
Opérations immobilières et TVA sur marge : Bercy clarifie le régime d'application

Bercy a été invité par le biais d’une question ministérielle, à clarifier le régime d’application de la TVA sur marge relative aux opérations de cession de terrains (Question ministérielle, n°35380 publiée au JOAN du 29 décembre 2020, p. 9667). Les ventes d’immeubles soumises à TVA relèvent d’une TVA calculée soit sur le prix de cession, soit sur la marge. Conformément à l’article 268 du Code Général des Impôts (CGI), correspondant à la transposition en droit interne de l’article 392 de la directive communautaire du 28 novembre 2006 relative au système commun de TVA, le régime de la TVA sur la marge s’applique lors de la revente d'un terrain initialement acquis auprès d'un particulier, sur la seule partie du prix représentant les travaux de viabilisation réalisés en vue d'une revente à un promoteur, à un bailleur ou à une collectivité. Ces textes excluent expressément de l'assiette de la TVA la fraction du prix de revente représentant l'acquisition faite initialement auprès d'un particulier.
Une condition d’identité
Or l’administration fiscale a ajouté une condition d’identité pour l’application du régime de la TVA sur marge, exigeant que la qualification juridique n’ait pas été modifiée entre leur acquisition et leur revente. Au regard de cette doctrine, lorsque des parcelles bâties sont transformées, après démolition, en terrains à bâtir, la cession de ces terrains relève de la TVA établie sur le prix total de vente. La doctrine de l’administration fiscale a notamment été affinée et confirmée par le biais de plusieurs réponses ministérielles. (Rep. Min. Vogel, JO Sénat du 17 mai 2018, n° 04171 et Rep. Min. O. Folarni, JOAN du 24 septembre 2019, n° 01835). Il y a un an, le Conseil d’Etat, appelé à se prononcer sur des opérations de densification réalisées par des marchands de biens ou des lotisseurs, a confirmé que la transformation d’un terrain bâti en terrain à bâtir, rend impossible l’application du régime d’exception de la TVA sur marge (CE, 27 mars 2020, n°428234, Promialp). Depuis, le juge administratif a confirmé cette jurisprudence (CE, 1er juillet 2020, n° 431641, SARL RGMB).
Une situation dommageable
Cette condition alourdit la fiscalité de l'aménagement des territoires et pénalise tout particulièrement les opérations de recyclage urbain, a souligné le parlementaire à l’origine de cette réponse ministérielle. Elle entraîne simultanément une importante perte de ressources pour les collectivités privées de la quasi-totalité des droits de mutation à titre onéreux a-t-il également souligné. L’enjeu est d’importance et a conduit, dans le cadre d’un schéma un peu différent, le Conseil d’Etat a sursoir à statuer et à poser une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) sur l’interprétation des dispositions communautaire s'agissant de la notion de terrain.
La position actuelle de Bercy
Dans sa réponse (Rep. Min., n°35380 publiée au JOAN du 2 mars 2021, p. 1870) Bercy botte en touche et renvoie à la doctrine actuelle de l’administration fiscale, précisant en outre qu’étendre le régime de taxation sur marge à des opérations immobilières qui n'y sont pas éligibles entraînerait une érosion substantielle de l'assiette de la TVA et, par voie de conséquence, une perte de recettes pour l'État. Bercy renvoie également à la future réponse de la CJUE s'imposera à tous les États membres qui ont recours au dispositif de l'article 392 de la directive TVA, et conclut que dans cette attente il n'est pas envisagé de faire évoluer le dispositif de taxation sur la marge des opérations immobilières dans l'intervalle.