
« Les investissements immobiliers dans le viseur de la convention »

L’Agefi Actifs.- Quels sont les axes directeurs de ce nouveau traité ?
Marie-Laure Bruneel. - La nouvelle convention ne laisse rien au hasard et contient les normes les plus strictes en termes de lutte contre l’évasion fiscale. Ainsi son article 28 prévoit une clause générale anti-abus selon laquelle l’administration fiscale peut refuser d’octroyer des avantages conventionnels si elle établit que le bénéfice de l’avantage conventionnel était l’un des objectifs principaux du schéma ayant entraîné directement ou indirectement l’octroi de cet avantage. Cela vise les comportements de « treaty shopping », qui consistent pour une personne physique ou une personne morale à vouloir tirer parti des avantages prévus par la convention pour obtenir des bénéfices auxquels elle n’aurait pas droit autrement. La nouvelle définition de la résidence devrait également limiter les abus.
Comment est définie la résidence ?
- Pour être considéré comme résident d’un des deux Etats, et donc bénéficier des dispositions conventionnelles, il importe d’être assujetti à l’impôt dans un des deux Etats en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de son lieu d’exploitation. Une dérogation est toutefois prévue pour les entités luxembourgeoises non soumises à l’impôt sur les sociétés, comme les organismes de placement collectifs (OPC) qui peuvent se prévaloir des dispositions relatives aux dividendes et aux intérêts de source française lorsqu’ils sont assimilés par la législation française à ses propres OPC. Mais surtout, la convention exclut de la définition de résident le bénéficiaire apparent de revenus, s’il s’avère que les revenus bénéficient en réalité directement ou indirectement à une personne qui ne peut être considérée comme étant résidente.
Quels changements pour les investissements en SIIC et OPCI ?
- La convention vise directement les investissements réalisés via une société luxembourgeoise en actions de SIIC ou SPPICAV en France. Les dividendes remontant ainsi au Luxembourg pouvaient auparavant ne subir qu’une retenue à la source de 5 % (lorsque la société luxembourgeoise détenait au moins 25 % de la société française distributrice). A partir de 2020, ces dividendes seront soumis à une retenue à la source en France au taux de 15 % lorsque le bénéficiaire effectif détient directement ou indirectement moins de 10 % de ce véhicule, et au taux de 30 % en cas de détention de 10 % ou plus du capital. Ce prélèvement devrait donner droit à un crédit d’impôt imputable sur l’impôt sur les sociétés luxembourgeois. Il n’y aura donc plus d’intérêt fiscal spécifique à investir via le Luxembourg.
Quid des investissements via des sociétés à prépondérance immobilière ?
- La convention actuelle permet déjà à la France de taxer les gains d’un résident de Luxembourg issus de l’aliénation d’actions, parts ou autres droits dans une entité qui tire plus de 50 % de sa valeur de biens immobiliers situés en France. La nouvelle convention précise la définition des entités concernées et modifie en particulier la date à laquelle il convient de se placer pour apprécier la prépondérance immobilière. A partir de 2020, seront imposables en France les plus-values qui résultent de l’aliénation de titres de toute entité qui, à tout moment au cours des 365 jours qui précèdent l’aliénation, tirent plus de 50 % de leur valeur, directement ou indirectement, de biens immobiliers situés en France.
Que prévoit la nouvelle clause de participation substantielle ?
- Elle prévoit de taxer en France les gains réalisés par une personne physique résidant au Luxembourg lors de l’aliénation d’actions ou de parts faisant partie d’une « participation substantielle » (plus de 25 %) dans une société française (qu’elle soit à prépondérance immobilière ou non d’ailleurs), si le cédant a été résident de France à un moment quelconque au cours des cinq dernières années précédant la cession. Cette disposition est assez innovante mais pourrait ne pas trouver à s’appliquer, rares étant les investisseurs qui prennent des participations substantielles en direct.