et comportementaux…). Si certains principes existaient pour la construction d’un bilan prudentiel de type Solvabilité 2, le passage à un compte de résultat en IFRS 17 requiert une granularité supérieure.
La norme IFRS 17 vient enrichir les indicateurs financiers de pilotage existants des entreprises d’assurance (comme ceux relatifs à la solvabilité et l’activité), avec de nouveaux indicateurs permettant de mesurer la rentabilité actuelle (marge d’assurance) et future (CSM pour Contractual Service Margin) des engagements d’assurance. Ceci posé, l’environnement normatif change mais pas les qualités intrinsèques du modèle économique de chaque entreprise : solvabilité pour l’assurance, liquidité, capacité à générer du résultat récurrent et stratégie pour l’ensemble des secteurs restent inchangés.
La communication financière des entreprises devra ainsi évoluer en adoptant ces nouveaux indicateurs qui reflètent l’objectif de projection des activités et en adaptant les modes de calcul des grands indicateurs financiers usuels (résultat, fonds propres…).
L’année 2023 constituant l’année de basculement dans l’environnement comptable IFRS 17 - totalement différent de celui de l’IFRS 4 et difficile à comparer – de nombreux acteurs seront amenés à réaliser un double calcul sur leurs résultats 2022 (un en IFRS4 et un en IFRS 17) afin de servir de base de comparaison pour les années à venir. La norme IFRS 17 impacte également les transactions de M&A, avec des contraintes d’intégration supplémentaires. La capacité à déployer rapidement, de manière agile, la norme IFRS17 dans de nouvelles entités constituera un atout pour le développement externe.
En conclusion, le passage à IFRS 17 ouvre une nouvelle ère pour la communication financière et les conséquences à long terme des décisions prises au cours d’un exercice financier sont désormais mieux prises en compte dans le résultat annuel. Cependant, la mesure des conséquences, sur une plus longue période, se fonde sur des hypothèses techniques et macro-économiques qui peuvent s’éloigner de la réalité et varier dans le temps. Ces écarts et variations introduisent par conséquent une plus grande volatilité dans les résultats qui devront nécessairement être expliqués de façon précise et claire pour être compris.