
Cour de cassation : vigilance dans le choix du tiers administrateur des biens du mineur

En 2010, un particulier décède, laissant pour lui succéder ses deux enfants mineurs, nés d’un mariage dissous par divorce. Aux termes d’un testament olographe, il a légué à sa sœur un tiers des biens composant sa succession et lui a confié la gestion des biens revenant à ses enfants. Invoquant un conflit d'intérêts entre la sœur, dont la qualité d'administratrice des biens de la succession a été reconnue par un arrêt irrévocable, et ses neveux, ainsi qu'une gestion contestable de l'indivision, la mère des deux enfants mineurs a sollicité la prolongation de la mission de la personne désignée en qualité de mandataire successoral par ordonnance du 18 juin 2015.
La cour d’appel prolonge la mission du mandataire successoral désigné par ordonnance du 18 juin 2015 pour un an. Les juges d'appel estiment que si la conclusion d’une convention d’indivision entre les héritiers fait cesser de plein droit la mission du mandataire successoral, il n’en va pas de même lorsque la convention d’indivision est signée par la seule tiers administratrice, agissant également en qualité de représentante des deux enfants mineurs, et qu’un conflit d’intérêts peut être constaté entre elle et ses neveux. Le conflit d’intérêts réside dans l’existence d’un transfert de 150.000 euros provenant d’une société dans laquelle les héritiers possèdent des parts dès lors que cette société était dirigée par l’époux de la tierce administratrice.
La Cour de cassation rejette son pourvoi, estimant que la convention d’indivision avait été signée par la seule tiers administratrice, tant en son nom personnel qu’en celui des deux mineurs, et ce malgré l’existence d’un conflit d’intérêts entre elle et ces derniers. En conséquence, estime la haute juridiction, la cour d’appel « en a exactement déduit que cette convention, signée par une seule personne, n'avait pu avoir pour effet de mettre fin de plein droit à la mission du mandataire successoral conformément à l'article 813-9 du Code civil, et, dans l'exercice de son pouvoir souverain, a ordonné la prolongation de cette mission ».
Pour Claire Farge, du département droit du patrimoine du cabinet Fidal, cet arrêt montre qu’il conviendra « d’être vigilant dans le choix de la personne désignée comme tiers administrateur, dans l’acte de donation ou le testament. Il ne faut pas que la personne désignée puisse risquer d’être en conflit d’intérêts avec les mineurs, ceci afin de donner sa pleine efficacité à cette pratique de la clause de désignation d’un tiers administrateur qui, rappelons-le, permet de gérer le patrimoine d’un mineur en dehors de toutes les contraintes de l’administration légale ».