Immobilier d’entreprise

Le marché locatif des bureaux s’ajuste au contexte économique

Attentistes, beaucoup d’entreprises reportent leurs projets, privilégiant une renégociation des conditions du bail - Inquiets, les propriétaires entendent garder leurs locataires et sont prêts à diminuer les loyers faciaux.

Si l’année 2011 a été portée par des très grandes transactions à l’instar des prises à bail des groupes Thalès ou SFR, 2012, en revanche, ne brillera pas, comme prévu, par son activité. Avec un peu plus de 960.000 m_ échangés au premier semestre, soit une baisse de 18 % par rapport aux six premiers mois de l’année 2011, le marché locatif des bureaux en Ile-de-France fait état d’une santé peu vigoureuse. Juillet et août n’ont évidemment pas changé la donne. Au total, le conseil en investissement CB Richard Ellis comptabilise sur les huit premiers mois de l’année une demande placée de 1.284.837 m_, soit une baisse de 14 % par rapport à la même période en 2011.

C’est donc à une année médiocre que s’attendent les professionnels du secteur. Elle suivra, au mieux, les pas de l’année 2010 (2,15 millions de m_), au pire ceux de l’année 2009 (1,9 million de m_). Déjà fragilisé par l’activité économique, le marché locatif semblait toutefois résister, en 2011, à un fléchissement de ses loyers. Une résistance de façade, certes, puisque ces loyers faciaux (ceux inscrits dans le bail) étaient assortis d’importantes mesures d’accompagnement.

En 2012, la situation ne fait plus place au doute : le marché commence à ajuster ses valeurs à un tableau économique toujours en demi-teinte.

Pas de grandes opérations pour soutenir le marché.

A part trois grandes transactions, l’une initiée par Thalès portant sur 49.000 m_ à Vélizy (le groupe avait déjà pris à bail 87.500 m_ à Gennevilliers l’année dernière), une autre signée par Sanofi pour 50.000 m_ et une dernière mise en route par le Ministère de la Justice en décembre 2011 (et comptabilisée sur 2012) en vue de la construction d’un immeuble de bureaux de 32.000 m_ par la foncière Icade dans le 19e arrondissement de Paris, peu d’opérations significatives sont venues en soutien du marché locatif cette année. La levée des conditions suspensives sur le permis de construire du siège de Veolia Environnement à Aubervilliers pour une surface de 80.000 m_ avant la fin de l’année constituerait une bonne surprise mais ne changera toutefois pas l’orientation de l’activité locative qui se maintiendra aux alentours de 2 millions de m_, contre plus de 2,4 millions de m_ en 2011.

A l’heure actuelle, les sociétés sont en phase de questionnement, gelant leurs projets immobiliers ou les reportant à moyen terme. « Compte tenu de l’absence de visibilité quant à leurs perspectives, beaucoup d’utilisateurs font le choix de rester dans leurs locaux plutôt que d’engager un vrai projet de déménagement qui s’accompagne par ailleurs, le plus souvent, d’une réorganisation dans l’entreprise »,explique Laurence Bouard, directeur études et recherche chez AOS Studley.

Un rapport de force en faveur des locataires.

De leur côté, « les propriétaires, très inquiets à l’idée du vide locatif qui pourrait survenir dans leur immeuble, sont prêts à consentir des efforts spectaculaires pour retenir leurs clients ou en séduire de nouveaux, plus importants encore que par le passé, en faisant preuve, parfois, d’une étonnante imagination : franchises de loyers, travaux de rénovation, décalage de la prise d’effet du bail, transfert des engagements restants du preneur vers le nouveau propriétaire (notamment pour des questions de comptabilité en normes IFRS)… », explique Jacques Bagge, directeur du département agence France chez Jones Lang LaSalle en France. Rien ne semble démesuré lorsqu’il s’agit de maintenir le niveau des loyers faciaux et, par la même occasion, la valorisation d’un immeuble - qui se calcule par le rapport du loyer sur un taux de rendement. Mais l’environnement économique, dégradé depuis maintenant près de cinq ans, rattrape les propriétaires, qui se trouvent aujourd’hui dans l’obligation d’ajuster les valeurs locatives à la réalité du marché. Ainsi, même s’il existe des exceptions, à Paris quartier central des affaires (QCA) en particulier, les loyers faciaux sont, eux aussi, orientés à la baisse.

Les craintes des bailleurs ne sont d’ailleurs peut-être pas injustifiées car si le stock d’offres immédiatement disponibles semble ne jamais varier (aux alentours de 3,66 millions de m_ ; sur un parc estimé à 53 millions de m_, cela correspond à une vacance inférieure à 7 %), le stock d’offres à 12 ou 18 mois est, lui, en augmentation. En considérant cet indicateur, Jacques Bagge parle plutôt d’un taux de vacance tournant autour de 8,5 %, avec évidemment des différences extrêmement marquées entre les zones géographiques.