
Favoriser les dons des grandes fortunes aux fondations

L’Agefi Actifs.- En quoi consiste la mission confiée aux deux députées Sarah El Haïry (Modem, Loire-Atlantique) et Naïma Moutchou (LREM, Val d’Oise) ?
Gabriel Attal. - J’ai annoncé en novembre dernier vouloir travailler sur le développement d’une philanthropie à la française. L’un des principes de cette réflexion consiste à ouvrir de nouveaux droits aux citoyens afin de faciliter les dons de leur succession. C’est le sens de la mission que le Premier Ministre a confié à ces deux députées. Leurs travaux doivent permettre de nous éclairer sur les conditions et les formes d’ouverture envisageables pour ces droits nouveaux, le cadre juridique et les limites à appliquer, notamment, la place et la gouvernance des fondations familiales dans ce cadre. Ma volonté c’est de permettre à celui qui le souhaite, notamment lorsqu’il a très bien gagné sa vie, de donner une partie de sa fortune à des œuvres caritatives, selon des règles spécifiques et protectrices.
Constatez-vous une baisse des dons/legs aux associations/fondations ? De quel ordre ?
- Plusieurs réformes fiscales d’ampleur se sont succédées, celle de l’ISF, puis celle du prélèvement à la source qui se concrétise actuellement. Evidemment cela a pu créer des incertitudes chez les citoyens qui avaient l’habitude de donner. Mais, rappelons que nous nous inscrivons tout de même dans une période d’explosion des dons. Ceux au titre de l’impôt sur le revenu ont augmenté de 70 % depuis 2006 et le mécénat d’entreprise a plus que doublé en cinq ans. Il faudra évidemment attendre les chiffres définitifs sur les dons pour juger du niveau de baisse possible. Mais, en 2017, on craignait déjà une baisse ; or, même si le nombre de donateurs a baissé cette année-là, le total des dons a augmenté en valeur.
La transformation de l’ISF en IFI n’a-t-elle pas eu un impact sur cette baisse ?
- Le mécanisme ISF-Don [réduction de 75 % dans la limite de 50.000 euros] a été maintenu et transformé en IFI-Don. Mais bien évidemment, la transformation de l’ISF en IFI a eu un impact, puisqu’elle a sorti de l’assiette une partie des contribuables. Je sais aussi que les grandes associations et fondations qui connaissent bien leurs donateurs ISF, les ont incités à reporter sur l’impôt sur le revenu la déclaration de tout ou partie de leurs dons.
Avez-vous des études sur des grandes fortunes qui voudraient donner au-delà de leur quotité disponible et qui ne peuvent pas ?
- Je n’ai pas d’étude ou de sondage, mais j’ai eu l’occasion d’échanger avec un certain nombre de personnes, qui ont très bien réussi, et qui souhaitent pouvoir donner plus que ce qui est envisageable aujourd’hui. Xavier Niel [vice-président d’Iliad] l’a annoncé sur Europe 1. Claude Bébéar [président d’honneur d’Axa] a toujours défendu cette idée.
Ne vaudrait-il pas mieux communiquer sur les outils disponibles (renonciation anticipée à l’action en réduction ou assurance vie)
qui permettent justement de passer outre la limite de la réserve héréditaire ?
- Cela fait aussi partie de mon travail. Mieux faire connaître l’ensemble des dispositifs permettant de réaliser des dons, pour les particuliers comme pour les entreprises. Je me déplace beaucoup et rencontre beaucoup d’acteurs pour faire passer ces messages. Néanmoins, cela n’est pas suffisant. Il faut agir pour que les habitudes des citoyens se transforment, que leur perception du don évolue. Cela peut passer par les nouveaux droits évoqués, mais cela devra aussi se faire par des actions éducatives. Je réunirai d’ailleurs au printemps les grands donateurs, les entreprises, les associations et fondations lors d’une journée dédiée à la philanthropie afin d’envisager de nouvelles pistes pour que celle-ci puisse se développer en France.