« La loi Macron nous permet d’être ambitieux dans notre démarche entrepreneuriale »

Xavier Fromentin, notaire, fait part de ses projets, notamment celui de créer une société titulaire de plusieurs offices, et une maison du droit avec des avocats
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L’Agefi Actifs - Notaire de 39 ans, en quoi la loi Macron vous a décidé à faire évoluer votre modèle de société notariale?

Xavier Fromentin - Tout d’abord, je précise que je suis notaire salarié de la structure en raison de l’avantage présenté par ce statut, et que c’est mon épouse qui est seule associée de l’étude, une étude créée en 2011. La loi Macron a été un élément déterminant pour la profession, dès les annonces d’Arnaud Montebourg en 2014. C’est une loi qui est pour nous, situé dans le secteur porteur de Nantes, source d’opportunités importantes. Elle nous a permis d’être ambitieux dans notre démarche entrepreneuriale, et nous a ainsi conduit à établir un plan stratégique sur cinq ans. Dans ce cadre, nous avons en projet l’acquisition de 100% d’une étude notariale nantaise. En outre, j’ai été tiré au sort à Nantes et devrais ainsi m’y installer prochainement. Notre projet est de créer ce que la réforme Macron nous permet : une société titulaire de plusieurs offices notariaux. En effet, notre société d’exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) sera titulaire de l’office de Treillières, ainsi que de celui de Nantes, lui sera apporté. En conséquence, nous mutualiserons un certain nombre de services tels que le standard téléphonique, la comptabilité ou encore le pôle de négociation immobilière. En outre, nous tenterons de spécialiser les deux offices, à savoir le patrimoine et l’entreprise à Nantes, l’immobilier professionnel et des particuliers à Treillières. Ainsi, conformément à l’esprit de la loi Macron, nous créons une nouvelle étude dans le cadre d’un projet cohérent, ambitieux et murement réfléchi. Notre modèle repose non pas sur la production d’actes en masse, mais sur la valeur ajoutée de nos services spécialisés au profit de nos clients.

La loi Macron vous a aussi amené à intégrer davantage de notaires dans votre projet ?
Nous avons intégré à l’équipe deux nouveaux notaires salariés que nous comptons associer dans les cinq ans qui viennent. C’est donc un partage du travail puis du capital que nous mettons en œuvre. Je rappelle que notre étude n’a que 6 ans d’existence…
Vous avez aussi en projet la création d’une maison du droit, en vous associant à des avocats. Pouvez-vous expliquer votre démarche ?
Depuis le début de l’année, un cabinet d’avocats est venu s’installer dans nos locaux, en respectant bien entendu un certain nombre de règles telles que des entrées séparées. Ils sont deux avocats judiciaires, l’un spécialisé en contentieux commercial, l’autre en droit des personnes et de la famille. L’objectif étant qu’à terme un lien capitalistique s’établisse entre nous. Nous devrions prendre, au travers d’une société de participations financières de professions libérales (SPFPL), une participation dans le cabinet. Pour l’heure, nous travaillons avec eux sur des procédés communs, notamment en matière de divorce par consentement mutuel : les divorces sont signés par acte d’avocats puis transmis ensuite à notre office pour être homologués. Notre partenariat permet une réelle fluidité du traitement de ces dossiers.

Si votre projet de SPFPL se construit, cette structure aura-t-elle vocation à s’agrandir, notamment en y adjoignant un expert-comptable ?
Concernant l’intégration éventuelle d’un expert-comptable, nous y avons moins intérêt qu’un avocat, car en s’alliant avec un expert-comptable, nous risquerions de voir s’éloigner nos autres prescripteurs experts-comptables. Par ailleurs, nous nous sentons plus proches des avocats ou des autres professions juridiques, que des experts-comptables ou des commissaires aux comptes : cela provient probablement du fait que nos métiers et nos formations sont plus éloignés. D’autres études notariales situés dans d’autres zones géographiques pourraient également nous rejoindre. A titre d’illustration, l’étude de Cholet du Groupe Monassier qui dispose d’un bon rayonnement dans sa région pourrait participer à ce projet de concentration. Appartenant au même réseau, nous avons le même ADN, sommes situés dans des zones géographiques stratégiques voisines. Et puis personnellement, mais c’est nécessaire, les associés de cette étude sont des amis. Des synergies existent donc sans aucun doute.

La loi Macron est source d’opportunités pour vous, mais la baisse des tarifs et l’augmentation du nombre des notaires vont-ils vous impacter de manière significative ?
Nous avons la chance d’être situés dans une région qui n’est pas trop impactée par cette baisse des tarifs, et le contexte économique est actuellement favorable. Nous ne ressentons donc pas, à l’heure actuelle, les effets économiques de cette mesure. Cependant, nous ne sommes pas dupes. Les arbres ne grimpent pas jusqu’au ciel, et l’économie est fluctuante. En conséquence, pour compenser la baisse du tarif réglementé et donc du chiffre d’affaire attaché à l’activité du monopole (droit immobilier principalement), nous facturons en honoraires libres des services qui ne l’étaient pas par le passé, dans le cadre de lettres de missions systématiques. Par exemple, lors d’une vente immobilière, le client est averti que chaque procuration réalisée donnera lieu à une facturation. Dans une succession, le règlement par nos soins d’une facture, le rapatriement des fonds détenus en banque, ou la réalisation d’un compte de répartition donnera également lieu à la perception d’un honoraires. C’est un des effets pervers de la loi Macron : le législateur a cru que le notaire accepterait de perdre du chiffre d’affaire. Je crois pour ma part que toute baisse du tarif réglementé sera compensée par l’augmentation du coût sur d’autres activités : négociation immobilière, consultations juridiques ou fiscales, … Il ne faut pas oublier qu’un notaire est également un chef d’entreprise.