Gel des avoirs : L'ACPR relève des carences dans la mise en œuvre

Leur bonne application resteront un «élément central des contrôles», a prévenu le superviseur.
Adobestock

Les dispositif légaux de gel des avoirs, européens, onusiens ou nationaux ont pris une ampleur «sans précédent» depuis le début de la guerre en Ukraine, rappelle Pierre Allegret, chef du bureau sanctions financières internationales de la direction générale du Trésor (DGT).

Noté par le Groupe d'action financère (Gafi) comme l'un des meilleurs en Europe, notre dispositif de gel des avoirs est aussi l'un des plus contraignants, notamment pour les opérateurs chargés du gel, redevables d'une obligation de résultat. En bémol, le Gafi a d'ailleurs fait part des délais de mise en oeuvre par les acteurs qu'occasionnent parfois les mesures de gel. 

Une révision à venir

L'ACPR a mené une mission spécifique pour évaluer la fiabilité des processus internes auprès d'établissements de crédit et d'assureurs. La revue portait sur le criblage des bases tiers (l'identification des personnes), les délais de déploiement des mises à jour de listes, la sensibilité des outils de criblage et l'analyse de dossiers clients pour évaluer l’effectivité de la mise en œuvre des mesures. Un document d’analyse transversale à venir devrait donner lieu à la révision des lignes directrices conjointes entre la DGT et l'ACPR.

Emilie Yustos, contrôleur LCB-FT à l'ACPR, en a livré les premiers enseignements lors de la conférence annuelle du superviseur. Le régulateur s'est assuré que toutes les personnes sur listes avaient bien été identifiées par les établissements. En dehors d'une défaillance sur un établissement, aucune anomalie particulière n'a été détectée. 

Des réactions tardives

La remise à jour des listes, l'implémentation dans les outils et la génération d'alertes en cas de concordance avec les bases génèrent, conformément aux enseignements du Gafi, plus de difficultés. Les fournisseurs de listes ont pu rencontrer des difficultés dans les livraisons, entraînant leur intégration tardive par les établissements, parfois 7 à 10 jours après publication des arrêtés de gel. 

Les tests des outils de criblage, qui comparent les listes de sanctions avec les bases tiers, ont révélé certaines failles. Les algorythmes générateurs d'alertes peinent à prendre en compte une permutation entre deux mots, une variation orthographique, une similitude phonétique...

Leur paramétrage pour ne pas générer d'alertes en surabondance peut aussi les rendre trop restrictif. Enfin, certaines situations génèrent des trous de ver, comme une sortie de liste avant une réinscription. 

«La qualité des choix du paramétrage et des données renseignées joue un rôle capital, insiste Emilie Yustos. La bonne application des mesures de gel restera un élément central des contrôles de l’ACPR, tant sur pièces que sur place, notamment sur l’efficacité des mesures de détection.»