La proposition de loi sur l’assurance emprunteur revient dans une version remaniée

Le texte de Patricia Lemoine sur la résiliation à tout moment passe en procédure simplifiée avec la bénédiction du gouvernement.

Elle a maintenant de bonnes chances d’être adoptée sous cette législature. La proposition de loi de Patricia Lemoine (Seine-et-Marne ; Agir) visant à libéraliser le marché de l’assurance emprunteur (2) revient sous de nouveaux oripeaux. Mais cette fois, avec l’approbation du gouvernement. «Ma proposition de loi est le fruit de nombreux échanges avec le ministère de l’Economie sur la partie "résiliation à tout moment de l’assurance emprunteur" et avec les services du Premier Ministre s’agissant de celle sur le droit à l’oubli, indique la députée. Je peux donc aujourd’hui en effet compter sur leur soutien car ce texte remplit un double objectif dans cette période si particulière : redonner du pouvoir d’achat aux Français et renforcer les droits des publics affectés par la maladie, sans que cela n’obère d’un centime les finances de l’Etat.»

Preuve du soutien de la majorité, une procédure simplifiée a été engagée sur le texte. Les discussions seront considérablement accélérées puisqu’elle prévoit la convocation d'une commission mixte paritaire dès la fin de la première navette parlementaire et qu'elle limite à deux le nombre de lectures par Chambre, avant que l’Assemblée nationale n’ait le dernier mot.

En contrepartie de cet appui décisif, la proposition de loi a subi un petit lifting. L’essentiel des mesures sont conservées, dont la principale : la résiliation infra-annuelle (RIA)  de l’assurance-emprunteur, sans frais et à tout moment. La députée veut pousser le curseur plus loin que la loi Hamon qui permet de changer d’assurance dans l’année qui suit la signature du prêt, et que l’amendement Bourquin (à chaque échéance annuelle du contrat). La RIA version Lemoine serait toujours soumise à l’équivalence des garanties entre ancien et nouveau contrat posée par la loi Lagarde. Les banques, parfois évasives en cas de refus de substitution, devraient motiver de façon détaillée leur décision. Une amende administrative sanctionnerait le prêteur qui induit son client en erreur, ne lui répond pas ou hors délai (3.000 euros pour une personne physique, 15.000 euros pour une personne morale). Les assureurs, de leur côté, seraient redevables d’une obligation d’information annuelle des assurés sur leur droit à demander une RIA, avec la même sanction en cas de manquement.

Le droit à l’oubli se greffe

Un ajout notable au texte initial concerne le droit à l’oubli, qui permet aux personnes anciennement atteintes d’une pathologie cancéreuse de ne pas être pénalisées lors de l’emprunt. Les instances de la convention Aeras (s’Assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé) devraient lancer des travaux pour réduire les délais concernés et examiner la possibilité de faire rentrer davantage de pathologies – non cancéreuses – dans la grille de référence. L’évolution du montant maximum autorisé pour l’emprunt (320.000 euros) serait aussi discuté au regard des avancées scientifiques et des données de santé disponibles. «Pour éviter tout effet pervers à cette voie conventionnelle, le gouvernement pourra prendre le relai si aucune avancée n’est constatée dans les neuf mois qui suivent l’adoption de la loi», ajoute la députée.

Le résultat des recherches sera présenté dans un rapport remis au gouvernement dans les neuf mois. Trois mois plus tard, ce serait au tour de l’exécutif de présenter au Parlement différents dispositifs d’études afin d’agréger les données disponibles sur la mortalité et la morbidité dans une optique de tarification du risque.

Une absence remarquée

Deux articles manquent à l’appel, retirés «au regard de leur complexité de mise en œuvre ou de leur insécurité juridique», argue Patricia Lemoine. La dissociation de l’assurance du taux annuel effectif global (TAEG) pour l’intégrer au sein du taux annuel effectif d’assurance (TAEA) visait à comparer plus facilement le poids de l’assurance dans le coût global du crédit. Elle a été purement et simplement supprimée. La suppression de l’avenant au contrat de prêt pour matérialiser le changement d’assurance - considéré comme un frein psychologique pour le client - laisse place à un délai maximum de dix jours ouvrés pour produire ledit avenant.
Le délai d’entrée en vigueur de l’ensemble des mesures a été repoussée, de six mois à un an après promulgation, pour laisser aux acteurs le temps d’anticiper.

L’Apcade sort du bois

Après l’échec des négociations sur la RIA au Comité consultatif du secteur financier (CCSF), l’Apcade, partie aux négociations, s’est officiellement rangée derrière le texte de la députée. «Nous saluons l'introduction de dispositions relatives au droit à l'oubli dans la proposition, a réagi Catherine Charrier Leflaive, présidente de l’Apcade. Néanmoins, nous regrettons la suppression des articles visant à donner une information plus transparente à l’emprunteur, et nous souhaitons notamment qu’il ne soit plus possible de modifier l’amortissement du crédit suite à un changement d’assurance.»

La proposition de loi sera examinée par l’Assemblée nationale à partir du 25 novembre prochain, lors de la niche parlementaire du groupe Agir ensemble.

(2) Anciennement proposition de loi visant à garantir la transparence et la simplification du marché de l’assurance-emprunteur immobilier, maintenant proposition de loi pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l’assurance emprunteur