
Le notaire doit veiller à l’accomplissement des formalités nécessaires aux sûretés

Un couple a acquis un ensemble immobilier, en indivision pour la nue-propriété, à concurrence respectivement de 38 % et 62 %, et en tontine pour l’usufruit. Le mari, artisan, a financé l’acquisition de sa part au moyen d’un prêt garanti par un privilège de prêteur de deniers. Ce privilège a été inscrit par le notaire sur la seule quote-part du mari. Celui-ci a été placé en liquidation judiciaire. Après avoir déclaré sa créance, la banque a assigné le couple en partage de l’indivision existant sur l’immeuble, et le notaire en responsabilité et indemnisation. La banque forme un pourvoi en cassation reprochant à l’arrêt de Cour d’appel de rejeter sa demande de dommages-intérêts formée à l’encontre du notaire.
Pour rejeter la demande de la banque, la Cour d’appel expliquait que l’acte prévoyait « l’inscription du privilège de prêteur de deniers sur l’entier immeuble et précisait que [la femme] était informée que l’inscription prise contre [son mari] portait sur la totalité du bien ». L’arrêt retenait que « la publicité foncière est destinée à l’information des tiers et à leur rendre opposables les conventions portant sur les droits réels et les sûretés et que, dès lors, le caractère restrictif de l’inscription litigieuse, tenant aux règles issues du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955, est sans incidence sur les droits que la banque tient du titre ».
Mais la Cour de cassation dans une décision du 9 janvier 2019 (17-27.411) casse et annule cet arrêt de Cour d’appel au visa des articles 1382 (devenu 1240 du code civil) ensemble les articles 815-17, 2377 et 2379, alinéa 1er, du même code. Elle rappelle que « le notaire, tenu d’assurer l’efficacité des actes auxquels il prête son concours ou qu’il a reçu mandat d’accomplir, doit, sauf s’il en est dispensé expressément par les parties, veiller à l’accomplissement des formalités nécessaires à la mise en place des sûretés qui en garantissent l’exécution ». Or le fait que le privilège de prêteur de deniers soit inscrite sur la seule part [du mari], « la banque avait, à l’égard des tiers, la qualité de créancier personnel du coïndivisaire emprunteur, de sorte qu’elle ne pouvait exercer son droit de poursuite sur l’immeuble indivis ».