
Provitalia envisage un recours
Le courtier d’assurance Provitalia (auparavant dénommée 2AP Assurances) a été condamné par la Commission des sanctions de l’ACPR à un blâme et une sanction pécuniaire de 20.000 euros dans une décision rendue le 15 mai dernier. L’institution a estimé que Provitalia ne respectait pas, au moment du contrôle, ses obligations d’information de ses clients.
Démarchage. Cette société distribue, par des appels téléphoniques exclusivement sortants effectués depuis sa plateforme tunisienne qui emploie l’essentiel de ses effectifs, des contrats d’assurance prévoyance, des assurances complémentaires et surcomplémentaires santé.
Selon la Commission des sanctions, s’appuyant sur l’article L. 112-2-1 du Code des assurances pour la fourniture à distance d’opérations d’assurance, « il appartient à l’intermédiaire d’assurance de s’assurer que le client a été mis à même de prendre connaissance, en temps utile avant la conclusion du contrat d’assurance, des informations qui devaient, à la date du contrôle, lui être fournies ».
Dérogation invoquée... Provitalia ne contestait pas ne pas avoir respecté cette obligation, mais elle soutenait que ces faits n’étaient pas constitutifs d’un manquement dès lors qu’elle était est en droit de bénéficier de la dérogation alors prévue à l’article R. 520-2 du Code des assurances. Cette disposition permet de déroger à l’obligation d’information préalable par écrit ou sur un autre support durable, lorsque le contrat « a été conclu à la demande du consommateur en utilisant une technique de communication à distance ne permettant pas la transmission des informations précontractuelles et contractuelles » sur ces mêmes supports. Dans ce cas, les informations devaient être fournies au souscripteur, sur support papier ou sur un autre support durable, immédiatement après la conclusion du contrat d’assurance.
… mais réfutée. La commission des sanctions rejette cet argument, car dans ce cas, il ne peut être déduit du processus de vente l’intention du prospect de conclure un contrat d’assurance. « En l’espèce, le script de qualification ne se conclut pas par des informations précises portant sur un contrat particulier, mais comporte seulement une interrogation du prospect par le commercial sur le souhait du premier d’être rappelé par un conseiller pour l’aider à comparer avec ‘ce [qu’il a] déjà’ et ‘profiter, dès à présent, d’une étude personnalisée’ », souligne la Commission des sanctions. Le grief est dès lors établi. Pour Lionel Lefebvre, associé fondateur du cabinet Orid Avocats, conseil de Provitalia dans ce dossier, cette sanction est « mesurée », car « moindre que ce qu’avait demandé initialement le collège de la commission de sanctions de l’ACPR - 50.000 euros, blâme, suspension de l’activité pendant deux mois ».
Visions divergentes. En revanche, l’avocat demeure « circonspect » devant l’argumentation juridique développée par la commission des sanctions qui se livre, selon lui, à « une interprétation restrictive » de l’article R. 520-2 du Code des assurances. « En matière disciplinaire, le principe est clair : pas de sanction sans texte précis. Or, pour l’ACPR, il ne peut pas y avoir de régime dérogatoire quand on est dans le cadre d’un démarchage, sauf cas improbable dans lequel une personne appellerait spontanément un courtier pour demander lui-même de signer un contrat, sans aucune sollicitation préalable », explique Lionel Lefebvre.
Une position de l’ACPR que d’autres avocats comprennent néanmoins car, selon eux, « dans l’esprit de la loi, la dérogation s’applique uniquement lorsque le client est bien à l’origine de la demande d’assurance. C’est le cas classique où un client appelle lui-même son assureur par téléphone pour souscrire un contrat en urgence - que ce soit un contrat d’habitation, pour être immédiatement assuré, ou un contrat d’assurance automobile. Elargir le champ d’application de ce texte pourrait entraîner certaines dérives ».
Réponse attendue. Lionel Lefebvre affirme cependant être « déçu » qu’une sanction ait pu être prononcée, puisque « ni l’information contractuelle, ni le conseil dispensé aux prospects, critères essentiels pour évaluer l’activité d’un intermédiaire, n’étaient mises en cause, seul étant visé le moment de la remise d’une documentation ». Selon l’avocat, « cette interprétation est en contradiction avec la directive sur le commerce électronique de 2002, à la liberté contractuelle, et n’aurait en réalité aucune incidence sur la protection des assurés ». Le pourvoi devant le conseil d’Etat envisagé par Provitalia permettra de répondre.