Évasion fiscale

Les avancées se précisent en France et à l’étranger

Un nouveau volet autorisant l’utilisation de fichiers dérobés sera envisagé par l’exécutif. Les rencontres internationales ont donné lieu à des avancées sur l’échange automatique d’informations.

La plupart des dispositions du projet de loi portant sur l’évasion fiscale ont été présentées le 24 avril dernier. Dans l’ensemble, l’exécutif s’est tenu à la plupart des pistes déjà annoncées (L’Agefi Actifs, n°585, p.6). La principale nouveauté introduite depuis concerne l’utilisation de toutes les sources d’information portées à la connaissance de l’administration fiscale.

Pour l’heure, la question de la rétribution des informateurs n’a pas été tranchée. Devant la Commission des finances, le ministre du Budget a confirmé travailler « sur plusieurs pistes », sans pour autant être en mesure « d’annoncer des décisions qui n'ont pas encore été arbitrées ». Pour mémoire, cette faculté est déjà ouverte aux Douanes et, comme le rappelle le magistrat Charles Prats, la législation américaine autorise de son côté à rémunérer l'informateur des services fiscaux jusqu'à 30 % des sommes récupérées. En revanche, le fisc n’aura toujours pas la possibilité d’introduire lui-même des vérifications sur la base de preuves illicites, ces dernières devant lui être transmises par une autorité judiciaire ou dans le cadre d’une assistance administrative internationale.  

Création d’un parquet fiscal.

Sur un plan judiciaire, la création d’un parquet fiscal sera officialisée en Conseil des ministres le 7 mai prochain. Il aurait une compétence nationale sur les affaires de fraude fiscale. L’éventualité d’une auto-saisine a été écartée, ce parquet devant attendre le dépôt d’une plainte de la part de Bercy, elle-même soumise à examen de la part de la Commission des infractions fiscales. Il est annoncé également qu’un Office central de lutte contre la fraude et la corruption intégré au sein de la police judiciaire disposerait de pouvoirs d’enquête étendus comme l’infiltration, les écoutes téléphoniques et la garde à vue. La Brigade nationale de répression de la délinquance fiscale (BNRDF), dont la compétence sera étendue au blanchiment de fraude fiscale, intégrera ce nouvel office. 

Vérification de résidence.

Le législateur n’est pas en reste sur la question. Le 16 avril dernier, la Commission des finances de l'Assemblée nationale a pris acte de la création d'une mission d'information sur la fraude fiscale des personnes physiques dont la responsabilité sera confiée à Gilles Carrez et Christian Eckert, respectivement président et rapporteur de la Commission des finances. Ce dernier a par ailleurs rappelé la nécessité « d'appliquer correctement certaines règles relatives à la vérification de résidence ». Selon lui, les conditions minimales de résidence et la localisation des centres d'intérêts économiques, qui font partie des conditions pour être résident fiscal, « ne sont le plus souvent pas remplies et peu vérifiées »(1). 

Echange automatique.

Les rencontres internationales, tenues à l’occasion de l’Ecofi le 13 avril ou du G20, une semaine plus tard, ont été l’occasion d’avancer sur la mise au point d’un échange automatique d’informations. L’OCDE travaille ainsi à la définition d’un système de ce type qualifié de « standardisé, fiable et efficace ». Pour les derniers récalcitrants européens, il est certain qu’à partir du 1er janvier 2015, le Luxembourg, à l’image de ses voisins européens, excepté l’Autriche, procédera à un échange automatique portant sur les paiements d’intérêts versés aux seules personnes physiques. Comme tous les pays de l’Union, l’Autriche échangera automatiquement des données sur au moins trois catégories de revenus parmi les salaires, les pensions, les jetons de présence, les revenus d’assurance vie et les revenus immobiliers.  

Convention sur les successions.

Concernant la Suisse, une évolution a porté sur l’annonce par le ministre français de l’Economie d’une prochaine signature de la convention révisée sur les successions entre la France et la Suisse (L’Agefi Actifs n°554, p. 4). Pour mémoire, le droit applicable en matière de succession serait celui du pays de résidence du bénéficiaire, et non plus le pays où réside le défunt. Déjà, des réserves s’élèvent, l’une tenant son origine dans le texte adopté cet été par le Parlement européen (2) en vertu duquel il est convenu que la loi applicable à l’ensemble d’une succession est celle de l’Etat dans lequel le défunt avait sa résidence habituelle au moment de son décès. Enfin, et même si la convention doit s’appliquer au 1er janvier 2014, l’accord devra encore être ratifié par les deux chambres de l’Assemblée fédérale.

(1) Sur son blog, il a également annoncé des déplacements au sein de l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP) et de Bercy pour consultations respectives du dossier UBS et du fichier HSBC afin de savoir si ce dernier avait été « expurgé » avant d'être utilisé par les services de Bercy et de connaître les poursuites pénales engagées.

(2) UE 650/2012.