La fraude aux aides publiques a mobilisé Tracfin en 2020

Jérémie Gatignol
Le nombre de déclarations de soupçon issues du secteur financier est en hausse de 18% en 2020.

Tracfin, la cellule de renseignement financier française, vient de publier son rapport d’activité pour l’année 2020. Une activité en hausse ces dernières années puisque le nombre d’informations a été multiplié par 2,5 depuis 2015. L’an dernier n’a pas dérogé à la règle avec une augmentation de 16% (115.601) du nombre d’informations reçues.

Dans le détail, le nombre de déclarations de soupçon issues du secteur financier était en hausse de 18% en 2020. Il représentait 94% du flux déclaratif total, soit une stabilité par rapport à l’année 2019. Les banques et établissements de crédit demeurent les premiers contributeurs avec 62.033 signalements effectués (+10%) pour un enjeu financier total de 23,9 milliards d’euros.

L’activité déclarative des professions non-financières est stable (+1%), mais ne traduit pas les grandes disparités selon les professions. Ainsi, la baisse du nombre de signalements de certaines professions (notaires, huissiers de justice, professionnels de l’immobilier) est compensée par la hausse du nombre des déclarations de soupçon adressées en 2020 par les greffiers des tribunaux de commerce, nouvellement assujettis au dispositif LCB-FT, et par les opérateurs de jeux en ligne (+61%).

Fraude à l’aide publique

L’année dernière, Tracfin a transmis 3.033 notes d’information et de renseignement à ses partenaires : autorité judiciaire, administrations, services de renseignement et cellules de renseignement financier étrangères. 67.239 actes d’investigation ont été réalisés par les agents du service.

Pandémie oblige, la grosse activité de Tracfin l’an dernier aura été la détection et le traitement de dossiers « présentant des atteintes aux finances publiques et en particulier en matière de fraudes aux dispositifs de soutien à l’activité économique dévoyés à des fins d’escroquerie », explique la cellule dans son rapport. Elle précise que la restitution des typologies de fraude aux déclarants dès le printemps 2020 a permis de diffuser des critères d’alerte destinés à aiguiller les déclarants dans la détection de détournements frauduleux.

Le dispositif de chômage partiel a été particulièrement ciblé par les escroqueries. Tracfin a constaté qu’une majorité des dossiers combinaient à la fois des fraudes au chômage partiel et des fraudes au fonds de solidarité, « ce qui laisse présager l’existence de réseaux organisés de détournement des dispositifs publics mis en place dans le cadre de la crise », souligne le rapport.

Par ailleurs, Tracfin a également détecté une tendance au détournement de subventions publiques délivrées pour la formation professionnelle, notamment dans le cadre de l’activation du compte personnel de formation. 

L’autre gros morceau de la cellule aura évidemment été sa lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (LCB-FT). Plusieurs nouvelles réglementations dans le cadre du dispositif LCB-FT, comme l’encadrement des transactions en cryptoactifs, ont permis l’ouverture de nouvelles informations.

Qu’est-ce que Tracfin ?

Tracfin est la cellule de renseignement financier française placée sous l’autorité de Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance, et d’Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des Comptes publics, ainsi qu’un service de renseignement du 1er Cercle. Le service recueille, enrichit et analyse les informations relatives à des opérations financières suspectes sous l’angle de ses trois missions : la lutte contre la criminalité économique et financière, la lutte contre la fraude aux finances publiques, la défense des intérêts fondamentaux de la Nation. La cellule, qui a fêté ses 30 ans d’existence en 2020, a vu ses effectifs augmenter de 60 % depuis 2015 à 191 agents actuellement.