
Grand risque de déqualification
Le 20 novembre dernier, la Cour de cassation l’a réaffirmé : il n’y a pas de donation-partage sans… partage. Il faudra que l’acte réalise une répartition matérielle entre les enfants donataires, c’est-à-dire sans allotir tous les bénéficiaires – ou certains d’entre eux – d’une part indivise. En pratique, ces donations sont répandues, les ascendants ne pouvant pas toujours se permettre de distribuer trois lots divis en l’absence d’un patrimoine suffisant. « Cela laisse le bénéficie de ce formidable outil de transmission aux seuls patrimoines riches disposant de lots distincts et identifiés permettant d’allotir chacun des enfants », conclut Xavier Boutiron, notaire associé chez Cheuvreux.
Quelles sont les conséquences pour les donations passées et à venir ?
Une requalification en donation simple.
Rappelons que dans deux arrêts de la Cour de cassation de 2013, l’un du 6 mars (1) et l’autre du 20 novembre (2), la Haute juridiction a estimé qu’il y avait lieu de déqualifier l’acte de donaton-partage en cause en donation simple. Les conséquences sont importantes au moment du décès du donateur : rapport et réduction de cette donation en prenant en compte la valeur du bien au jour du décès et non la valeur au jour de la donation-partage, ainsi que le rappelle avec une illustration Bruno Bédaride, notaire à Paris (3).
Cependant, précisons que si les héritiers sont restés propriétaires jusqu’au décès de leur quote-part indivise par hypothèse de même valeur, ces deux impacts ne sont pas à redouter puisque ces derniers devront rapporter la même somme et le calcul de la réserve s’effectuera en prenant en compte le même montant.
Impacts en pratique.
En vertu de cette jurisprudence, toutes les donations-partages de lots indivis pourront se voir requalifiées par le juge – à la demande d’un donataire contestataire – en donation ordinaire au moment du décès du parent donateur.
Quelle solution le notaire peut-il aujourd’hui proposer à ses clients ? Si le bien n’est pas facilement divisible, telle une maison familiale, et si le patrimoine du donateur s’est élargi entre-temps, le notaire peut alors proposer de réincorporer la donation déqualifiée dans une donation-partage répartissant cette fois-ci des lots divis. En présence d’un bien aisément divisible, un acte de partage pourra venir compléter la donation. « Il sera réalisé nécessairement sous l’autorité de l’ascendant donateur. Mais, qu’il s’agisse d’une réincorporation ou d’un partage par acte séparé, la charge fiscale, actuellement ajustée à 2,5 %, risque d’être dissuasive. En outre, ces solutions ne sont que des pis-aller puisque si les valeurs en ressortent effectivement figées, elles ne le seront qu’à la date de la réincorporation ou du partage », précise Philippe Van Steenlandt, directeur du Centre d’études et de recherches du Groupe Monassier. Pour les futures donations de biens difficilement divisibles, des solutions existent, ainsi que l’explique ce dernier (lire l’encadré).
(1) Cass. civ. 1, 6 mars 2013, n° 11-21892 (sur www.agefiactifs.com).
(2) Cass. civ. 1, 20 novembre 2013, n° 12-25681 (sur www.agefiactifs.com).
(3) Lire sur www.agefiactifs.com.