Immobilier coté

Le secteur doit s’efforcer de neutraliser la décote

En analysant dix foncières cotées en Europe, Mazars a cherché à comprendre les raisons de leur décote en Bourse. Elles sont invitées à améliorer leur communication financière pour rassurer les investisseurs.

Assistée par Serge Demirdjian, analyste financier immobilier chez Natixis, la société d’audit et de conseil Mazars a cherché à expliquer, à partir de l’analyse d’un panel de dix foncières cotées en Europe, (six en France, trois au Royaume-Uni et une aux Pays-Bas), les raisons de la décote persistante de ces véhicules - c’est-à-dire de l’écart entre leur actif net réévalué (ANR) et leur cours de Bourse - et la manière de la réduire.

Des comparaisons pour expliquer la décote.

Parmi les données examinées par Mazars à partir des informations communiquées par les foncières, deux éléments, en dehors de la liquidité du titre, paraissent influencer cet écart, constituant des facteurs de risque de baisse future des valorisations des actifs. Semblent sanctionnés par les marchés une exposition trop forte à des pays considérés comme sensibles (Grèce, Italie, Espagne, Portugal) et un endettement élevé, apprécié par le ratio loan-to-value (LTV), même si le lien n’est pas toujours démontré.

En revanche, le coût moyen de la dette et sa durée moyenne ne paraissent pas constituer une composante essentielle de la décote.

Risques pour tout le secteur immobilier.

Serge Demirdjian identifie deux autres risques pouvant peser sur les valorisations : la capacité du secteur à se refinancer et les aléas entourant la fiscalité des foncières. Concernant ce qui est communément appelé « le mur de la dette », la question n’est pas nouvelle, mais « centrale », selon l’analyste. D’après CB Richard Ellis, 180 milliards d’euros de dette vont arriver à échéance en Europe en 2012, puis 170 et 130 milliards d’euros en 2013 et en 2014. Le phénomène de ventes massives d’actifs qui pourrait s'enclencher, si les banques n’acceptent pas de refinancer l’intégralité des actifs, pèsera sur la valorisation de tout le secteur. Un risque « un peu moins présent » grâce aux deux opérations de refinancement à long terme (LTRO) menées par la Banque centrale européenne (BCE) ces six derniers mois.

Autre source d’inquiétude aujourd’hui, la remise en question du statut Siic en France et la possible obligation des foncières cotées de détenir un minimum d’actifs résidentiels en portefeuille.

Une communication plus transparente pour plus de visibilité sur le titre.

Quelles que soient les méthodes d’évaluation utilisées, les analystes ont besoin d’une information claire et complète. « Moins la société communique de façon précise sur ses objectifs, plus les attentes de résultats sont disparates, et moins il existe de consensus autour de sa valorisation cible », explique Serge Demirdjian.

Pour prévoir les loyers, par exemple, il convient de connaître la maturité moyenne des baux, la vacance, l’indexation applicable et toute information permettant d’appréhender un risque ou une opportunité. Mis à part le degré de dépendance à l'égard de certains clients, Mazars juge les données diffusées par les foncières sur ces sujets, bien que pas toujours comparables d'une société à une autre, globalement satisfaisantes. Autre agrégat important, l’estimation des charges financières. Si l'information est disponible, les professionnels attendent plus de détails quant à l'échéancier des dettes contractées.

Enrayer la fatalité.

Par une communication financière « précise, exhaustive et courageuse », les sociétés peuvent avoir une influence indirecte sur la décote. Elles peuvent même agir, pour les plus liquides d’entre elles, de manière plus directe, en mettant en place une politique régulière de rachats d’actions pour augmenter l’ANR par action. « Si une valeur se traite avec une importante décote alors que, dans le même temps, la foncière arrive à confirmer ses valeurs d’expertises lorsqu’elle vend un actif (1), pourquoi ne pas profiter d’une partie des produits de cession pour racheter ses propres actions ? », propose Serge Demirdjian. Un message de confiance qui, selon l'analyste, serait un moyen efficace de montrer au marché qu’il se trompe sur la valorisation de la société et pousser les investisseurs à réduire peu à peu la décote ANR/cours de Bourse.

(1) Le panel montre une marge de 4,9 % sur les cessions de l’exercice 2011 par rapport aux valeurs IFRS des actifs au 31 décembre 2010.