
La lutte contre le blanchiment de capitaux reste fragmentée en Europe

Dans un rapport spécial rendu ce lundi, la Cour des comptes européenne considère que l'action menée par l'Union européenne (UE) pour lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme « présente des faiblesses ». La Cour note que « le cadre de surveillance de l'Union est à ce point fragmenté et mal coordonné qu'il ne permet pas de garantir une approche cohérente ni une égalité de traitement ». Alors même qu’à l'échelle de l'Europe les transactions suspectes représentent un montant estimé à plusieurs centaines de milliards d'euros, l'UE suit une approche « fragmentée » pour prévenir et combattre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, estime la Cour.
Actuellement, les pouvoirs de l'UE en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme sont répartis entre plusieurs acteurs. La Commission européenne élabore la politique dans ce domaine et supervise sa transposition dans le droit des Etats membres et se charge également de l'analyse des risques. Mais « les auditeurs ont pointé des faiblesses dans l'exécution de ces missions », explique la Cour. « La législation relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux est complexe et a été mise en œuvre trop lentement et de manière trop inégale dans l'UE », regrettent les auteurs du rapport. Celui-ci souligne aussi que jusqu'à présent, l'UE n'a pas adopté de liste autonome des pays tiers à haut risque, c'est-à-dire des pays représentant une menace sérieuse de blanchiment de capitaux pour le marché intérieur.
Outre la Commission, l'Autorité bancaire européenne (ABE) a le pouvoir d'enquêter sur les violations potentielles du droit dans ce domaine. « Toutefois, souligne la Cour, depuis 2010, elle n'a conclu qu'une seule fois à une violation effective du droit de l'Union en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, et n'a jamais mené d'enquête de sa propre initiative dans ce domaine ». Les auditeurs de la Cour des comptes européenne ont aussi trouvé « des indices de tentatives de lobbying auprès de membres du conseil des autorités de surveillance ».
Enfin, si l’institution se félicite que la Banque centrale européenne (BCE), responsable depuis 2014 de la surveillance directe des banques importantes, partage les informations pertinentes avec les autorités nationales de surveillance, elle déplore que l'institution n'ait « ni la responsabilité ni le pouvoir d'enquêter sur la manière dont ces autorités utilisent les informations reçues ».