
La Cour de Cassation apporte des précisions sur le devoir de conseil

Obligation d'information ou de conseil, devoir de mise en garde.. Les bornes de la responsabilité des professionnels vis-à-vis de leurs clients sont règulièrement dessinées par la jurisprudence. Dans un récent arrêt, un emprunteur a sollicité - après des échéances demeurées impayées suite à son licenciement - l'annulation d'un contrat de prêt pour manquements de la banque à son obligation de mise en garde lors de l'octroi du prêt et à son obligation d'information et de conseil (1).
L'arrêt écarte un manquement au devoir de mise en garde de la banque, dont celle-ci n'est tenue qu'à l'égard des emprunteurs non avertis. Ici, le demandeur était associé majoritaire d'une société qu'il avait créé ayant pour objet la transaction immobilière et était gérant d'une SCI ayant pour objet la location de terrains. L'exercice de ces fonctions lui a permis d'acquérir une «expérience professionnelle et une connaissance certaine du monde des affaires» et il doit être à ce titre considéré comme un emprunteur averti.
La qualification d'emprunteur averti a une conséquence sur le point de départ du délai de prescription de l'action en responsabilité (article 2224 du Code civil), puisque celui-ci court à partir du moment où le dommage a été révélé à la victime. A la conclusion du contrat pour les emprunteurs avertis, mais à compter du premier incident de paiement pour les autres si la banque a manqué à son obligation de mise en garde, comme le précise la Cour de cassation dans un autre arrêt (2).
Un manquement de l'assureur à son obligation de conseil
Le demandeur veut également mettre en cause de la responsabilité de la banque pour manquement à son obligation de conseil sur l'adéquation de la garantie souscrite aux besoins de l'assuré. L'assureur ne s'est en effet manifesté qu'au moment où l'emprunteur a pris conscience de l'inadéquation de la garantie souscrite. La Cour d'appel rejette sa demande en considérant que le point de départ de la prescription de l'action en responsabilité - soit le moment où le dommage a été révélé à la victime - se situe à la conclusion du contrat de prêt. Le fait que l'emprunteur ait déjà remboursé deux prêts et signé une garantie CAMCA ne prévoyant pas d'assurance perte d'emploi mais seulement décès et invalidité indique pour la Cour qu'il ne pouvait se méprendre sur ce à quoi il s'engageait. La haute juridiction, plus clémente, substitue à cette date le licenciement de l'emprunteur, prononcé en mai 2010, moment où les échéances du prêt n'ont pas été prise en charge par l'assureur. Si elle ne reconnaît pas explicitement un manquement de l'assureur à son devoir de conseil, le résultat reste identique : le premier recours n'ayant été introduit qu'en septembre 2016, l'action est prescrite.
(1) 1ère chambre civile, 05/01/2022, n°19-24.436
(2) 1ère Chambre civile, 05/01/2022, n° 20-18.893