
Les Etats-Unis ravivent l’espoir d’une taxation internationale

Les négociations sur la taxation internationale ont fait un pas de géant. Les Etats-Unis, sous l’égide de sa secrétaire au Trésor, Janet Yellen, ont plaidé pour l’instauration d’un taux plancher d’imposition des sociétés au niveau mondial et transmis à l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) une proposition visant à taxer les grandes multinationales, dont les géants du numérique. Le G20 Finance, qui se réunissait à l’occasion des réunions de printemps du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque Mondiale, a réitéré son engagement à parvenir à un accord d’ici mi-2021.
Deux piliers
Cette nouvelle a été saluée jeudi par Bruno Le Maire, le ministre français de l’Economie et des Finances, se félicitant du fait que les Etats-Unis ont rejoint la position de la France et de l’Europe. La volonté des Etats-Unis d’arriver à un accord sur les deux piliers (pilier 1 : taxation des grandes multinationales, dont les géants du numérique ; pilier 2 : taux plancher d’imposition des sociétés au niveau mondial) change clairement la donne et ouvre la voie à un accord.
L’administration Biden a présenté sa réforme fiscale, qui vise à financer son vaste plan d’infrastructure (2.250 milliards de dollars), dans laquelle il projette un relèvement de l’impôt sur les sociétés à 28% (ramené de 35% à 21% par Donald Trump) et un doublement du taux minimum d’imposition des bénéfices générés à l’étranger, de 21% (dispositif GILTI). Autre changement majeur, cette taxation minimale sera appliquée pays par pays et non plus en fonction de la moyenne des taxes dans les différentes localisations, comme c’était le cas dans la réforme fiscale adoptée par l’administration Trump. Cette approche, jugée plus juste et efficace, devrait permettre d’accélérer un accord à l’OCDE, en charge des travaux sur la taxation internationale.
Pour éviter une fuite de leurs multinationales, les Etats-Unis souhaitent désormais l’instauration d’un taux minimum d’imposition des sociétés au niveau mondial. Bruno Le Maire s'est dit ouvert à un taux plus élevé que celui retenu jusqu’à présent de 12,5% (taux d’imposition des sociétés dans certains pays, dont l'Irlande) mais ne s’est pas prononcé sur le niveau de 21% proposé par les Etats-Unis, dont le projet doit encore passer sous les fourches caudines du Congrès américain. Le ministre français a aussi insisté sur la nécessité de parvenir à un accord global incluant les piliers 1 et 2.
Abandon de la clause de refuge
Au-delà d’un taux minimum, les grands gagnants de la crise, principalement les géants du numérique, doivent payer leur juste part d’impôt. L’abandon par l’administration Biden de la clause de refuge (safe harbour) réclamée par son prédécesseur à la Maison-Blanche, qui permettait aux groupes américains de choisir ou pas de se soumettre à la nouvelle taxe et donc d’enterrer le projet, a relancé les réflexions sur l’instauration d’une taxe Gafa au niveau international. Le Trésor américain a transmis à l’OCDE ses propositions.
L’objectif serait de taxer les bénéfices mondiaux des plus grandes multinationales, dont les géants du numérique en fonction de leur présence physique dans un pays, selon le Financial Times. Une des difficultés de la taxation des activités liées au numérique est de distinguer celles dont les profits sont liés au numérique. Les Etats-Unis proposent d’imposer les plus grandes entreprises et les plus profitables au niveau mondial, quel que soit le secteur. Une centaine de multinationales seraient concernées par ce projet, et pas seulement des géants du numérique. Le champ couvert par la proposition américaine semble plus vaste et touche davantage d'entreprises que celles concernées par le projet en discussion à l’OCDE, a précisé Bruno Le Maire. Bercy veut néanmoins s’assurer que les propositions américaines permettent d’inclure tous les géants du numérique. La taxe Gafa française sera maintenue tant qu’il n’y aura pas d’accord global.