Stratégies patrimoniales

Les SCPI ont-elles une place dans la transmission du patrimoine ?

L’investissement en SCPI favorise la transmission d’une partie de son patrimoine en exonération totale de droits
Il se trouve que les parts de SCPI permettent, d’une manière générale, une grande souplesse de partage
Julien Ribes, fondateur de MYSCPI.com

I – L’utilisation du don familialde sommes d’argent pour optimisersa transmission de patrimoine

Il existe les traditionnelles exonérations qui consistent à bénéficier de certains abattements sur les droits de mutation à titre gratuit.
Des donations qui peuvent porter sur des sommes d’argent, mais aussi sur des droits immobiliers dont la détention peut être directe ou indirecte, via des parts de société civile immobilière (SCI) ou de société civile de placement immobilier (SCPI). Toute réflexion faite, l’optimisation de la transmission patrimoniale peut conduire à combiner différents dispositifs légaux que sont notamment la société civile immobilière, qui peut elle-même détenir des parts de SCPI.

Régime légal. Les abattements prévus en ligne directe sont de 100.000 euros pour les donations entre parent-enfant, de 31.865 euros pour les gratifications au profit des petits-enfants, ou de 5.310 euros pour les donations aux arrière-petits-enfants. Ceux-ci sont renouvelables tous les 15 ans. Un barème fiscal reprend les seuils d’exonération de droits en fonction du lien de parenté entre donateur et donataire.

Utilisation. Ces donations - rapportables à la succession - sont assez largement utilisées et le plus souvent réalisées par acte authentique devant notaire, pour transmettre le patrimoine immobilier du donateur. À cette étape, la solution consiste généralement à démembrer la propriété du bien ; l’usufruit étant conservé par le donateur et nue-propriété revenant aux enfants (ou autres descendants) de manière à ce que le parent donateur conserve les revenus locatifs du bien ou s’en réserve la jouissance.

Don manuel. Moins connu, car bien plus récent, il existe un autre dispositif d’exonération, cumulable avec les abattements de droit commun. Dans le langage courant, on parle souvent de « donation-Sarkozy ». En effet, depuis le 22 août 2007, il est possible - sous réserves - de réaliser certains dons manuels en bénéficiant d’un dispositif supplémentaire d’exonération. Sont concernés les dons de sommes d’argent, consenties en ligne directe à des enfants, petits-enfants ou arrière-petits-enfants. Il est à noter que, à défaut de descendance, les bénéficiaires des dons peuvent être les neveux ou nièces du donateur (voire des petits-neveux ou des petites-nièces sous certaines conditions). La donation concerne nécessairement un don de sommes d’argent réalisé en pleine propriété.

Limitations. Ce dispositif est toutefois limité puisque le don est plafonné à 31.865 euros, mais l’élargissement aux petits-enfants, voire aux neveux ou petits-neveux, permet de transmettre une part plus ou moins significative en fonction de la situation de chacun. D’autre part, il convient de rappeler que cette donation est possible pour chaque parent. Un enfant peut donc recevoir en exonération de droits jusqu’à 63.730 euros de ses parents (31.865 x 2).Trois autres conditions - cumulatives - viennent également restreindre le champ d’application de ce dispositif. L’exonération ne sera acquise qu’à condition que le donateur soit âgé de moins de 80 ans, que le donataire soit majeur et que la donation porte exclusivement sur une somme d’argent.

Obligation déclarative. Bien qu’acquise de droit[1], cette exonération est conditionnée à une obligation déclarative auprès de l’administration fiscale dans le mois qui suit la date du don (conditions d’application stricte). Cette obligation se traduit par le dépôt en double exemplaire auprès du centre des impôts du donataire d’un formulaire cerfa n°2735, qui est désormais le même formulaire que pour l’exonération en application des abattements évoquée plus haut. Il convient donc de bien compléter ce formulaire pour que la donation soit bien prise en compte avec le bon dispositif. Enfin, il convient de préciser que cette exonération peut être renouvelée tous les 15 ans en cas de donation entre un même donateur et un même bénéficiaire, et que le formalisme ne rend pas obligatoire la rédaction d’un acte authentique, on peut donc se passer du notaire dans ce cas précis.

II - Combinaison du don manuel et de la souscription de parts de SCPI démembrées

L’une des solutions permettant d’optimiser la transmission d’un patrimoine consiste à conjuguer la « donation-Sarkozy » et la souscription de parts de SCPI démembrées.

Avantages de la solution. Dans ce but, le donateur transmet en franchise de droits 31.865 euros à chacun de ses enfants avant de souscrire avec eux un portefeuille de SCPI dont les titres auront été au préalable démembrés.

Illustration du schéma. Un parent de 62 ans dispose d’un patrimoine immobilier de 600.000 euros et d’un patrimoine financier d’environ 300.000 euros, dont environ 100.000 euros qu’il souhaite consacrer à l’acquisition de SCPI. Ce dernier a deux enfants majeurs et peut par application des dispositions de l’article 790G du CGI, leur transmettre 31.865 euros chacun, soit un total de 63.730 euros. Une transmission réalisée en franchise de droits puisque l’exonération joue dans ce cas à taux plein. Pour faire fructifier les sommes transmises, le donateur envisage avec l’aval de ses donataires de faire l’acquisition d’un portefeuille de SCPI.

Démembrement. Parent et enfants s’accordent pour investir conjointement 106.200 euros dans un portefeuille de SCPI démembré sur une durée viagère. Le parent se réserve l’usufruit des titres et les enfants acquièrent la nue-propriété. Étant précisé que ce démembrement sera réalisé ab initio et non pas postérieurement à l’acquisition des parts. Les droits respectifs des acquéreurs seront alors créés simultanément à la création des parts. L’usufruitier et les nus-propriétaires seront redevables chacun du prix et des frais inhérents à leur quote-part. À raison de l’âge de l’usufruitier (62 ans), le prix d’acquisition de l’usufruit sera de 42.480 euros et celui de la nue-propriété de 63.720 euros, soit 31.860 euros par enfant nu-propriétaire financés par le don manuel qu’il a reçu.

Avantage immédiat. À l’issue de l’opération, le donateur usufruitier reçoit les revenus fonciers provenant des parts de SCPI, ce qui constitue un complément de revenus viager non négligeable pour un parent proche de la retraite ou en situation de dépendance. Étant entendu que les enfants s’engagent à ne pas disposer à des fins propres des fonds qui leur sont donnés. Le levier d’optimisation sera d’autant plus important que les enfants disposent déjà de revenus, idéalement fortement imposés, de sorte que la perception de revenus fonciers complémentaires ne soit pas un objectif à court terme.

Reconstitution de la pleine propriété. Au décès de leur parent usufruitier, les enfants recouvriront la pleine propriété du portefeuille en franchise de droits. Cette transmission n’aura été soumise à aucun droit, tout comme sa constitution et son dénouement. Dans ce contexte, le donateur a de son vivant non seulement bénéficié de revenus complémentaires, mais a également anticipé et optimisé le coût de sa succession.

Réserve pratique. Sous réserve de respecter les dispositions légales et de correspondre aux objectifs patrimoniaux des différentes parties, plus la donation intervient tôt, mieux ce sera. En effet, la clé de répartition sera d’autant plus favorable que le donateur - l’usufruitier - est jeune, comme le montre le barème fiscal (page de gauche). Réaliser ce type de montage tôt permettra aussi éventuellement de reconstituer la période de rapport de 15 ans pour renouveler l’opération.

(1) Banque et Droit, n°169, septembre