
Ultime rebondissement dans l’affaire UBS ?
L’entraide fiscale France-Suisse se révèle fructueuse pour Bercy. Le 12 mai dernier, l’Administration fédérale des contributions (AFC) a entériné la transmission de l’identité de quelques 45.000 détenteurs de comptes bancaires, soupçonnés de ne pas avoir rempli leurs obligations fiscales en France. Elle répond à une requête de la France qui sollicitait des informations concernant les contribuables français présumés domiciliés fiscalement en France et détenteur de comptes bancaires attribués par la banque UBS SA entre 2006 et 2008. Cette demande s’appuyait sur des listes transmises à la France par les autorités fiscales allemandes à la suite de perquisitions opérées dans des agences allemandes de la banque suisse. « La Banque UBS a interjeté l’appel de cette décision, explique Marc Bornhauser, avocat fiscaliste, fondateur du cabinet Bornhauser, mais cela n’aura pour effet que de ralentir la procédure. In fine, les noms des contribuables concernés seront transmis à l’administration fiscale. Et ils risquent gros ». Les contribuables concernés sont les titulaires d’un compte ou ses ayants droit économiques pour la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2015. En revanche, les personnes dont la relation avec UBS SA a été clôturée avant le 1er janvier 2010 ne sont pas concernées par la demande.
De lourdes conséquences
La loi de finances pour 1990 a institué une obligation de déclaration des comptes ouverts, utilisés ou clos à l’étranger par les personnes domiciliées ou établies en France (article 1649 A du CGI, deuxième alinéa). Outre des redressements en matière d’impôt sur le revenu et en matière d’impôt sur la fortune (ISF), les contribuables concernés devront s’acquitter d’une amende pour défaut de déclaration de comptes de 1.500 euros, éventuellement une amende de 40 % pour manquement délibéré (article 1729 du CGI), ou pire, une amende de 80 % à compter de 2016. « L’administration fiscale ne fera aucun cadeau aux intéressés, commente Marc Bornhauser, et ils doivent s’attendre à un redressement particulièrement sévère ». Des poursuites pénales sont également au menu, puisque l’administration fiscale est tenue de déclarer automatiquement au ministère public les fraudes fiscales lorsque les montants éludés en jeu sont supérieurs à 100.000 euros. « Le risque est d’autant plus prégnant que les délais de reprise de l’administration fiscale en matière de compte non déclarés sont de 10 ans (article 169 A du LPF) », rappelle le fiscaliste.
L’impact des régularisations
Ces 450.000 détenteurs de comptes bancaires vont-ils constituer une manne pour le Trésor public ? Pour Marc Bornhauser, rien n’est moins sûr. « Il y a fort à parier qu’un grand nombre d’entre eux ont déjà régularisé leur situation, précise l’avocat. En France, l’affaire UBS a démarré en 2012 lorsque la banque et sa filiale française ont été mises en examen pour démarchage bancaire illicite et blanchiment aggravé de fraude fiscale. Ils ont donc eu largement le temps de profiter des campagnes de régularisation initiées par Bercy ». En effet, l’administration fiscale a, dans le contexte de la révélation des « listes HSBC », créée une première « cellule de régularisation » en 2009 qui a permis d’encaisser des recettes fiscales d’un montant de 1,2 milliard d’euros. En 2013, l’administration a renouvelé l’expérience avec le STDR, (Service de traitement des déclarations rectificatives) qui a fermé ses portes au 31 décembre 2017, après avoir rapporté 9,4 milliards d’euros. 90 % des dossiers de régularisation portaient sur des comptes détenus en Suisse. « Les contribuables qui ne se seraient pas encore mis en conformité ont encore le temps de le faire, conseille Marc Bornhauser. Certes, ils ne bénéficieront pas des conditions de régularisation favorables mises en place par les circulaires Cazeneuve successives mais ils peuvent encore espérer négocier le montant des pénalités applicables, avant que leur identité ne soit dévoilée et la procédure de redressement lancée. Ils doivent saisir cette dernière opportunité ».
frédérique perrotin-laquérrière