La Cour des comptes pave la voie pour la réforme de la taxe foncière

Dans son dernier rapport, elle demande de produire un bilan de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels pour anticiper celle des locaux d'habitation.

L'imposition foncière en France représente 60% du total de l'imposition du patrimoine en France, apprend le dernier rapport de la Cour des comptes publié le 27 février. Son rendement se situe parmi les plus élevés d'Europe (54,8 milliards d'euros en 2020), juste derrière le Royaume-Uni (67,2 milliards d'euros). La France gagne cependant la première place du pays dans lequel l'imposition foncière repose le plus largement sur les ménages, qui acquittent 72% du total. En moyenne, un propriétaire est imposé à hauteur de 849 euros sur l'ensemble de ses locaux, pour un taux d'effort qui varie selon les régions : autour de 2% dans l'ouest et l'est de la France mais plus de 3% dans le sud. 

 


Source : Cour des comptes

Ce qui constitue aujourd'hui l'un des derniers leviers fiscaux des collectivités a jusqu'ici connu une progression régulière et peu sensible à la conjoncture économique. Le produit de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) a augmenté de 2,5% par an en moyenne entre 2016 et 2020, celui de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB) de 1,4%. Il est cependant réparti de façon très inégale entre les communes : 87% d'entre elles perçoivent un rendement inférieur au rendement moyen, alors que les 100 communes qui en perçoivent le plus concentrent un quart du total. Ces dernières années, ce sont les départements des Alpes de Haute-Provence (+40 %), des Hauts-de-Seine (+31 %), de la Meurthe-et-Moselle (+30 %), des Hautes-Pyrénées (28 %), de l’Ardèche (27 %) et de l’Aisne (20 %) qui ont connu les évolutions les plus significatives. 

Cette progression stable a été chamboulée en 2023 par la hausse forfaitaire annuelle des valeurs locatives qui, indexée sur l'évolution de l'indice des prix à la consommation et donc de l'inflation, a été de 7,1%.

Source : Cour des comptes

Cette situation va s'accentuer puisque les modalités d'imposition sont appelées à évoluer. Les valeurs locatives cadastrales, assises de l'imposition foncière qui se définit comme le «loyer annuel théorique que pourrait produire un immeuble bâti ou non bâti, s’il était loué dans des conditions normales», vont être révisées d'ici 2028. Inchangées depuis les années 1970, ces valeurs seront révisées selon des modalités similaires à celles utilisées pour la réforme des locaux professionnels en 2017. La nouvelle méthode, déterminée sur la base des loyers effectivement acquittés et qui abandonne la notion de local-type, veut «être plus proche des réalités économiques et de permettre une mise à jour permanente des bases», écrit la Cour des comptes.

Cette méthode a conduit à des variations de cotisations drastiques côté locaux professionnels, dont certains types, comme les magasins de centres commerciaux ou les parcs de stationnement à ciel ouvert ont vu leur cotisation moyenne augmenter de presque 50%. De quoi faire craindre des augmentations similaires pour les locaux d'habitation. «Les modalités de la révision ne prévoient pas, à ce stade, de dispositifs de lissage et de planchonnement», ajoute la Cour des comptes. L'administration demande donc à simuler les effets de la future réforme pour en anticiper les effets. La loi de Finances pour 2020, actant la réforme, prévoit la remise d'un rapport au Parlement d'ici 2026 qui l'aborde, notamment en ce qui concerne les transferts de fiscalité entre catégories de contribuables et les effets de la révision sur le budget des collectivités territoriales. «Il serait utile que ce rapport établisse un bilan de la révision de la valeur des locaux professionnels [...] en tenant compte des substantielles évolutions relatives à la fiscalité locale, écrivent les auteurs du rapport. Il serait utile de tirer les enseignements des paramètres retenus pour la mise à jour des loyers (niveau de filtrage) et des modalités de collecte du montant des loyers (restriction aux seuls occupants) afin d’améliorer la fiabilité et la robustesse des données.» L'une des faiblesses potentielle de la future évaluation porte sur les zones marquées par une forte proportion de propriétaires occupants et l'absence de marché locatif.